Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 04/Analyse élémentaire, article 3

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Texte établi par Joseph Diez Gergonne (4p. 115-120).

ANALISE.

Détermination du nombre des termes d’une équation
complète d’un degré quelconque, entre un nombre
quelconque d’inconnues.
Recherche des principales formules de la théorie des
nombres figurés.
Démonstration du principe qui sert de fondement à
la méthode publiée par M. Budan, pour la résolution
des équations numériques ;
Par M. Gergonne.
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Je réunis ici, dans un même article, diverses théories qui, à raison de la liaison étroite qui existe entre elles, ne peuvent que se simplifier beaucoup par leur rapprochement.

§. I.
Détermination du nombre des termes d’une équation complète d’un degré quelconque, entre un nombre quelconque d’inconnues.

Soit le degré d’une équation complète entre inconnues ; le nombre des termes de cette équation sera une fonction de et de qu’il s’agit de déterminer, et que nous représenterons par

Pour plus de simplicité, concevons que les coefficiens de tous les termes de cette équation soient positifs et égaux à l’unité : ce qui ne changera rien à la nature du problème. L’équation proposée devant renfermer tous les termes de l’équation complète du degré, entre inconnues, plus la totalité des termes du ordre, entre les mêmes inconnues ; en désignant par le nombre de ces derniers, on devra avoir l’équation

(1)

Il s’agit présentement de déterminer

Pour cela, concevons que l’on multiplie chacun des termes d’ordres inférieurs à par une somme de puissances semblables des inconnues, dont les exposans soient tels que ces multiplications donnent toutes des produits de l’ordre  : ce qui exigera que l’on multiplie le terme tout connu par l’ensemble des termes du premier ordre par , et ainsi de suite ; il est clair que le nombre total des termes de ces produits, abstraction faite de toute réduction, sera .

Or, je dis que ces mêmes termes ne seront autre chose que les termes du ordre de la proposée, écrits chacun fois. En effet, en représentant généralement l’un de ces derniers par avec la condition on voit qu’il aura été formé autant de fois qu’il y a de manières de diminuer successivement chacun de ses exposans de toutes les unités qu’il renferme ; c’est-à-dire, de manières différentes.

On a donc, d’après cela

(2)

et par conséquent (1)

ou enfin

(3)

En changeant successivement, dans cette équation, en 2,1, et remarquant que il viendra

ce qui donnera, en multipliant, supprimant les facteurs communs aux deux membres de l’équation produit, et tirant la valeur de [1],

(4)

formule qui résout le problème.

Cette solution, la plus simple que je connaisse, m’a été communiquée par M. G. Fornier, élève très-distingué du lycée de Nismes.

Si l’on multiplie, haut et bas, la valeur de par elle devient

ou, en adoptant les notations de M. Kramp[2]

On voit alors que est une fonction symétrique de et , et qu’ainsi on doit avoir

(5)

ce qui revient à dire qu’il y a autant de termes dans une équation complète du n.me degré entre inconnues qu’il y en a dans une équation complète du m.me degré entre inconnues.

§. II
Recherche des principales formules de la théorie des nombres
figurés.

Parce que est une fonction symétrique des nombres et nous emploirons, à l’avenir, pour représenter cette fonction, la notation plus simple

En conséquence, nous aurons

(6)

et, quels que soient et

(7)

Cette notation admise, l’équation (3), dans laquelle on peut permuter entre eux les nombres et donnera

la somme de ces deux équations, divisée par sera

(8)

or, en se rappelant les équations (7), on voit que cette dernière exprime la construction du triangle arithmétique ; et qu’ainsi est la formule générale des nombres figurés.

L’équation (6) exprime donc que le nombre figuré du ordre est égal au nombre figuré du ordre ; et l’équation (8) exprime que le nombre figuré du ordre, ou le nombre figuré du ordre, est la somme du nombre figuré du ordre et du nombre figuré du ordre.

De cette dernière on tire

substituant successivement pour dans celle-ci, les nombres il viendra

ajoutant ces dernières et réduisant, on aura

(9)

et l’on aurait pareillement

c’est-à-dire, que le nombre figuré du ordre, ou le nombre figuré du ordre, est égal à la somme des nombres figurés de tous les ordres jusqu’au ordre inclusivement ; ou encore à la somme des premiers nombres figurés du ordre.

Je terminerai par donner, d’après M. Lhuilier[3], la sommation des inverses des nombres figurés. Il est aisé de se convaincre, par le développement et les réductions, que l’équation suivante est identique

(10)

Si l’on y substitue successivement pour les nombres il viendra

d’où, en ajoutant et réduisant,

ou encore

(11)

Si, dans cette dernière formule, ou suppose elle deviendra simplement,

(12)

c’est-à-dire,

  1. Voyez la note de la page 200 du second volume de ce recueil.
  2. Voyez la note de la page 1.re du 3.e volume de ce recueil.
  3. Voyez ses Élémens raisonnés d’algèbre.