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Astronomie populaire (Arago)/II/09

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GIDE et J. BAUDRY (Tome 1p. 52-57).

CHAPITRE IX

moteurs des horloges


Dans l’horloge de la tour du Palais, exécutée à Paris, sous Charles V, par l’artiste allemand Henri de Vic, il y avait un poids moteur qui était de 250 kilogrammes. Il descendait, en vingt-quatre heures, de 10 mètres. (Berthoud, Histoire, p. 53).

Julien Le Roi citait de grosses horloges dans lesquelles le poids moteur allait jusqu’à 500 à 600 kilogrammes.

La première application d’une horloge à roues dentées aux observations astronomiques est de 1484. C’est Waltherus de Nuremberg qui la fit.

Vers 1560, le landgrave de Hesse-Cassel et Tycho-Brahé avaient des horloges. Celles de Tycho marquaient les minutes et les secondes. Une d’elles n’avait que trois roues. Le diamètre de la plus grande de ces roues était de 1 mètre. Son contour portait 1 200 dents. Il est facile de comprendre comment un poids attaché à une corde qui s’enroule sur un cylindre mobile autour de son axe (fig. 19), peut faire tourner une roue dentée. Qu’on suppose que cette roue engrène avec diverses roues attachées à des aiguilles animées de diverses vitesses (fig. 20) on reconnaîtra sans peine que les mouvements de ces aiguilles pourront être combinés de manière à mesurer le temps et à indiquer les heures, les minutes et les secondes sur des cadrans.

Fig. 19. — Poids moteur des horloges, vu de face et de profil.
Fig. 20. — Horloge à poids, vu de profil et de face.

Après avoir indiqué, dans ses Questions de mécanique, comment deux cercles contigus dont l’un entraîne l’autre se meuvent en sens contraires, Aristote parle, nous l’avons vu plus haut, des petites roues que l’on consacre dans les temples et qui sont d’airain et de fer.

Aristote ajoute : « En supposant que les cercles soient aussi nombreux qu’on voudra, ils se comportent tous


de même, bien qu’il n’y en ait qu’un seul qui se meuve. C’est en remarquant cette propriété naturelle du cercle, que les ouvriers font une mécanique où ils ont soin de cacher le principe même, afin que l’effet du mécanisme soit seul à paraître et que la cause en reste inconnue. » (Traduction de M. Barthélemy Saint-Hilaire.)

Que pouvait être le principe, si ce n’est un ressort ?

Dans la description donnée par Claudien d’une machine uranographique d’Archimède, le moteur est désigné sous le nom d’esprit renfermé. Ce nom pouvait-il signifier autre chose qu’un ressort ? (Traité d’horlogerie, par Derham, p. 160.)

On ne sait pas le nom du savant ou de l’artiste qui imagina de donner pour moteur aux petites pendules et aux montres portatives, un ressort plié en spirale et enfermé dans un tambour ou barillet (fig. 21).

Fig. 21. — Ressort moteur des horloges enfermé dans le barillet A muni d’une roue dentée. — B, axe à tête carrée D pour remonter le ressort détendu. — c, couvercle du barillet, découvert dans la figure pour laisser voir le ressort.

Cette belle invention paraît avoir été faite à la fin du XVe siècle ou au commencement du XVIe. Derham dit avoir vu une montre qui avait appartenu à Henri VIII d’Angleterre, né en 1491, mort en 1547.

Dès l’origine, le ressort spiral, moteur des horloges portatives, était, comme aujourd’hui, attaché par son extrémité extérieure au tambour tournant, et par son autre extrémité à l’arbre immobile formant l’axe de ce même tambour. Les montres qui existent encore, du temps des rois de France Charles IX et Henri III, présentent toutes cette disposition.

Le ressort moteur perd de sa force à mesure qu’il se détend. Une montre ainsi construite, malgré l’action du balancier dont nous parlerons plus loin, doit aller vite quand elle vient d’être remontée, et retarder ensuite graduellement.

Pour remédier à ce défaut, on imagina la fusée (fig. 22), une des plus belles inventions de l’esprit humain.

Fig. 22. — Barillet relié à la fusée.

L’inventeur de la fusée n’est pas connu.

Quand on veut bien comprendre l’effet de ce mécanisme, il faut remarquer que, dans les montres sans fusée, la base du barillet est dentée (fig. 21) et qu’elle engrène immédiatement avec un des rouages de la montre. Lorsqu’on a recours à la fusée, la base du barillet n’est plus dentée. Cette pièce communique alors avec la fusée par l’intermédiaire d’une corde à boyau ou d’une chaîne articulée qui, au moment où la montre vient d’être montée, se trouve enroulée, presque tout entière, dans la rainure en forme d’hélice tracée sur la surface extérieure et conique de la fusée. Le ressort ayant alors sa plus grande tension enroule la chaîne sur la surface cylindrique du barillet (fig. 22), et entraîne la fusée par sa plus petite circonférence. À mesure que le ressort est moins tendu, il agit sur la fusée à l’extrémité d’un plus grand bras de levier, de manière qu’il y a compensation. Puisque la fusée est dentée à sa base, puisqu’elle engrène directement avec le rouage, puisqu’elle le conduit, si sa tendance à tourner reste constante, l’ensemble du rouage tourne uniformément.