Œuvres de Camille Desmoulins/Tome III/Arrêté du Conseil des Cinq-Cents

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ARRÊTÉ
Du Conseil des Cinq-Cents

Qui déclare que Camille Desmoulins a été conduit à la mort pour s’être élevé contre les proscriptions, et avoir rappelé des sentiments d’humanité trop longtemps oubliés.


Extrait du procès-verbal des séances du Conseil des Cinq-Cents.
Du 7 floréal, l’an IV de la République française,
une et indivisible.

Un membre, au nom de la Commission formée pour examiner les pétitions des citoyennes Valazé, Carra, Gorsas, Brissot et autres, présente un projet de résolution qui est mis aux voix et adopté dans les termes suivants :

Le Conseil considérant que les citoyens Valazé, Pétion, Carra, Buzot, Gorsas, Brissot, représentants du peuple, membre de la Convention nationale, sont du nombre des représentants qui après avoir coopéré à établir la liberté et à fonder la République, l’ont scellée de leur sang et sont morts victimes de leur dévouement à la patrie et de leur respect pour les droits de la nation.

Considérant que par leur mort, leurs femmes et leurs enfants sont privés de leurs secours et réduits à l’indigence.

Considérant que le citoyen Philippeaux, représentant du peuple et membre de la Convention nationale, a été conduit à la mort pour avoir révélé les intrigues par lesquelles se perpétuait la guerre de Vendée : que sa veuve est dans l’indigence.

Considérant que Camille Desmoulins, aussi représentant du peuple, membre de la Convention nationale, fut conduit à la mort, pour s’être élevé contre les proscriptions et avoir rappelé des principes d’humanité déjà trop longtemps oubliés.

Qu’il est instant de venir au secours de ces infortunés, qui ont des droits égaux à la reconnaissance nationale.

Le Conseil déclarant qu’il y a urgence, prend la résolution suivante :

Article Ier. — Il sera payé, par le Trésor public, aux veuves ou enfants des citoyens Philippeaux, Camille Desmoulins, etc., un secours annuel qui sera déterminé ainsi qu’il suit :

Article II. — Chaque veuve recevra annuellement deux mille francs ; dans le cas où elle aurait des enfants nés de son mariage avec le représentant du peuple, il lui est accordé une augmentation de mille francs pour chacun d’eux jusqu’à ce qu’ils aient atteint l’âge de quinze ans ; toutefois le total des secours ne pourra excéder la somme de 4,000 francs.

Article III. — Si la mère vient à décéder, le secours accordé aux enfants leur sera continué jusqu’à l’âge de dix-huit ans.

Article IV. — Les enfants des citoyens sus-énoncés qui, dès à présent auraient perdu leur mère, recevront 2,000 francs : s’ils sont plusieurs, le secours sera porté à 3,000 francs. Ce secours leur sera payé jusqu’à ce qu’ils aient atteint dix-huit ans.

Article V. — La présente résolution sera imprimée, elle sera portée au Conseil des Cinq-Cents par un messager d’État.


Collationné sur l’original par nous président et secrétaires du Conseil des Cinq-Cents, à Paris, le 25 floréal an IV de la République française, une et indivisible.

Crassons de L’Hérault, président.
Bion, Le Beffroy, secrétaires.

Nota. — La pension accordée à Horace, fils de C. Desmoulins, par cet arrêté, ne lui fut jamais payée.