Annales de pomologie belge et étrangère/Pomme Reinette d’Espagne

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Reinette d’Espagne.

Synonymies : Reinette blanche d’Espagne, Lindley, Mayer, etc. ; Reinette gelbe, en Allemagne ; Fall pippin, Reinette de Hollande, en Amérique ; Reinette blanche, Reinette tendre, dans quelques traités et catalogues français.

Gros fruit encore trop peu connu, auquel les uns accordent une très-haute valeur, et les autres une estime assez médiocre. Ne serait-ce pas parce qu’on confond la Reinette dont nous voulons parler avec d’autres d’un mérite inférieur ?

En effet, s’il faut en croire M. Noisette, « c’est l’une des meilleures pommes à couteau ; » d’Albret, au contraire, qui la range parmi les pommes d’automne, la considère comme un fruit de seconde qualité ; il la confond apparemment avec certaine pomme très-sujette à se cotonner, et meilleure cuite que crue, qui mûrit, en effet, d’assez bonne heure : la Reinette blanche, de MM. Dubreuil et Noisette (qui n’est pas celle de Duhamel) ; le Blanc d’Espagne, de Couverchel et du Bon Jardinier ; Die Achte Weisse franzesische Reinettö, des pomologistes allemands.

Le savant pomologue Diel ne l’a pas mieux connue, à ce qu’il semble. Il la croit originaire de Lorraine, en fait une même variété avec la Reinette verte, dite allemande en Alsace, et ne veut pas qu’on la confonde avec la pomme connue en Espagne depuis une très-haute antiquité sous le nom de Camuesar, fort grosse, dit-il, mais médiocre. M. Lindley croit, au contraire, à l’identité des deux variétés.

Enfin, on a aussi quelquefois confondu la vraie Reinette d’Espagne avec la Reinette de Hollande, qui a quelques traits de ressemblance, mais qui lui est incontestablement inférieure en volume et en qualité.

Doit-on s’étonner si ce beau et excellent fruit n’est pas aussi répandu qu’il devrait l’être ? Il n’en faut pas chercher la cause ailleurs que dans cette confusion, dans ces nombreuses méprises. On lui a reproché, nous le savons, son énorme volume ; mais c’est là un de ces défauts qu’on pardonne volontiers assez généralement ; au surplus, ce reproche n’est guère imputable qu’aux fruits venus sur les vieux arbres et sur paradis.

Signalons dans la Reinette qui nous occupe deux caractères qui la font assez aisément distinguer des pommes de forme et de coloris analogues : un goût acidulé et relevé qui rappelle le Calville blanc, et particulièrement la fleur ou poussière glauque qui tapisse légèrement son épicarpe. On pourrait indiquer un troisième caractère, et ajouter que bien rarement elle se teint de rouge léger du côté frappé par les rayons solaires.

Le volume et la forme sont assez variables ; celle-ci est ordinairement allongée, et parfois sphéroïdale. La périphérie est aussi plus ou moins anguleuse.

L’œil, bien conformé, est placé dans une cavité évasée, souvent profonde, dont les bords sont sillonnés de plis onduleux, réguliers.

La cavité du pédoncule, qui est assez fort et long (environ 2 centimètres), est également profonde, infundibuliforme, ordinairement maculée de gris fauve.

La peau est d’abord de couleur paille ou jaune pâle, devenant bientôt plus foncé ou jaune-citron, en atteignant l’époque de maturité. Les tiquetures sont nombreuses et généralement assez fines.

La chair, d’un blanc un peu jaunâtre, est fine, ferme et cependant légère. Son eau est abondante ; sa saveur relevée, suave, rappelle celle du Calville blanc.

Cet excellent fruit mûrit en novembre, époque où il a toutes ses rares qualités, mais elles ne s’altèrent pas avant la mi-février.

L’arbre est vigoureux et des plus productifs ; cultivé en haut-vent dans un sol et une exposition favorables, à l’abri des vents d’ouest, il fait l’ornement d’un verger par ses belles proportions et son feuillage touffu ; néanmoins, la forme naine, en entonnoir, lui convient incomparablement mieux. (Ainsi a été obtenu aux Vennes, lez-Liége, le spécimen représenté dans la planche ci-jointe.)

Aug. Hennau.