Astronomie populaire (Arago)/XXVII/18

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GIDE et J. BAUDRY (Tome 4p. 381-383).

CHAPITRE XVIII

passage des satellites sur le disque de jupiter


L’observation des satellites lumineux sur le corps même de Jupiter a été faite la première fois par Dominique Cassini[1], puis ensuite par Maraldi. Celui-ci faisait, dans les Mémoires de l’Académie des sciences pour 1707, la remarque que le satellite, très-visible près du bord oriental et près du bord occidental, comme une tache lumineuse, disparaissait près du centre, sa lumière se confondant alors avec celle de la planète. Cette observation, quoique Maraldi ne le remarque pas, est une véritable mesure photométrique. Le satellite se voit près du bord de Jupiter parce que la lumière y est faible et que là son éclat prédomine sur celui de la planète. Il disparaît au centre parce que sa nuance et son éclat sont alors les mêmes que ceux de la portion de la planète qu’ils nous cachent, les mêmes que la nuance et l’intensité des parties lumineuses dont il est entouré.

Pound fit des observations analogues en 1719, comme on peut le voir dans les Transactions philosophiques. Voici comment s’exprime l’astronome anglais : « J’ai vu plusieurs fois le premier et le second satellite apparaître non comme d’obscures taches, mais comme des points brillants, tant soit peu plus vifs que Jupiter, peu après leur entrée sur le disque de la planète, mais ils s’effaçaient en approchant du milieu. »

Un Mémoire de Messier, qui parut d’abord dans les Transactions philosophiques de 1767, puis dans la Connaissance des temps de l’an xv, renferme les deux observations que je vais rapporter.

Le 19 août 1760, le premier satellite qui se projetait sur la planète était d’autant plus visible, qu’il s’approchait davantage du bord.

Le 22 août 1760, le deuxième satellite ne devint visible qu’alors seulement qu’il fut éloigné du bord de la planète d’un huitième de son diamètre.

La lunette prismatique fournit un moyen de répéter cette observation avec des circonstances différentes et dépendantes de ce fait qu’alors c’est une image qui se projette sur la planète et non pas un écran matériel empêchant la lumière devant laquelle il se place, d’arriver à l’œil. À l’aide de cette lunette, on peut projeter tout satellite appartenant à l’image extraordinaire, par exemple, sur un point quelconque du disque de la planète provenant de l’image ordinaire.

J’ai trouvé, dans nos registres, des observations de ce genre et je n’y ai pas vu sans surprise que le satellite, très-visible vers le bord, disparaissait vers le centre, c’est-à-dire dans un point où sa lumière, ajoutée à celle de la planète, devait former une somme double de la lumière environnante. Je ne donne pas cette observation pour parfaitement exacte, mais elle mérite certainement d’être répétée. J’ose prédire que si on la fait avec de la lumière préalablement polarisée, ce qui produira les moyens de faire varier une des images par tous les degrés possibles, elle conduira à des résultats intéressants.

  1. Hérigone avait proposé en 1644 de substituer, pour la détermination des longitudes aux éclipses des satellites, leurs passages par le centre du disque de Jupiter. Cassini objectait (tome VIII des Mémoires de l’Académie) que l’observation proposée par Hérigone n’était pas exécutable, attendu, disait-il, que les satellites ne se voyaient pas lorsqu’ils se projetaient sur le centre de la planète.