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Au Pays de Rennes/Le Lycée

La bibliothèque libre.
Hyacinthe Caillière (p. 71-75).


LE LYCÉE


Au VIIIe siècle, Charlemagne ordonna aux prêtres de son empire, de tenir école dans leurs paroisses.

On ignore la date précise du premier établissement d’instruction publique à Rennes ; mais ce que l’on sait, c’est qu’en 1035, Guérin, évêque de Rennes installa un maître d’école dans sa ville épiscopale. Ce maître s’appelait Incomaris. Pour le rendre indépendant l’évêque en fit un dignitaire de son église, lui assura une pension et lui donna un hôtel à l’entrée de la rue des Dames.

Les successeurs d’Incomaris prirent le nom de maîtres des écoles. Ils étaient chargés d’examiner et de recevoir les maîtres de tout le diocèse.

En 1492, la maison d’école de Rennes était située rue de la Cordonnerie, actuellement rue de la Monnaie. Elle se trouva bientôt insuffisante en raison du nombre croissant des élèves et alors la communauté de ville fit construire à ses frais un nouvel édifice sur le placis de la vieille Monnaie (aujourd’hui place Saint-Pierre), tout à côté de la chapelle Saint-Martin.

À la fin du XVe siècle, l’école de Rennes comprenait deux catégories : les grandes et les petites écoles. Dans les premières, qui étaient un véritable collège, on enseignait la philosophie, la rhétorique et les humanités. Dans les secondes on apprenait à lire, à écrire, et les principes de la grammaire. Deux prêtres dits recteurs, étaient préposés à chacune de ces écoles et les administraient.

La ville de Rennes passa, en 1495, un marché avec ses recteurs à l’occasion du nouvel édifice qu’elle venait de faire construire à ses frais. Ils acceptèrent un règlement, reconnurent le droit de patronage et de fondation du corps municipal, et à partir de ce moment furent rétribués par la ville qui les considéra comme ses agents et ses protégés.

Plus tard, en 1536, les bourgeois de Rennes obtinrent du roi François ier, l’érection en collège de l’ancien hôpital Saint-Thomas, situé près de la Porte-Blanche.

Le nouveau collège fut aménagé, doté et reconstruit aux frais de la communauté de ville qui nomma le principal et les professeurs. En 1593, le collège comprenait cinq classes dont les régents n’étaient admis qu’après examen passé devant le Scholastique de Rennes, grand personnage qui avait la haute censure sur tout le personnel enseignant.

En 1604 la communauté de ville fut autorisée par lettres patentes d’Henri IV à établir un collège de jésuites.

Le 30 Août de la dite année, la compagnie de Jésus prit possession du collège Saint-Thomas et l’acte de fondation fut passé le 18 Octobre 1606. Par cet acte les Jésuites s’engagèrent à entretenir deux cours de philosophie, un cours de cas de conscience et six cours de rhétorique, humanités et grammaire.

L’ancien collège Saint-Thomas et la vieille chapelle de ce nom avaient naturellement fait place à de nouvelles constructions, et l’on s’occupa de l’érection d’une nouvelle église en rapport avec l’importance de l’établissement. La communauté de ville accorda, en 1623, 70,000 livres et le 30 Juillet 1624, la première pierre fut posée solennellement par l’évêque Pierre Cornulier. Achevée en 1651, cette église fut consacrée le 3 Septembre en présence des nobles bourgeois.

Ainsi fut fondé le collège de Rennes, le plus beau et le plus vaste des établissements tenus par les Jésuites. Les élèves y affluèrent en si grand nombre, qu’on en comptait en 1654 deux mille huit cents.

En 1679, Mme Nicolle de la Monneraye, veuve d’Étienne de Loudel, mère d’un Jésuite, donna à la Compagnie sa propriété du Tertre de Joué, composée d’une maison d’habitation avec jardins, terrasses, promenades, bois, futaie, plus les Métairies de Belle-Vue, du Clos-Pilet et de la Touche. Les pères en prirent possession et en firent la maison de campagne de leur collège. Cette propriété vendue en 1769 appartient aujourd’hui aux missionnaires sous le nom de Bellevue.

L’expulsion des jésuites, en 1762, porta au collège de Rennes un coup dont il ne se releva point.

La ville ne pouvant rester sans enseignement supérieur, la communauté confia la direction du collège à des prêtres séculiers. Le premier principal fut un chanoine de Saint-Malo, M. Duchatellier : il avait sous ses ordres deux sous-principaux, un régent de physique, un de logique, un de rhétorique et cinq autres pour les classes de seconde, troisième, quatrième, cinquième et sixième, ecclésiastiques ou laïques. L’évêque institua en outre deux docteurs en Sorbonne pour l’enseignement de la théologie.

Deux vicaires généraux, MM. de Fayolle et de Bléry succédèrent à M. Duchatellier dans les fonctions de principal du collège de Rennes.

L’enseignement secondaire fut réorganisé par le décret Impérial du 9 avril 1808, et le collège fut rétabli sous le nom de Lycée qu’il conserva jusqu’en 1815. Sous la restauration il prit le nom de collège royal.

Dès avant 1805, tous les élèves des maisons dirigées par des ecclésiastiques étaient dans l’obligation, à partir de la quatrième, de suivre les cours du Lycée.

L’église paroissiale de Toussaints est l’ancienne chapelle du collège des jésuites, aujourd’hui complètement détruit, et sur l’emplacement duquel s’élève le Lycée actuel, de style Louis XIII, qui établit à jamais la réputation de M. Martenot, architecte de notre ville. Il est, avec sa gracieuse chapelle, l’un des plus beaux monuments de Rennes. Sa façade, sur l’avenue de la Gare, est d’un superbe effet.