Anecdotes pour servir à l’histoire secrète des Ebugors. Statuts des sodomites au XVIIe siècle./III/15

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Texte établi par Jean HervezBibliothèque des curieux (éditions Briffaut) (p. 87-89).

Bandeau de début de chapitre
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CHAPITRE XV

LES CYTHÉRÉENNES FONT UNE SORTIE


Separateur-7-Vaguelettes orienté bas
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Cependant les Cythéréennes furent informées par leurs espions du désordre qui régnait dans l’armée des assiégeants ; elles résolurent de profiter de cette occasion pour faire une vigoureuse sortie sur l’ennemi. L’officier général qui était de tranchée ce jour-là se vit abattu sous les coups d’une Emécondine. On encloua plusieurs pièces de gros canon qui furent mises hors d’état de tirer, jusqu’à ce qu’elles eussent été refondues. Après cela, ces braves Amazones se répandirent dans le camp des ennemis. Les Carges surtout pénétrèrent dans les tentes des soldats sur qui elles firent main basse. Dieux ! de combien d’actions glorieuses l’envieuse Nuit ne nous déroba-t-elle point la connaissance ? Les Durpes surent bien profiter des ténèbres pour signaler leur courage.

Les assiégeants, qui ne s’attendaient pas à être réveillés de la sorte, ne s’oublièrent point en cette occasion. Ceux à qui les fumées du vin n’avaient pas troublé la cervelle se mirent en état de défense et se battirent en furieux. Teuscotoser fit des exploits dignes d’un éternel souvenir. Tous ceux qui se présentèrent à lui furent aussitôt étendus par terre et immolés à son vif ressentiment. À combien de malheureuses victimes Kulisber ne fit-il pas mordre la poussière ! Ceux qui expirèrent sous ses coups n’eurent pas la consolation de tourner vers le ciel leurs mourants et derniers regards.

Cependant le jour commençait à paraître. Il fallut songer à se retirer dans la ville. Les Cythéréennes y rentrèrent en bon ordre ; elles furent poursuivies par les Caginiens, qui mirent tout en pièces une brigade de Meauraquex qui faisaient l’arrière-garde. Ce ne fut que lorsque le soleil fit briller ses premiers rayons qu’on reconnut l’horrible ravage qui s’était fait dans le camp pendant la nuit. La plupart des soldats furent si maltraités dans cette affaire qu’il leur fallut plusieurs jours pour se remettre de leurs fatigues. Au bout de quelque temps, ils se trouvèrent en état de continuer leurs opérations, et ils poussèrent le siège avec plus de vigueur que jamais. Quoique leur feu fût très vif, il l’était cependant beaucoup moins que celui des Cythéréennes. Celles-ci faisaient double et triple décharge, tandis que leurs ennemis pouvaient à peine en faire une seule. Mais si les forces manquaient aux alliés, ils trouvaient des ressources infinies dans la grandeur de leur courage.


Vignette de fin de chapitre
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