Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 02/Géométrie, article 25

La bibliothèque libre.
Séparateur
Solutions du dernier des deux problèmes de géométrie
proposés à la page 256 de ce volume.
≈≈≈≈≈≈≈≈≈

Énoncé I. À un même triangle donné quelconque, on peut inscrire une infinité de systèmes de trois cercles dont les rayons soient proportionnels à des droites données, et dont chacun touche les deux autres et un côté du triangle donné.

On propose de construire le plus petit de ces systèmes ?

II. Au système de trois cercles donnés quelconques, se touchant deux à deux, on peut circonscrire une infinité de triangles semblables à un triangle donné, de manière que chaque côté du triangle touche un des cercles donnés.

On propose de construire le plus grand de ces triangles ?

Première solution ;
Par M. Bidone, professeur de mathématiques à l’académie
de Turin.

Soit un triangle (fig.10), et soient les centres de trois cercles dont chacun touche les deux autres et un côté de ce triangle.

Je dis que, si le triangle est le plus grand, parmi tous ceux de son espèce, qui puisse être circonscrit au système des trois cercles dont les centres sont ces cercles seront, à l’inverse, les plus petits de tous ceux qui, ayant leurs rayons dans le même rapport que les leurs, puissent être inscrits au triangle de manière que chacun d’eux touche les deux autres et un côté du triangle.

Si, en effet, on pouvait, sous les conditions données, inscrire au triangle trois cercles plus petits que ceux dont les centres sont  ; en faisant croître proportionnellement les dimensions de la figure, on parviendrait à rendre ces trois cercles égaux à ceux dont les centres sont  ; et alors le triangle, devenu plus grand que se trouverait circonscrit comme lui à ces trois cercles, ce qui est contre l’hypothèse.

Je dis, en second lieu, que réciproquement, si le système des cercles dont les centres sont est le plus petit de tous ceux de même espèce qu’il soit possible d’inscrire, sous les conditions données, au triangle ce triangle sera, à l’inverse, le plus grand parmi tous ceux de son espèce, qu’il soit possible de circonscrire, sous les mêmes conditions, au système de ces trois cercles.

Si, en effet, on pouvait, sous les conditions données circonscrire à ce système un triangle plus grand que en faisant décroître proportionnellement les dimensions de la figure, on parviendrait à rendre ce triangle égal à et alors le système des trois cercles devenus plus petits, se trouverait comme celui des trois cercles dont les centres sont inscrit à ce triangle, ce qui est contre l’hypothèse.

Il résulte de ces considérations, et de ce que, sur une ligne donnée, on peut toujours construire une figure semblable à une figure donnée, que chacun des deux problèmes que présente la question proposée, peut, par de simples proportions, être ramené à l’autre. Or, comme un problème est réputé résolu, lorsqu’on en a ramené la solution à celle d’un autre problème qu’on sait résoudre, et comme d’ailleurs le dernier des deux problèmes proposés permet une construction facile, c’est le seul dont nous nous occuperons ici.

Soient donc (fig. 10) les centres de trois cercles donnés, se touchant deux à deux ; et proposons-nous de circonscrire à leur système, un triangle donné d’espèce, dont chaque côté touche un de ces cercles, et qui soit le plus grand possible. Concevons que le problème soit résolu, et que le triangle cherché soit Par les centres soient menées les droites respectivement parallèles à et formant par leur concours le triangle semblable à Soient enfin joints les centres par des droites qui formeront un triangle inscrit à

Cela posé, je dis que le triangle est le plus grand de tous les triangles semblables à qu’il soit possible de circonscrire au triangle donné . Si, en effet, il n’en était pas ainsi, on pourrait, au triangle circonscrire un triangle semblable à plus grand que  ; et, en menant au cercle des tangentes parallèles aux côtés de ce dernier triangle, ces tangentes formeraient un nouveau triangle circonscrit aux trois cercles, semblable à , et évidemment plus grand que lui ; en sorte que, contrairement à l’hypothèse, ce dernier ne serait pas celui qui résout le problème.

Le dernier des deux problèmes proposés, et conséquemment le premier ; se trouve donc ramené au suivant ; À un triangle donné, circonscrire un autre triangle, donné d’espèce, qui soit le plus grand possible ?

Or, on sait résoudre ce problème[1], et on sait, de plus, qu’il n’admet qu’une solution, si l’on indique à quel côté du triangle donné doit répondre chacun des angles du triangle cherché, qu’il en a six dans le cas contraire, et qu’alors conséquemment il donne lieu à un maximum-maximorum qu’on obtiendra de la manière suivante, ainsi qu’il sera démontré plus loin.

Sur les côtés du triangle , pris pour cordes, et extérieurement à ce triangle, soient décrits des arcs de cercles respectivement capables des angles donnés du triangle cherché , de manière que l’arc capable du plus petit angle, réponde au plus grand des trois côtés du triangle donné , et que l’arc capable du plus grand angle, réponde à son plus petit côté ; menant alors, par les points des droites respectivement parallèles à celles qui joignent les centres de ces arcs, ces droites formeront, par leur rencontre, le triangle cherché .

Pour achever la solution du dernier des deux problèmes proposés, il suffira donc de mener aux cercles donnés des tangentes respectivement parallèles aux côtés du triangle  ; ces droites formeront, par leur rencontre, le triangle demandé .

Si c’est, au contraire, le premier problème qu’on veut résoudre, on décrira d’abord arbitrairement trois cercles, se touchant deux à deux, et ayant leurs rayons dans le rapport des droites données. On circonscrira ensuite, par ce qui vient d’être dit, au système de ces trois cercles, un triangle semblable au triangle donné, et le plus grand possible. Construisant enfin une figure semblable à celle qu’on aura obtenue, mais dans laquelle le triangle circonscrit soit égal au triangle donné, le problème se trouvera résolu.

Dans le cas où les rayons des trois cercles donnés ou cherchés doivent être égaux, et dans celui où le triangle donné ou cherché doit être équilatéral, il n’y a plus lieu au maximum-maximorum, ni au minimum-minimorum ; parce que les six solutions du problème se réduisent alors à une solution unique.

Il reste à prouver qu’en construisant de la manière qui vient d’être indiquée, on obtient, en effet, le minimum-minimorum, pour le premier problème, et conséquement le maximum-maximorum, pour le second.

Soit (fig. 11) un triangle donné, dont les angles soient  ; soient décrits, sur les côtés de ce triangle, pris pour cordes, et extérieurement, des arcs de cercles respectivement capables des trois angles d’un triangle donné quelconque ; soient les centres de ces arcs, et soient joints ces points par des droites qui formeront le triangle  ; soit enfin circonscrit au triangle un triangle dont les côtés soient respectivement parallèles à ceux du triangle .

Soient joints  ; et des points soient abaissées sur et les perpendiculaires et  ; les points et seront les milieux de ces droites ; les angles et seront respectivement égaux aux angles et  ; et on aura de plus moitié de [2]

Nommant donc les trois côtés du triangle et ceux du triangle  ; on aura, étant le quadrans,

Or, le triangle donne

substituant donc, il viendra

c’est-à-dire,

Mais, en désignant par l’aire du triangle on a

donc

Posant donc

il viendra

Si l’on désigne par l’aire du triangle on aura

et par conséquent

Présentement pour que ce triangle soit un maximum absolu, il faut qu’on ne puisse faire subir aux angles aucune permutation sans en diminuer la surface ; il faut donc qu’on ait

inégalité qui, en remarquant que sont essentiellement positifs, devient, en transposant, réduisant et chassant le dénominateur,

il faut donc que

et

soient de mêmes signes, ou qu’en supposant on ait  ; ainsi l’angle étant déterminé à correspondre au côté il faut que le plus petit des deux autres angles corresponde au plus grand des deux autres côtés, et vice versa ; d’où il est facile de conclure la construction indiquée ci-dessus.

Nous croyons devoir faire remarquer, en passant, que la valeur de peut être mise sous cette forme très-simple

Si l’on suppose, au contraire, donnés les côtés du triangle et les angles du triangle en posant, pour abréger

on trouvera

d’où on conclura

de cette valeur de et de celle de résulte cette relation remarquable

À l’aide de ce qui précède, on parviendra facilement aux résultats suivants.

I. Soient les trois côtés d’un triangle donné, son aire, des droites auxquelles les rayons des trois cercles inscrits doivent être proportionnels, et ces rayons ; en posant, pour abréger,

il viendra

II. Si au contraire, les rayons des trois cercles étant donnés, on demande les côtés plus grand triangle circonscrit dont les angles soient en posant, pour abréger,

on trouvera

Deuxième solution ;
Par M. Lhuilier, professeur de mathématiques à l’académie
impériale de Genève.

Lemme connu. Soit un triangle donné de grandeur et d’espèce. Par les sommets de ce triangle soient menées des droites qui forment un triangle circonscrit au premier. Que ce second triangle soit donné d’espèce seulement. On détermine, comme il suit, le plus grand de ces triangles.

Sur les côtés du premier triangle soient décrits (extérieurement à lui) des segmens de cercles respectivement capables des angles donnés du second triangle. Par chacun des sommets du premier triangle, soit menée une droite parallèle à la droite qui joint les centres des cercles dont les jambes de cet angle sont les cordes. Ces parallèles formeront le plus grand triangle demandé.[3]

PROBLÈME I. Soient trois cercles donnés de grandeur et de position, dont chacun touche les deux autres (extérieurement). Mener à chacun de ces cercles une tangente, de manière que le triangle formé par ces trois tangentes ait ses angles donnés, et soit le plus grand possible ?

Soient les centres donnés de trois cercles qui se touchent extérieurement (fig. 12). Soient leurs rayons donnés. Soient les points de contact de ces trois cercles et des droites qui, par leur rencontre, forment un triangle dont les angles sont donnés et qui doit être le plus grand.

Analise. Le triangle est déterminé. Par les centres soient menées aux côtés du triangle des parallèles ; elles formeront un triangle semblable au triangle et circonscrit au triangle .

Les quadrilatères sont déterminées, puisque, dans chacun d’eux, on connaît, outre les angles, deux côtés adjacents, qui sont les rayons de deux des cercles donnés.

Les rectangles dans chacun desquels un des côtés est donné (savoir le rayon de l’un des cercles donnés), croissent comme les côtés du triangle et, en particulier, le triangle est le plus grand, lorsque le triangle est le plus grand. Partant, on détermine comme il suit le plus grand triangle

Construction. Au triangle soit circonscrit (Lemme) le plus grand triangle ayant ses angles égaux aux angles donnés du triangle Soient menées aux cercles donnés des tangentes respectivement parallèles aux côtés du triangle . Ces tangentes formeront, par leurs rencontres, le triangle demandé

PROBLEME II. À un triangle donné, inscrire trois cercles dont les rayons soient entre eux dans des rapports donnés ; de manière que chacun de ces cercles touche un des côtés du triangle donné, que chacun d’eux touche aussi les deux autres cercles (extérieurement), et que le système de ces cercles soit le plus petit possible.

Solution. La solution de ce second problème est ramenée à celle du premier, par la méthode ordinaire de fausse position.

Remarque I. Le cas particulier de l’égalité des rayons des cercles donnés rend équilatéral le triangle

Remarque II. Au lieu de s’occuper de la limite en grandeur du triangle donné d’espèce, circonscrit au système des cercles donnés, on peut demander que ce triangle soit donné de grandeur. Et réciproquement, au triangle donné, on peut inscrire un système de cercles donné de grandeur. Ces problèmes sont élémentaires ; et on peut tirer de leur construction la limite pour l’un et l’autre cas.

Remarque III. Tout ce qui a été dit sur le cas du contact des trois cercles s’applique à un système de trois cercles dont les rayons ont des rapports donnés, soit entre eux soit aux droites qui joignent leurs centras.

Envisagé sous ce point de vue général, le problème proposé donne lieu à huit cas, suivant que les contacts des cercles et des côtés du triangle, relativement à ce triangle, sont tous les trois intérieurs, deux intérieurs et un extérieur, un intérieur et deux extérieurs, ou enfin tous les trois extérieurs.

Troisième solution ;
Par M. Rochat, professeur de navigation à St-Brieux.

M. Rochat, en traitant les deux problèmes d’une manière purement analitique, est parvenu à des formules assez simples, mais dont il n’a pas indiqué la construction.

  1. Voyez les pages 88 et suivantes de ce volume.
  2. Voyez la page 24 de ce volume.
  3. Voyez les pages 27-32 de ce volume ; voyez aussi mes Élémens d’analise géométrique, etc., pages 212-225.