Atlas universel d’histoire et géographie/Ancien Latium

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CARTE N° 13.

L'ANCIEN LATIUM. — LATIUM VETUS.

Sources et Documents : Dépouillement des textes ancien», les itinéraires, les travaux modernes de topographie de Gell, Westphal, Bormann, Nibby, Canina et surtout ceux de Pietro Rosa ; les recueils d'épigraphie et d'archéologie. Recherches et travaux personnels.

La campagne de Rome, en partie déserte aujourd'hui, est le pays du monde qui a vu les plus grandes choses et qui est, de beaucoup, le plus riche en souvenirs. C'est ce qui nous a décidés à en donner la topographie détaillée dans une carte spéciale.

Il faut distinguer : 1° le Grand Latium, qui comprenait, outre le pays des Latins, ceux des Èques, des Berniques, des Rutules et des Volsques, ce dernier embrassant les contrées occupées par les Ausones, les Auronces, les Opiques, etc. — 2° le Petit Latium ou Latium proprement dit, désigné par les géographes sous le nom de Latium Vetustissimum, qui se composait presque exclusivement


du pays des Latins, du sud de la Sabine, des terres voisines de Rome en Ëtrurie, sur la rive droite du Tibre, du petit territoire des Rutules et des pays limitrophes des Èques et des Volsques. C'est à peu près le pays auquel on donna le nom d'Ager romanus, et qui fut, pendant les siècles mémorables qui suivirent la fondation de la Ville, le champ de bataille où Rome se prépara à la conquête du monde.

On remarquera d'ailleurs que nous n'avons point tracé de limites sur notre carte. C'est une erreur des géographes de vouloir enfermer dans des frontières imaginaires les peuples de l'ancienne Italie. Rien de plus variable que l'extension et la réduction de leurs territoires. La seule division certaine, fixe et durable était la cité ; aussi bien chaque cité formait-elle un État à part, avec ses magistrats, ses institutions et ses terres ; mais le lien qui unissait ensemble les cités n'avait rien d'administratif ; c'était : 1° une ligue politique d'un caractère transitoire suivant les besoins ou les dangers du moment ; 2° une ligue religieuse avec des sacrifices annuels, commémoratifs d'antiques alliances, et signes d'une commune origine ethnographique. Dire précisément où s'arrêtait le territoire latin, où commençait celui des Volsques, des Eques et des Herniques est chose impossible. Les premières grandes divisions qui apparaissent dans la géographie historique de l'Italie sont celles des régions d'Auguste ; encore ne répondent-elles nullement à un système administratif, mais sont-elles de simples répartitions de territoire représentant en gros les anciens groupes des nations vaincues et assimilées aux vainqueurs. La cité, au contraire, a été, de tous temps, et est demeurée après la conquête la division politique, invariable et complète du territoire romain, comme elle avait été la seule division politique de l'ancien Latium où Rome trouva autour de son berceau le germe des institutions qu'elle a développées dans son sein et appliquées au monde soumis. Les provinces elles-mêmes ne furent d'abord, à proprement parler, que des départements, ou, mieux encore, des commandements militaires mobiles, avec des frontières changeantes, une administration irrégulière et qui ne commencèrent à trouver leur assiette que sous l'Empire.

Géographie physique. — Orographie et géologie. — La constitution géologique du Latium est étroitement unie à son orographie. Le sol est volcanique, sauf quelques portions de terrain jurassique crétacé dans les montagnes de Sabine et dans les deux ramifications de l'Apennin qui s'avancent jusqu'à Palestrine et jusqu'à Montefortino, et quelques rares portions de terrain subapennin tertiaire. Il est à peine besoin d'ajouter que les rives du Tibre et la côte d'Ostie, aussi bien que les marais Pontins, sont couverts d'un sol d'alluvion fluviale. La ligne volcanique de l'Italie prend naissance au N. de Viterbe, se prolonge jusqu'à Rome, puis jusqu'en Sicile, en passant par le golfe de Naples. Elle a formé des éruptions qui ont laissé pour témoignages des cratères isolés ou réunis, terrestres ou marins. Les cratères des volcans latins appartiennent tous au système du mont Albain, Albanus mons, qui offre, sur une échelle trois fois plus grande, une répétition du Vésuve. Cet immense volcan était formé du mont Albanus ou Cabensis proprement dit, les Tusculani Colles, au N., l'Algidus mons à l'O. Ils présentent comme cratère centrale, la vaste coupe connue sous le nom de Campi di Annibale, puis une foule de cratères parasites dont la plupart sont ou ont été remplis par des lacs. Le cratère du Lacus Albanus, du Lacus Nemorensis (Lago di Nemi), du Lacus Aricinus (desséché), du Lacus Luturnas (desséché), le Pantano secco, le Laghetto, et, dans la campagne, les lacs Gabiensis et Regillensis (desséchés). Rome est construite sur le tuf et la pouzzolane dont elle s'est fait de tous temps un article considérable de commerce. — Il faut citer, en Sabine, le Catillus, Peschiavatori ; le Lucretilis, Mte Gennaro, chanté par Horace, l'Æflianus, au S. de Tivoli, et, à 3 milles de Rome, sur la rive droite de l'Anio, le mont Sacer où les plébéiens se retirèrent l'an 493 ; — Les Corniculi montes (Mte Gentile).

Hydrographie. — Le Tiberis, très-anciennement appelé Albula, aujourd'hui Tevere, est un des fleuves les plus remarquables de l'Europe pour son économie, l'étiage étant toujours assez élevé et les inondations très-rares : ce qui s'explique par la nature spongieuse du bassin qui absorbe promptement les eaux de pluie et ne les rend que lentement à la terre


sous forme d'une foule de ruisseaux. Le Tibre est très-limoneux, produit des atterrissements considérables à son embouchure et couvre la côte de ses alluvions jusqu'à Antium. Les anciens avaient mis à profit les qualités exceptionnelles du Tibre et avaient corrigé ses inconvénients par l'entretien du lit et de l'estuaire artificiel de leurs ports, qui établissait une communication libre entre la mer et le fleuve au-dessus de sa barre. « Le Tibre lui-même a ses ruines, » dit Bonstetten ; le lit primitif et abandonné du fleuve, dit fiume morto, fleuve mort, nous montre, à 4 milles de la mer, la position du port d'Ostia, construit sous Ancus Martius « sur la mer. » Là était le rivage à cette époque.

L'Ile Sacrée s'est donc entièrement formée depuis lors. Le port de Claude et celui de Trajan nous montrent, à droite, et bien à l'O. de Fiumicino, où est l'embouchure actuelle, l'emplacement du rivage au Ier siècle de l'Empire.

Affluents du Tibre : à droite, la Cremera, célèbre par le rocher dont il baigne le pied et qui fut défendu par les 300 Fabius ; à gauche, l'Allia (victoire des Gaulois sur les Romains, 390), dont la position est déterminée par Tite-live, qui le place à 11 milles de Rome, et par Aurelius Victor, qui le place à 14 milles au ruisseau de Marcigliana-Vecchia, dont la source est à 14 milles, et l'embouchure, à 11 milles de l'enceinte de Servais Tullius ; — l'Anio (Teverone), qui forme les Tres Lacus de la villa de Néron à Sublaqueum, Subiaco ; les cascades de Tibur (Tivoli), et reçoit lui-même, à droite, la Digentia, Licenza, qui arrosait la campagne d'Horace à Ustica, l'écoulement du lac sulfureux des Aquæ Albulæ, aujourd'hui Lago delle Isole Natanti, qu'il ne faut pas confondre, comme l'a fait Servius, avec l'Albunea du Latium, l'Ulmanus, et probablement le Tutia sur les bords duquel campa Hannibal ; à gauche, le petit ruisseau Peneus qui arrosait la villa d'Hadrien, plusieurs ruisseaux sans nom dont l'un a servi d'écoulement aux lacs Gabiensis et Regillus. Le Tibre reçoit encore à gauche, l'Almo, Acquataccia, au S. de Rome ; le Spino et le Nodinus, et un affluent qui prend sa source au pied de Tusculum, dans le massif de l'Albanus mons, et qui devait son origine à la fameuse source Ferentina, dans le Nemus Ferentinum, où s'assemblaient les députés des villes latines pour délibérer et d'où ils partaient pour gravir l'Albanus mons (nommé dans une inscription, remarquée par M. Mommsen, Cabensis, d'où est venu le nom moderne Mte Cavo) et se rendre au temple de Jupiter Latialis. — Dans la mer, se jetait le ruisseau célèbre du Numicius, Rio di Pratica, où mourut Ënée.

Lacs et sources. — Près de l'embouchure du Tibre, à gauche, était le Lacus Ostiensis, formé des eaux du fleuve et de celles de la mer et qui n'a pas existé dans les plus anciens temps, lorsque les atterrissements du Tibre n'avaient pas rompu toute communication de la plaine de Laurentum avec la mer. Ces eaux dormantes sont une des causes de la malaria qui rend ce beau pays désert aujourd'hui. Le lac d'Ostia existait certainement au temps de Virgile qui le mentionne dans l'Énéide, mais les écoulements ménagés du côté des salines empêchaient l'insalubrité. — Près de la source du Numicius, est le Lacus Juturnæ ou Turni Lacus, puis la Fons Annæ Perennæ, ou d'Anna, sœur de Bidon (Ovide), qui avait une autre fontaine près de Rome (dans les jardins Borghèse), où le peuple allait la fêter. La Fons Egeriæ était dans Rome et non dans la Caffarella au S. de la Ville où l'erreur populaire la place encore aujourd'hui. Il y en avait une autre sur les bords du Lacus Nemorensis.

Forêts : En Sabine, la Sylva Malitiosa, célèbre dans la guerre du Sannium ; — le Lucus Robiginis, bois consacré à la rouille du blé (Ovide), à la 8e borne de la voie Nomentane ; — la Sylva Arsia, où Brutus, le 1er consul de Rome, fut tué, dans la guerre contre les Étrusques ; — la Sylva Laurentina, forêt de Laurentum, immortalisée par les poëtes ainsi que Lucus Jovis Indigetis, près de Lavinium.

Ethnographie et histoire. Les premiers habitants de cette contrée furent, selon toute apparence, les Sicules, qui furent ensuite chassés, par les Pelages, du sol qu'ils occupaient vers l'endroit où s'étendit plus tard la cité de Tibur, Tivoli. Denys remarque même que, de son temps, un quartier de cette cité avait encore retenu le nom de Siculium, peut-être la moderne Siciliano. Les Pelages, — dénomination vague sous laquelle on confond tous les peuples qui ont laissé sur le sol les vestiges d'une civilisation dans l'enfance, caractérisée par des monuments cyclopéens, — ont dû occuper plutôt les montagnes que les plaines. Les monuments les plus anciens de la campagne romaine accusent déjà un art plus avancé que ceux de l'Apennin et appartiennent certainement au 2e âge des sociétés italiotes. Il est certain néanmoins que les dernières éruptions du mont Albain ont recouvert des habitations, et les découvertes faites au commencement de ce siècle, à Albano et, plus récemment, dans la tranchée du chemin de fer de Rome à Naples, ont mis au jour, dans le sol, dégagés des couches volcaniques qui les recouvraient, des objets annonçant un art plus perfectionné. Aux âges historiques, nous trouvons, dans le Latium, le peuple qui lui a donné son nom, et que Tite-Live appelle aussi les Aborigènes. Les Latins étaient certainement d'origine indo-européenne, et leur langue, comme celle des Èques, des Herniques, des Volsques, constituait un dialecte du grand idiome des Osques, langue intermédiaire entre le sanscrit et le latin. Quant aux Sabins, qui se sont avancés du N. au S. jusqu'au confluent du Tibre et de l'Anio, ils avaient la même origine, mais ils appartenaient à la branche sabellienne, peuples montagnards, plus rudes, plus belliqueux que ceux de la plaine et du rivage. Les Étrusques, qui n'ont franchi le Tibre que rarement, appartiennent indubitablement, quoi qu'on ait pu dire, à la même race indo-européenne. Si leur langue, encore mal connue, diffère essentiellement du Latin, elle ne semble pas pouvoir être rattachée avec certitude aux idiomes sémitiques ; et quand même on parviendrait à établir son analogie avec le phénicien et l'hébreu, la question originelle du peuple qui la parlait reste intacte. Les colonies ont pu venir par mer, y apporter leur civilisation et faire l'office d'institutrices des peuples ; mais la masse même des nations n'a pu se transporter que par terre, et cette nécessité exclut toute idée d'origine sémitique en ce qui regarde les Étrusques. Leur civiiisation et leurs arts ne rappellent que l'Inde, la vallée de l'Euphrate, l'Asie Mineure, et aux âges plus rapprochés de la fondation de Rome, la Grèce greffée sur l'Orient.

Latins, Sabins, Etrusques, tels sont les trois éléments qui se touchent en un point, Rome, pour s'y confondre dans une mesure à peu près égale, et produire, par leur contact et leur mélange, la nation romaine. La tradition fait du fondateur de Rome un Latin, du second roi, un Sabin ; et il est démontré que les trois derniers rois sont venus d'Etrurie. Les Etrusques ont pénétré dans le Latium avant l'époque républicaine. Les anciens noms géographiques Tusculum et Cœlius sont Etrusques.

Mais Rome est avant tout ville Latine, comme l'a montré Mommsen. Elle est latine par ses institutions, comme par sa première origine ; elle l'est par sa religion, sa langue, et elle faisait partie de l'ancienne ligue du mons Albanus et de la source Férentine. Ayant détruit Albe, elle prit même sa place et devint capitale du Latium. Les premières guerres de la République sont la lutte de Rome contre des cités jalouses et presque rebelles.

L'étendue du Latium vetustissimum ne peut être déterminée approximativement que par le nombre


et l'emolacement des villes de la ligue Latine, « populi in monte Albano carnem accipere soliti, » mais, comme elles avaient presque toutes disparu sans laisser de vestiges « sine vestigiis, » au temps de Pline, il serait bien difficile de les retrouver aujourd'hui.

Ces peuples, ou cités étaient au nombre de 53.

N. B. Ceux dont les noms sont en italiques ont urne position reconnue et figurent sur la carte :

Satricum, Pometia, Scaptia, Pitulum, Politorium, Tellene, Tifata, Cænina sur les bords de l'Anio et peu éloignés d'Antemnæ, Ficana, Crustumerium, Ameriola (?) Medullia, Corniculum, Saturnia (à l'endroit où fut plus tard Rome), Antipolis (sur le Janicule), Antemnæ, Camerium (?), Collatia, Amitinum, Norbe, Sulmo ; Alba, Æsula, Acia, Abola, Bubeta (peut-être Bovillæ), Bola, Cusveta, Corioli, Fidenæ, Foretum, Horta, Latinium ou Lavinium, Longula, Manas, Macrala, Mutucuma, Munia, Numinia, Ollicula, Octula, Pedum, Pollusca, Querquetulum, Sicania, Sisola, Tolerium, Tutia, Vimitellara, Velia, Venetula, Vitellia.

En prenant seulement les positions connues, on voit que le Latiumn était pas limité par l'Anio et que la Sabine ne s'avançait pas autant vers le sud qu'on le croit communément puisque plusieurs cités de la ligue latine étaient au N. de cette rivière.

L'Ager romanus fut la'première terre conquise dans la circonférence qui entoure Rome. Les routes formèrent les limites des plus anciennes tribus rustiques qui rayonnèrent ainsi de manière à former chacune un angle ayant son sommet à la porte de la Ville et s'élargissant au fur et à mesure des conquêtes. (Voy., sur la carte, la position des tribus Pupinia, Papiria, Lemonia, Mæcia, Scaptia, Crustumina, les seules dont la position, voisine de Rome, puisse être déterminée avec certitude.

Description topographique[1]. 1° En Etrurie, au N.-O. du Tibre : Veii, à l'Isola Farnese, ruines ; — Lorium, à 12 m. de Rome, à dr. de la via Aurélia, campagne de Marc Aurèle ; Fregenæ, s. la via Aurélia. — Pons Milvius, à 1 m. de Rome, les routes Cassia-Claudia et Flaminia en partent (auj. Ponte Molle) ; Prata Quinctia, célèbres par la charrue de Cincinnatus, au pied du monte Mario.

Entre le Tibre et l'Anio : Fidenæ, sur la voie Salaria, près de la rive dr. du Tibre, avec sa citadelle, au Castel Giubileo, à 5 m. de Rome, célèbre dans les premières guerres de Rome ; — plus près de l'Anio, est la villa Phaontis, où mourut Néron en 68.

Crustumerium (Marcigliana Vecchia), avec le Lucus Martis, connue dans les premières guerres de Rome, Eretum, sur le Mte Rotondo, et dans la plaine, comme beaucoup d'anciennes villes, qui, à l'époque de la paix, descendirent, de leurs escarpements et vinrent se poser près des routes. — Nomentum, la Mentana ; Aquæ Labanæ (Strabon), dont on reconnaît encore la piscine ; Ameriola, Medullia et Cameria, positions douteuses, peut-être aux trois sommets isolés du sud de la Sabine : Monticelli, San Angelo, Cesi, à peu de distance, à l'O. du Lucretilis ; — Corniculum, au Mte Gentile ; — Ficulea, un peu au S.-E. de la précédente. — Aux environs de Tibur, Tivoli, municipe très-ancien et très-important, se groupaient les villas célèbres, de Mécène, qui n'était pas, comme on le croit communément, aux cascatelles, dans la ville même, vers l'usine actuelle, mais à quelque distance de là : remplacement qu'on lui a donné est celui du célèbre temple d'Hercule ; la villa de Catulle, en face de la grande cascade ; la villa de Munatius Plancus, le fondateur de Lyon, à quelque distance au nord ; la villa de Quintilius Varus, qui perdit les légions d'Auguste en Germanie, à Sa Maria-sopra-Quintiliolo, en face des cascatelles ; la villa de Vopiscus, décrite par Stace, près de la grande cascade ; les villas des Pisons, de Cassius, de Brutus, au sud de Tibur et sur les flancs de l'Æfflianus (Mte Affliano), au pied duquel sont les immenses débris de la villa d'Hadrien, dans le domaine du prince Braschi. Il faut encore citer les villas de Popilius, de Ruber, des Cæsonii, et le domaine des Plautii. Dans la Vie d'Horace, attribuée à Suétone, il est parlé d'un petit domaine du poëte à Tibur ; on ne sait sur quel fondement on le place à la petite chapelle S. Antonio, en face des cascatelles, dans un endroit inhospitalier où croissent difficilement l'olivier et même l'aloès. C'est à 12 milles environ de Tibur, qu'était la vraie campagne d'Horace, à Ustica, retrouvée à Rustica par M. Pietro Rosa, près des sources de la Licenza, l'ancienne Digentia, à quelque distance au N., de Rocca Giovine, où était le Fanum Vacunæ. Quant au vicus de Mandela, il était près de l'Anio, à Bardella, non loin de Varia, Vicovaro. En continuant de remonter l'Anio, on arrive à la villa de Néron, à Sublaqueum (Subiaço) ; plus près de Tibur, dans les montagnes des Èques, on reconnaît encore des ruines qui marquent sans doute l'emplacement de Sassula et d'Empulum ; la station des Aquæ Albulæ, à 4 m. de Tibur sur la route de Rome, avec les bains d' Agrippa, encore debout, près du Lago delle Isole Natanti.

Entre l'Anio et la via Appia : Antemnæ, au confluent de l'Anio et du Tibre, et avant d'arriver à l'Anio, en partant de Rome, comme le nom l'indique (Ante amnem) ; Collatia, que M. Pietro Rosa a démontré ne pouvoir être à Castelluccio dell'Osa, mais à quelque distance de là, au N. de Gabii, dont les ruines se voient encore près des lacs desséchés de Gabii et de Regillus. Toute cette topographie a été récemment éclaircie et fixée avec certitude par l'habile archéologue ; Querquetula, à l'Osteria di Corcollo ; Scaptia, à Passerano ; Pedum et Bola, positions moins certaines. Près de l'Anio, M. Pietro Rosa a retrouvé les carrières mentionnées par Strabon et Denys et qui ont fourni la pierre de travertin dont Rome a été construite. — Plus près de Rome, sont les villas des Gordiens et le Suburbanum Hadriani. — Dans le massif des Mts Albains : Tusculum, dont les ruines se voient au-dessus de Frascati ; le Tusculanum Ciceronis. que Pietro Rosa porte à Frascati même dans la villa Aldobrandini ; la villa de Lucullus dont la ville de Frascati et les villas fameuses, Torlonia et Picolomini, représenteraient l'emplacement ; — la villa de Porcius Caton à Mte Porzio ; — Labicum, à Mte Compatri ; — la villa de C. Julius César après la station Ad Quintanas ; — Corbio et Tolerium à l'O. de l'Algidus qui donnait son nom au pays, Algidum, si célèbre dans les guerres des premiers temps de la République et où passait la voie Latine qui conduisait, par ce défilé, aux pays des Èques, des Herniques et des Volsques, ce qui en faisait un point stratégique de première importance. — En Algide était le Fanum Fortunæ. — Sur le sommet de l'Albanus, le temple de Jupiter Latial, qui réunissait pour des sacrifices communs, tous les peuples de la ligue latine ; — la douteuse position de Fabia doit être cherchée sur les flancs de la montagne ; Alba Longa est reconnue sur les bords du cratère du lac Albain, entre le temple de Jupiter et le lac. Le couvent de Palazzola montre encore l'inscription consulaire déposée sur la route du cortège sacré qui, de la source Férentine (près de Marino), se rendait au temple. — Autour de la moderne Marino, se groupent les emplacements des villas de Marius, de Murena, de Sylla ; puis Roboraria et Castrimœnium doivent être cherchées dans les environs. — Sur les flancs opposés du cratère, au sud, se voient encore les ruines de la villa de Domitien (à Castel Gandolfo et aux villas Barberini et Torlonia),


construite, en partie, sur l'emplacement d'une des villas de Clodius, qui en possédait une autre sur les flancs de l'Albanus, entre Aricia et le temple de Jupiter, à 16 ou 17 m. de Rome (supposition rendue nécessaire par le texte de la milonienne). C'est la villa inférieure, celle qui était voisine du 13e m. de la voie Appienne, qui renfermait les hommes placés en embuscade, et c'est en face de cette seconde villa qu'il fut tué, près de l'autel de la Bonne-Déesse, non loin de la ville de Bovillæ, qui est au 12e m. de la voie Appienne. La ville moderne d'Albano occupe l'emplacement du camp prétorien des empereurs. On en voit encore les étages divers et la disposition générale. — La villa de Pompée était à l'entrée même de la moderne Albano ; et le monument que l'on remarque, à gauche de la porte, au 15e m., passe pour avoir reçu ses cendres (Plutarque). Aricia avait une citadelle, qui est la Riccia, et s'étendait jusque sur les bords du lac, desséché aujourd'hui, mais dont on voit très-nettement le cratère. — M. Pietro Rosa a retrouvé et restitué le fameux temple de Diana Nemorensis, sur les bords du lac du même nom, aujourd'hui lago di Nemi, en face de Genzano. Il a reconnu également le Clivus Virbii, sentier d'Hippolyte Virbius qui y conduisait et se raccordait avec la via Appia, au 16e m. L'émissaire souterrain du lac Nemorensis et celui du lac Albanus ont été déterminés avec exactitude par le même savant. — Sur les confins du pays des Eques et des Volsques, il faut citer encore Velitræ, Velletri, première ville des Volsques de ce côté, autrefois immense et dont l'étendue est encore facile à reconnaître ; dans la montagne : Cora, Cori, Norba avec ses murs cyclopéens, l'arx Carventana, Artena Volscorum, Vitellia, dans la plaine, et, sur la limite du pays des Èques : Præneste, Palestrine, avec sa citadelle, où Marius le Jeune se fit donner la mort, après la bataille de Sacriportus. La ville moderne de Palestrine occupe en partie l'emplacement de l'immense temple de la Fortune.

Entre la via Appia, la mer et le Tibre, rive gauche, s'étend aujourd'hui un désert couvert de ruines et rempli des plus illustres souvenirs ; sur la via Appia sont, au 2e m., les catacombes historiques de S. Caliste, découvertes par M. de Rossi, en 1854, avec les tombeaux des papes de l'Église primitive, la basilique S. Sébastien, le cirque de Maxence, le seul au monde qui soit assez bien conservé pour faire comprendre les courses de char. Le Nymphæum de la nymphe Lara (Ovide), fille de l'Almo, pris, à tort, pour la fontaine Égérie. Le tombeau de Cæcilia Metella, femme de Crassus, les fossæ Cluiliæ, où combattirent les Romains et les Albains ; au 5e m., le Campus sacer Horatiorum avec les tombeaux des Horace, encore subsistant, la villa des Quintilii, usurpée par Commode ; à droite de la voie, en partant de Rome, on voit, sur des éminences, des ruines de villes latines, Appiola, Mugilla, Tellene, dont les positions respectives ne sont pas faciles à déterminer ; la villa des Sulpicii, à la 3e borne de la voie Ardéatine ; la catacombe de Domitilla du 1er siècle de J.-C, explorée par M. de Rossi ; le vicus Alexandrinus, près de S. Paul-hors-les-murs ; Politorium, dont l'emplacement est douteux ; ainsi que celui de Ficana et de Canens ; à 18 ou 20 m. de Rome, Corioli, qui appartient déjà au pays Volsque et Lanuvium, Citta di Lavigna. En nous rapprochant de la mer et de l'embouchure du Tibre nous entrons sur le théâtre des sept derniers livres de l'Énéide.

Topographie de Virgile.

(Énéide, les 7 dern. livres.)

Pour comprendre la topographie de Virgile, il faut rétablir, par la pensée, le rivage, — si complètement changé aujourd'hui par suite des atterrissements considérables du Tibre, tel qu'il était, — non pas au temps d'Énée, car Virgile n'était pas géologue, mais au temps de Virgile, car il a décrit très-exactement le pays tel qu'il le voyait. Or l'emplacement que nous avons donné à Ostia sur la rive gauche du fleuve, d'après les ruines qui en subsistent aujourd'hui, marque le point où s'arrêtait la terre et où commençait la mer au temps du poëte. Le Lacus Ostiensis existait. Troja fut établie près du lieu de débarquement, entre le fleuve et le lac. Le camp troyen faisait face à la mer, et l'espace entre le lac et la mer était très-étroit. La Sylva Laurentina était derrière le lac, et la ville de Laurentum est déterminée au S.-E. par la route Laurentina, encore visible aujourd'hui. — Lavinium est certainement aux masures de Pratica ; le rio di Pratica est le Numicius ; les macchie ou petits bois de la rive droite, rappellent le Lucus consacré à Jupiter Indiges. La chapelle de S. Anna Petronilla, près d'une petite source, rappelle le temple et la source de la nymphe Anna Perenna, d'Ovide ; l'Anna soror de Virgile. Lavinium, s'appela sous l'Empire Lauro-Lavinium. La Fontaine de Juturna ou le Lac de Turnus est vers la source du rio di Pratica. L'Albunea de Virgile et l'oracle de Faune sont très-reconnaissables à la Solforata d'Altieri ; la description de Virgile est littéralement exacte. Le bois de Picus n'a pas changé de nom et s'appelle aujourd'hui Macchie di Pichi. Près de là, au S.-E., est le pays des Rutules, avec sa capitale, Ardea, Ardia, le Lucus Pilumni, le Castrum Inui et les eaux sulfureuses d'Ardée.

Il faut citer, dans le Latium maritime, comme appartenant à une autre époque, le remarquable système des ports qui furent substitués, sur la rive droite, à l'ancienne Ostia de la période royale et républicaine. Lorsque le fleuve se partagea en deux bras et que l'Insula Sacra fut formée par suite des atterrissements, Claude fit creuser un port, encore parfaitement visible, et Trajan l'agrandit. — Ce port, qui avait son accès sur la mer à quelque distance de l'embouchure du Tibre, communiquait, d'autre part, avec le fleuve au-dessus de sa barre. Par cette disposition le problème était résolu et la navigation dégagée des entraves de la barre, toujours si graves dans les fleuves des mers intérieures. Les Salinæ furent établies et existent encore aujourd'hui entre le lac d'Ostie et le fleuve.


Nous citerons enfin sur le bord de la mer, la villa de Pline le Jeune que l'on peut restituer d'après sa description et celle d'Hortensius ; — chez les Rutules. le temple de Vénus ; — et, chez les Volsques, Antium, Nettuno, avec la villa de Néron.

Aqueducs anciens.

Rome est aujourd'hui la première ville du monde par l'abondance, la limpidité et la fraîcheur de ses eaux. Elle n'en a que la 10e partie environ de ce que la Rome ancienne des Césars en possédait. Nous avons un rapport officiel adressé par Frontin, curator aquarum, surintendant des aqueducs, à Trajan. Ce rapport mentionne 13 aqueducs ; la Notitia en mentionne 17 ; Aurelius Victor, 20. Au temps de Procope, au vie siècle, il y avait encore 14 aqueducs sous les arcades desquels pouvait passer un homme à cheval. Voici le tableau comparatif des aqueducs suivant les trois premiers auteurs.

Frontin. P. Victor. Notitia.
Appia, Appia, Trajana,
Anio Vetus, Marcia, Annia.
Marcia, Virgo, Alsia,
Tepula, Claudia, Claudia,
Julia, Herculanea, Marcia,
Crabra, Tepula, Herculea,
Virgo, Damnata, Julia,
Alsietina, Trajana, Augustea,
ou Augusta, Annia, Appia,
Augusta (de Rome) Alsia, Alsietina,
Augusta (de l'Anio) Cærulea, Setina,
Octaviana, Julia, Ciminia,
Claudia, Algentiana, Aurélia,
Anio Novus. Ceminia, Damnata,
Sabatina, Virgo,
Aurélia, Tepula,
Septimiana, Severiana,
Severiana,
Antoniniana,
Alexandrina.

Les principaux aqueducs sont tracés sur notre carte avec la source d'où ils tiraient leurs eaux ; on pourra se rendre compte de leurs directions et de la distance qu'ils parcouraient.

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PL. 13 LATIUM VETUS

PL. 13 LATIUM VETUS
  1. 1. Nous donnons dans cette description les derniers résultats obtenus par les savants topographes italiens.