Œuvres complètes de Béranger/Louis XI
Pour les autres éditions de ce texte, voir Louis XI.
LOUIS XI[1]
Heureux villageois, dansons !
Sautez, fillettes
Et garçons !
Unissez vos joyeux sons,
Musettes
Et chansons !
Notre vieux roi, caché dans ces tourelles,
Louis, dont nous parlons tout bas,
Veut essayer, au temps des fleurs nouvelles,
S’il peut sourire à nos ébats.
Heureux villageois, dansons !
Sautez, fillettes
Et garçons !
Unissez vos joyeux sons,
Musettes
Et chansons !
Quand sur nos bords on rit, on chante, on aime,
Louis se retient prisonnier :
Il craint les grands, et le peuple, et Dieu même ;
Surtout il craint son héritier.
Heureux villageois, dansons !
Sautez, fillettes
Et garçons !
Unissez vos joyeux sons,
Musettes
Et chansons !
Voyez d’ici briller cent hallebardes
Aux feux d’un soleil pur et doux.
N’entend-on pas le Qui vive des gardes,
Qui se mêle au bruit des verroux ?
Heureux villageois, dansons !
Sautez, fillettes
Et garçons !
Unissez vos joyeux sons,
Musettes
Et chansons !
Il vient ! il vient ! Ah ! du plus humble chaume
Ce roi peut envier la paix.
Le voyez-vous, comme un pâle fantôme,
À travers ces barreaux épais ?
Heureux villageois, dansons !
Sautez, fillettes
Et garçons !
Unissez vos joyeux sons,
Musettes
Et chansons !
Dans nos hameaux quelle image brillante
Nous nous faisions d’un souverain !
Quoi ! pour le sceptre une main défaillante !
Pour la couronne un front chagrin !
Heureux villageois, dansons !
Sautez, fillettes
Et garçons !
Unissez vos joyeux sons,
Musettes
Et chansons !
Malgré nos chants il se trouble, il frissonne :
L’horloge a causé son effroi.
Ainsi toujours il prend l’heure qui sonne
Pour un signal de son beffroi.
Heureux villageois, dansons !
Sautez, fillettes
Et garçons !
Unissez vos joyeux sons,
Musettes
Et chansons !
Mais notre joie, hélas ! le désespère ;
Il fuit avec son favori.
Craignons sa haine, et disons qu’en bon père,
À ses enfants il a souri.
Heureux villageois, dansons !
Sautez, fillettes
Et garçons !
Unissez vos joyeux sons,
Musettes
Et chansons !
Air noté dans Musique des chansons de Béranger :
LOUIS XI.
↑ Haut
- ↑ On sait que ce roi, retiré au Plessis-lez-Tours avec Tristan, confident et exécuteur de ses cruautés, voulait voir quelquefois les paysans danser devant les fenêtres de son château.