Astronomie populaire (Arago)/XVII/22

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GIDE et J. BAUDRY (Tome 2p. 385-388).

CHAPITRE XXII

nébulosité des comètes


La nébulosité des comètes paraît ordinairement circulaire. J’ai dit ordinairement, car il arrive quelquefois que le bord est parfaitement terminé. Tel fut le cas, suivant Cassini, pour les comètes de 1665 (n° 44 du catalogue) et de 1682 (5e apparition de la comète de Halley) qui, toutes les deux, parurent rondes et aussi bien tranchées extérieurement que Jupiter.

L’intensité de la lumière de la nébulosité va, en général, en augmentant depuis le bord assez mal défini jusqu’au centre.

En dehors du contour circulaire qui définit la nébulosité principale, on aperçoit quelquefois un, deux, et même jusqu’à trois anneaux lumineux fort larges séparés les uns des autres par des intervalles comparativement obscurs, ou dans lesquels la lumière est à peine sensible. Il est aisé de concevoir que ce qui paraît un anneau circulaire en projection, doit, en réalité, être une enveloppe sphérique. On aura une idée assez nette de cette composition compliquée du corps cométaire, en imaginant dans notre atmosphère, et à trois hauteurs différentes, trois couches continues de nuages qui feraient le tour entier du globe. Il faudrait seulement, pour rendre la comparaison tout à fait exacte, supposer ces trois couches diaphanes, et leur conserver néanmoins les propriétés optiques spéciales qui les distinguent aujourd’hui, de l’air pur interposé entre elles, c’est-à-dire une grande puissance réfléchissante.

Pour les comètes de 1799 et de 1807 (nos 114 et 120 du catalogue), les épaisseurs des enveloppes lumineuses étaient respectivement de 8 000 et de 12 000 lieues.

Les nébulosités les plus remarquables des diverses comètes avaient pour diamètres :

Cinquième comète de 1847 (n° 183) 
 7 200
lieues.
Première comète de 1847 (n° 179) 
 10 200
Deuxième comète de 1849 (n° 187) 
 20 400
Comète de Brorsen, de 1846 (n° 173) 
 52 000
lieues.
Comète de Lexell (n° 85) 
 81 600
Première comète de 1846 (n° 172) 
 97 200
Comète d’Encke en 1828 
 106 000
Première comète de 1780 (n° 91) 
 107 600
Comète de Halley (apparition de 1835) 
 142 800
Grande comète de 1811 (n° 124) 
 450 000

Quand la comète a une queue, et une queue unique, l’anneau ne paraît fermé que d’un côté du Soleil. Il ne se compose généralement que du demi-cercle. Les deux extrémités de ce demi-cercle sont les points de départ des rayons dont les prolongements dessinent les limites lumineuses de la queue. La comète de 1819 (fig. 197) donne une idée de cette constitution.

Après avoir établi par des observations nombreuses que le noyau proprement dit est en général diaphane, il serait superflu de prouver que le centre de la nébulosité jouit aussi de cette propriété. Les comètes sans noyaux sont les plus nombreuses. Herschel terminait ses observations d’une comète qui était visible en 1807, par cette remarque : « Sur les 16 comètes télescopiques que j’ai examinées, 14 n’offraient rien de remarquable à leur centre. »

Beaucoup de comètes, ainsi que nous venons de le dire, se sont montrées sans noyau apparent ; mais on n’en a jamais aperçu depuis qu’on les observe attentivement avec des télescopes qui ne présentassent pas cette espèce de nébulosité, ce brouillard, que les anciens appelaient la chevelure.

Bessel a prouvé, par une observation très-délicate, que la nébulosité de la comète de Halley ne faisait éprouver à la lumière qui la traversait aucune réfraction appréciable. Ce résultat se fonde sur la distance angulaire de deux petites étoiles, mesurée avec le bel héliomètre de Kœnigsberg. Cette distance était la même lorsque les étoiles étaient toutes deux en dehors de la nébulosité, et quand l’une d’elles seulement parut correspondre aux diverses parties de cette même nébulosité et à différentes distances du noyau. Les moyens mis en usage par le célèbre astronome eussent fait aisément reconnaître une déviation de 1/4 de seconde.

La nébulosité de la comète de Halley, dans son apparition de 1835, ne semblait pas terminée régulièrement dans la partie qui avoisinait le Soleil ; elle présentait dans cette direction une anfractuosité sensible. Le même phénomène est indiqué dans les observations de M. Schwabe, de la manière suivante : « La nébulosité, généralement circulaire, a toujours offert une dépression, un enfoncement très-sensible vers sa partie la plus voisine du Soleil. »