Œuvres de Du Marsais/Tomme III/Des Tropes/Avertissement de la première Edition.

La bibliothèque libre.
Œuvres de Du Marsais
Pougin (3p. iii-vi).


AVERTISSEMENT


De la première édition.


Je suis persuadé, par des expériences réitérées, que la méthode la plus facile et la plus sûre pour comencer à aprendre le latin, est de se servir d’abord d’une interprétation interlinéaire, où la construction soit toute faite, et où les mots sous-entendus soient supléés. J’espère doner bientôt au public quelques-unes de ces traductions.

Mais, quand les jeunes gens sont devenus capables de réflexion, on doit leur montrer les règles de la grammaire, et faire avec eux les observations grammaticales qui sont nécessaires pour l’intelligence du texte qu’on explique. C’est dans cette vue que j’ai composé une grammaire où j’ai rassemblé ces observations.

Je divise la grammaire en sept parties, c’est-à-dire, que je pense que les observations que l’on peut faire sur les mots, en tant que signes de nos pensées, peuvent être réduites sous sept articles, qui sont :

1o. La conoissance de la proposition et de la période, en tant qu’elles sont composées de mots, dont les terminaisons et l’arangement leur font signifier ce qu’on a dessein qu’ils signifient :

2o. L’orthographe.

3o. La prosodie, c’est-à-dire, la partie de la grammaire qui traite de la prononciation des mots, et de la quantité des syllabes.

4o. L’étymologie.

5o. Les préliminaires de la syntaxe : j’apèle ainsi la partie qui traite de la nature des mots et de leurs propriétés grammaticales, c’est-à-dire, des nombres, des genres, des persones, des terminaisons ; elle contient ce qu’on apèle les rudimens.

6o. La syntaxe.

7o. Enfin, la conoissance des diférens sens dans lesquels un même mot est employé dans une même langue. La conoissance de ces diférens sens est nécessaire, pour avoir une véritable intelligence des mots, en tant que signes de nos pensées : ainsi j’ai cru qu’un traité sur ce point apartenoit à la grammaire, et qu’il ne faloit pas atendre que les enfans eussent passé sept ou huit ans dans l’étude du latin, pour leur aprendre ce que c’est que le sens propre et le sens figuré, et ce qu’on entend par Métaphore ou par Métonymie.

On ne peut faire aucune question sur les mots qui ne puisse être réduite sous quelqu’un de ces sept articles. Tel est le plan que je me suis fait, il y a long-temps, de la grammaire.

Mais, quoique ces diférentes parties soient liées entre elles, de telle sorte qu’en les réunissant toutes ensemble, elles forment un tout qu’on apèle Grammaire ; cependant chacune en particulier ne supose nécessairement que les conoissances qu’on a aquises par l’usage de la vie. Il n’y a guère que les préliminaires de la syntaxe qui doivent précéder nécessairement la syntaxe ; les autres parties peuvent aler assez indiférament l’une avant l’autre : ainsi cette partie de grammaire que je done aujourd’hui, ne suposant point les autres parties, et pouvant facilement y être ajoutée, doit être regardée come un traité particulier sur les tropes et sur les diférens sens dans lesquels on peut prendre un même mot.

Nous avons des traités particuliers sur l’orthographe, sur la prosodie, ou quantité, sur la syntaxe, etc. : en voici un sur les tropes.

Je rapèle quelquefois dans ce traité certains points, en disant que j’en ai parlé plus au long ou dans la syntaxe, ou dans quelqu’autre partie de la grammaire ; on doit me pardoner de renvoyer ainsi à des ouvrages qui ne sont point encore imprimés, parce qu’en ces ocasions je ne dis rien qu’on ne puisse bien entendre sans avoir recours aux endroits que je rapèle, j’ai cru que puisque les autres parties suivront celle-ci, il y auroit plus d’ordre et de liaison entre elles, à suposer pour quelque tems ce que j’espère qui arivera.