Aladin (Gilkin)

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La NuitLibrairie Fischbacher (Collection des poètes français de l’étranger) (p. 104-105).
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ALADIN



Et si je descendais aux souterrains magiques ?
— Des milliards d’argent et d’or prodigieux,
Rêve immémorial d’empereurs nostalgiques,
Moutonnent sur le sol en fleuves glorieux.

Aux arbres de corail jaillis de maint haut vase
Pendent des fruits natifs d’un fabuleux Ophir :
Poires d’aigue-marine, abricots de topaze,
Groseilles de rubis et prunes de saphir.

Mais dans la niche au fond du caveau du miracle
Mystérieusement brûle un flambeau sacré, —
Lumière, ô mon seul rêve ! — et son éclat nacré
Angélise l’opale en feu du tabernacle.

Arrière, fruits, joyaux, qu’ici laissent gésir
Mes superbes dédains, ailés vers cette flamme !
Mais hélas ! Idéal ! Mais hélas ! ô mon âme !
À peine atteint, s’éteint mon lumineux désir.

Plus de jardin gemmal, rien qu’une âpre broussaille,
Des ronces, des chardons, des herbages fangeux
Et des roseaux puants, mous et marécageux
Où, luisants de poisons, maint reptile tressaille.

Plus de souterrain d’or ; mais, grouillant de honteux
Insectes, une cave ignoble et vénéneuse,
— Symbole désolant, image douloureuse
Du désastre éternel de nos plus nobles vœux.