Anecdotes pour servir à l’histoire secrète des Ebugors. Statuts des sodomites au XVIIe siècle./III/19

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Texte établi par Jean HervezBibliothèque des curieux (éditions Briffaut) (p. 102-104).

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CHAPITRE XIX

RECETTE POUR FAIRE REVENIR LE COURAGE


Separateur-7-Vaguelettes orienté haut
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Rien n’est plus contagieux que le mauvais exemple ; on en fit une triste expérience dans le camp des alliés. Les Brularnes, qui y servaient en qualité de volontaires, corrompirent les plus vigoureux soldats, qui tombèrent bientôt dans une mollesse fort préjudiciable aux intérêts des assiégeants. Dès que l’on connut le mal, on travailla à y apporter remède. D’abord on tâcha de les ranimer par le récit des plus belles actions guerrières. Les vives descriptions de combats, les détails curieux, les particularités intéressantes, rien de tout cela ne fut omis. Si les discours ne faisaient pas une assez vive impression, on exposait à leurs yeux les portraits de ces fameux héros et de ces héroïnes célèbres, dont la peinture a pour jamais immortalisé les vertus. Les différentes attitudes de ces illustres personnages, la vivacité de leurs regards, les transports dont ils paraissaient animés, tout cela produisait ordinairement des effets merveilleux sur l’âme des spectateurs. S’il s’en trouvait quelqu’un qui y fût insensible, on avait recours à un moyen fort extraordinaire : on dépouillait le lâche, on s’armait de verges, et des bras puissants faisaient tomber une grêle de coups sur les parties les plus charnues de son corps. Cette opération met tout le sang en mouvement, ranime les esprits et rappelle le courage dans les cœurs. Presque toujours par cette épreuve,

Redit in præcordia virtus.

Ceux qui avaient passé par cette cérémonie sans donner aucun signe de conversion étaient regardés comme des malades incurables, et à cet effet on les reléguait aux invalides de Modose.

Cette dernière recette, dont les Ebugors se servent comme d’un remède efficace, est employée comme punition chez les Todéves. Lorsqu’elles ont commis quelques fautes, les Cerutedirs prennent les fouets vengeurs et déchirent la peau des coupables. Ces cruels exécuteurs goûtent encore une satisfaction infinie à considérer les vestiges de leur cruauté, et cette vue excite toujours en eux des mouvements qui tournent à l’avantage des Todéves qu’ils ont ainsi châtiées. Tant est vrai le proverbe qui dit que mal est souvent propre à un grand bien.


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