Au couchant de la monarchie/08

La bibliothèque libre.
Au couchant de la monarchie
Revue des Deux Mondes6e période, tome 7 (p. 525-550).
◄  07
09  ►
AU
COUCHANT DE LA MONARCHIE[1]

VIII.[2]
LA VISITE EN FRANCE DE L’EMPEREUR D’AUTRICHE


I

Les nécessités du récit m’ont fait précédemment omettre tout ce qui n’avait pas directement rapport à l’accession de Necker au pouvoir. Je dois maintenant revenir un peu sur mes pas et relater un événement qui s’était déroulé quelques semaines auparavant et dont l’influence fut sensible tant sur la politique que sur la disposition des esprits, à la Cour et dans le public. Il s’agit du voyage en France de Joseph II, empereur d’Autriche et beau-frère de Louis XVI. Pour apprécier comme il convient l’occasion, le but et l’effet de cette visite sensationnelle, jetons tout d’abord un coup d’œil sur la situation présente de la famille royale et de son entourage.


Louis XVI est resté tel qu’il s’est montré dès la première heure de son règne, loyal et bon, épris du bien public, désirant le bonheur du peuple et candidement avide de se gagner le cœur de ses sujets. Comme on l’a dit ingénieusement, « sous ses prédécesseurs, le monarque était l’objet du culte des Français : sous Louis XVI, les Français devinrent l’objet du culte du monarque[3]. » Dorénavant, l’humanité est le mot d’ordre, la popularité le but. Des mesures proposées par ses ministres successifs, toujours le Roi choisit et adopte de préférence celles qu’il imagine devoir plaire aux humbles et aux déshérités. Mais, vacillant en ses desseins, il ne sait pas poursuivre fermement ce qu’il a commencé et, en témoignant sa bonté, il néglige de prouver sa force. Ainsi laisse-t-il lentement péricliter et s’affaiblir entre ses mains l’autorité, sans quoi nul bien sérieux ne peut utilement s’accomplir. Ses qualités, ses vertus mêmes, par le gauche emploi qu’il en fait, portent atteinte au prestige de la royauté et contribuent involontairement à sa perte. Chaque expérience nouvelle n’a fait, jusqu’à ce jour, que confirmer la triste prédiction de l’abbé Galiani : « Attendez[4], et vous verrez avec quelle adresse, quel enchaînement admirable, le Destin, — cet être qui en sait bien long, — escamotera au meilleur des Rois, au mieux intentionné, tous ses desseins, détournera toutes ses bonnes intentions, et fera tout ce qu’il voudra et que nous ne voudrions pas. »

Dans la période du règne à laquelle nous sommes arrivés, Louis XVI possède encore, dans une assez large mesure, la sympathie et la confiance de la classe populaire. C’est chez ses proches, parmi les familiers du trône, qu’il est le plus injustement traité, le plus cruellement méconnu. Ses frères, ses cousins et ses tantes professent pour lui « un superbe dédain » et l’affublent dans leurs propos d’épithètes outrageantes[5]. Il ne rencontre chez les siens qu’hostilité, envie, intrigue ou trahison. Le Comte de Provence le jalouse et travaille sournoisement à déconsidérer son frère. Il se tient à l’écart, affecte un détachement et des manières bourgeoises, qui, chez le peuple parisien, lui valent de temps à autre une ombre de faveur ; mais sa main perfide se rencontre dans toutes les cabales politiques, dans tous les complots fomentés pour diminuer l’autorité du Roi et pour contrecarrer les vues de ses ministres. Cette malveillance secrète est plus dangereuse qu’une haine déclarée. Le Comte d’Artois, de jour en jour plus enfoncé dans son existence dissolue, grugé par la bande de fripons, de viveurs faméliques, auxquels il a remis le soin de gérer ses affaires, ne songe qu’à tirer de Louis XVI les millions nécessaires pour éteindre ses dettes, le flagorne quand il consent, le vilipende quand il résiste. Sur quelque refus de ce genre, il s’oublie jusqu’à dire tout haut que l’on devrait rayer un n des titres de son frère, ce qui ferait roi de France et avare ; à quoi le Roi, informé du propos, répond avec simplicité : « Je suis avare, en effet, puisque je n’ai d’autre bien que celui de mes sujets. » Quant aux princes des deux branches cadettes de la maison de Bourbon, Orléans et Conti, ils vivent dans une opposition ouverte et presque violente, et ils sont, pour Louis XVI, moins des parens que des adversaires acharnés. Ils donnent d’ailleurs, dans leur vie journalière, l’exemple de tous les scandales, « un vrai fléau pour le pays, » comme l’écrit Mercy-Argenteau.

Les deux belles-sœurs du Roi pensent et agissent comme leurs époux. La Comtesse de Provence, — Madame, selon l’expression usitée, — fausse, hypocrite, cauteleuse, ne perd aucune occasion de dénigrer tout bas les actions publiques ou privées du Roi et de la Reine. Malgré son soin de se cacher, elle réussit par cette conduite à s’attirer, de la part des souverains, une aversion que le sincère Louis XVI n’essaie guère de dissimuler. Laide et nulle, la Comtesse d’Artois répète sottement, dans un jargon semi-français et semi-italien, tous les méchans propos qui circulent dans son entourage et les aggrave sans les comprendre. A observer ces deux princesses, on pardonne aisément à Marie-Antoinette le mépris dont elle les accable dans ses lettres confidentielles : « Si ma chère maman pouvait voir les choses de près, la comparaison ne me serait pas désavantageuse. La Comtesse d’Artois a un grand avantage, celui d’avoir des enfans, mais c’est peut-être la seule chose qui fasse penser à elle, et ce n’est pas ma faute si je n’ai pas ce mérite. Pour Madame, elle a plus d’esprit, mais je ne voudrais pas changer de réputation avec elle[6] ! » Quant aux trois tantes, filles de Louis XV, Mesdames Adélaïde, Victoire et Sophie, terrées au château de Bellevue, elles persistent à fomenter, avec l’aigreur de vieilles filles oubliées, les sottes histoires, les médisances et, au besoin, les calomnies, qui se répandent dans le public et noircissent la réputation de la Reine et du Roi. Elles n’apparaissent que de loin en loin à la Cour, pour critiquer, blâmer, semer la zizanie dans le ménage royal[7].


Quels sont, après sept années de mariage et trois années de règne, les rapports établis entre Louis XVI et Marie-Antoinette ? La question est complexe et oblige à toucher certains points délicats, qui sont importans pour l’histoire. Un fait est avéré, c’est que Louis XVI, à cette époque, n’est pas encore, à proprement parler, le mari de la Reine, et que « l’état matrimonial, » pour employer le terme en usage dans les chancelleries, se borne entre les deux conjoints à des relations fraternelles. Les preuves abondent, et la correspondance de Marie-Antoinette avec Marie-Thérèse est pleine, sur ce sujet, de confidences fort claires, où percent son juste dépit et son regret de la maternité trop longtemps attendue. La cause réelle de cette situation bizarre est, quoi qu’on en ait dit, plus morale que physique. Louis XVI, selon la pittoresque expression de Sainte-Beuve, est, non pas « muet, » mais plutôt « bègue. » Une timidité invincible, la crainte du ridicule, une sorte de frayeur inavouée de sa femme, l’arrêtent au seuil de l’alcôve conjugale et lui font remettre sans cesse l’heure qu’il désire et redoute à la fois. Comme il arrive en pareille occurrence, la difficulté de l’action s’accroît avec la longueur du délai. Parmi ces tergiversations, mariée en 1770, reine en 1774, Marie-Antoinette n’est encore, en 1777, qu’une jeune fille couronnée.

Ceci explique sans doute et excuse bien des choses, que l’on reproche à l’épouse ainsi négligée : sa froideur un peu dédaigneuse envers ce singulier mari, l’indifférence maussade dont elle fait volontiers parade, l’affectation qu’elle met à se faire une vie séparée, à établir hautement qu’elle ne se plaît qu’avec « sa société » et que seuls « ses amis » comptent dans son existence. Et l’on conçoit aussi la gêne secrète, l’embarras mal dissimulé, dont Louis XVI ne peut se défendre en présence de sa femme, sa condescendance excessive, ses capitulations constantes devant ses plus audacieuses fantaisies, comme s’il éprouvait le besoin de désarmer l’irritation humiliée qu’elle éprouve et de se faire, par ses faiblesses, pardonner ses froideurs.

De toutes ces circonstances, inégalement fâcheuses, résulte pour Louis XVI un isolement complet, le plus cruel de tous, qui est l’isolement dans la foule. Sans parens, sans amis, sans maîtresse, sans femme légitime, peut-être aucun souverain ne connut à un tel degré l’amère souffrance de l’abandon. Un seul homme le console de cette détresse morale, par l’attachement passionné qu’il étale, le dévouement dont il proteste, le cas qu’il semble faire des capacités du jeune prince, c’est son vieux conseiller, c’est le comte de Maurepas. Aussi, entre l’habile Mentor et son royal élève, l’intimité croît-elle dans une progression continue. Il n’est guère de jour, à présent, où le prince n’admette le vieillard « dans son particulier, » ne s’entretienne confidentiellement avec lui. Maurepas a-t-il la goutte, Louis XVI gravit le petit escalier tournant qui, de l’appartement du Roi, monte à la chambre du malade, s’assied au pied du lit pendant des heures entières. Il a des attentions touchantes. Une fois, sans rien lui dire, il fait faire « son portrait en buste, » le place lui-même, en grand mystère, dans l’appartement du Mentor, se cache derrière un paravent pour jouir incognito de sa première surprise. L’effet dépasse ses espérances : effusions de Maurepas, exclamations de joie, émotion allant jusqu’aux larmes et grand attendrissement du Roi, qui dit le soir, en racontant la scène : « Je savais bien que M. de Maurepas m’était attaché, mais je n’aurais pas cru qu’il le fût au point dont j’ai été témoin aujourd’hui[8] ! » Les mauvaises langues prétendirent, il est vrai, que Mme de Maurepas, ayant surpris les intentions du Roi, avait averti son époux et dicté ses ardens transports.


II

Telles semblent être, à l’heure présente, les dispositions intérieures des principaux personnages de la Cour. Si, sous certains rapports, elles laissent à désirer, que dire de ce qui paraît au dehors, de ce qui s’en révèle aux regards du public ? Ici, quelque désir qu’on ait de faire preuve d’indulgence, la justice exige cependant qu’on mette la Reine en cause. Les excuses qu’on peut lui trouver ne sauraient empêcher de reconnaître et de juger ses torts. Son goût naturel du plaisir s’est augmenté dans des proportions inquiétantes ; il l’entraîne aujourd’hui à de véritables folies. Les fêtes succèdent aux fêtes, plus coûteuses les unes que les autres ; en septembre 1777, une seule soirée de Trianon se solde par une note de 400 000 livres. Ce sont, tantôt avec les Polignac, tantôt et plus souvent avec le Comte d’Artois, des « parties » continuelles, des bals et des courses « en masque, » des promenades aux flambeaux, de trop libres soupers qui se prolongent fort avant dans la nuit. « Point qui me fait le plus de peine, écrit l’Impératrice[9], c’est que tout cela se fait sans le Roi. »

À cette existence affolée, la Reine perd peu à peu cet instinct de décence et ce penchant vers l’honnêteté qui, à son arrivée en France, lui avaient autrefois valu l’estime et le respect d’une Cour foncièrement corrompue. Grâce aux propos, aux exemples surtout, de ceux qui vivent dans sa familiarité journalière, elle devient, chaque jour davantage, indifférente, complaisante même, aux faiblesses et aux vices qui s’étalent sous ses yeux et mérite les reproches que lui adresse, en pure perte d’ailleurs, son ancien confident, le digne abbé de Vermond : « Je passe[10]que vous ne preniez garde ni aux mœurs, ni à la réputation d’une femme, que vous en fassiez votre amie uniquement parce qu’elle est aimable ; mais que l’inconduite en tout genre, les réputations tarées ou perdues, soient un titre pour être admis dans votre société[11], voilà qui vous fait un tort infini ! »


À cette aggravation dans le laisser aller correspond une recrudescence de prodigalité. En deux ans, les frais d’écurie pour la maison de Marie-Antoinette ont augmenté de 30 000 livres. Quant aux charges nouvelles, aux sinécures et aux pensions, créées pour satisfaire l’insatiable appétit des amis et des familiers, le total dépasse annuellement 240 000 livres. Le comte de Mercy-Argenteau, tout en déplorant ces abus, constate, à la décharge de Marie-Antoinette, que, si elle réclame ces faveurs pour ceux qui lui sont chers, « c’est aussi souvent par embarras de refuser que par goût et par volonté. » Cela est vrai, sans doute, mais on n’en saurait dire autant du gaspillage personnel de la Reine, de la progression continue des dépenses de toilette, des achats de pierreries et surtout des pertes au jeu. La Reine, à sa table de pharaon, est comme prise de vertige ; les tas d’or fondent entre ses doigts, sans qu’elle semble en avoir conscience. Le Comte d’Artois la pousse, l’excite, l’entraîne avec soi sur cette pente. En une nuit, à Marly, la Heine perd 500 louis, son beau-frère 17 000. De tels excès donnent lieu, comme il est presque inévitable, à des altercations, à des « discussions indécentes, » à des « scènes tumultueuses, » où s’altère lamentablement la dignité du trône.

Sur ce terrain, Mercy et l’abbé de Vermond se sentent entièrement débordés et vaincus à l’avance ; ils finissent même par renoncer à faire de la morale. L’abbé, dans son découragement, songe sérieusement à quitter la partie, à prendre sa retraite ; il faut, pour le faire rester à son poste, les instances de Marie-Thérèse : « Ma fille court à grands pas à sa perte, étant entourée de bas flatteurs qui la poussent contre ses propres intérêts. Dans ces circonstances, elle a besoin de vos secours. Mercy et moi espérons que vous tâcherez de traîner votre retraite jusqu’à l’hiver. Si alors les choses ne changent, je ne saurais exiger de vous de nouveaux sacrifices. » Si Mercy est plus résigné, il n’a pas plus d’illusions que l’abbé sur l’efficacité de ses sages homélies : « Les momens[12]de parler de choses sérieuses sont courts. Sa Majesté les fuit souvent par un propos de gaîté, en disant que l’heure de la raison viendrait, mais qu’il fallait s’amuser. »

En attendant cette « heure de la raison, » les dettes, à ce métier, grossissent d’une manière effrayante. Vainement, depuis le jour de l’accession au trône, la pension de la Heine a-t-elle été plus que doublée ; vainement, sous l’aiguillon de la nécessité, Marie-Antoinette en vient-elle à négliger ses plus sacrés devoirs, à étouffer tous ses instincts de souveraine charitable, à rogner les fonds destinés à ses aumônes privées et aux œuvres de bienfaisance ; malgré ces fâcheux sacrifices, le déficit s’accroît et le gouffre se creuse sans cesse. Elle se débat continuellement en de terribles embarras. Vers la fin de l’année 1776, Mercy, à sa demande expresse, se livre à un examen de ses comptes, fait le relevé de ses dettes, constate que le total se monte à 487 872 livres.

En face de ce gros chiffre, la Heine eut, semble-t-il, un mouvement d’épouvante et presque d’affolement. Métra prétend, dans sa Correspondance secrète[13], qu’en cet instant critique, elle se serait adressée à Necker. Le directeur, d’après ce même récit, lui aurait répondu « que l’état du Trésor ne lui permettait pas d’accorder cette demande, mais que sa fortune personnelle lui permettait d’offrir cette somme à la Reine. » Les lettres, aujourd’hui connues, de Mercy-Argenteau, infligent un démenti formel à cette version peu vraisemblable. C’est à Louis XVI, nous dit l’ambassadeur, que la Reine eut recours, « non sans peine, » il est vrai, ni sans précautions oratoires, et elle n’eut pas à regretter cette marque de confiance. « Au premier mot que la Reine prononça sur ce chapitre, le Roi, sans hésiter, et de la meilleure grâce du monde, consentit à payer toute la somme. Il ne demanda que quelques mois de délai, voulant que cette dette fût acquittée sur sa cassette particulière et sans l’intervention d’aucun ministre. » Il est établi que Louis XVI tint fort exactement parole, conduite « fort remarquable, observe Mercy-Argenteau, de la part d’un souverain naturellement fort économe, surtout de l’argent qui est sous sa main, » de la part du prince minutieux qui inscrit dans ses comptes une dépense de « deux livres pour l’achat d’une pièce de morue et de deux maquereaux, » de « deux livres huit sols pour le repassage d’un rabat, » et qui réplique au Comte d’Artois, se lamentant d’avoir perdu une forte somme au jeu : « Notre famille est dans le malheur, car j’ai perdu aussi un écu de six francs ! »


Cette étrange longanimité n’est point admise dans les classes populaires. On se refuse à croire qu’un prince aussi vertueux, aussi modeste dans ses goûts, d’une telle simplicité de vie, puisse tolérer sans une indignation profonde les légèretés, le gaspillage dont la vue effarouche le bourgeois parisien. Des bruits circulent dans le public, des légendes s’accréditent, dont on surprend l’écho dans les notes de Hardy : « On donnait pour certain, rapporte le libraire, que le Roi s’était laissé aller à un tel accès de fureur qu’il avait souffleté la Reine, ou qu’il l’avait frappée d’un coup de canne; on allait beaucoup plus loin encore, et l’on débitait ce qu’on devinera mieux que je ne pourrais l’écrire. »

La vérité, bien différente, est que Louis XVI, sauf quelques bouderies passagères, quelques boutades un peu brutales, d’ailleurs aussitôt désavouées, témoigne la plupart du temps une extraordinaire indulgence envers les folies de sa femme. Sans doute pense-t-il, comme le dit l’abbé de Vermond, que « la jeunesse et le goût de tout effleurer sans rien approfondir sont la seule source de ses torts, » que les années corrigeront tout et remettront les choses en ordre. Sans doute aussi la cause intime que j’ai indiquée tout à l’heure contribue-t-elle grandement à lui fermer la bouche. Toujours est-il qu’il étonne toute la Cour par sa complaisance sans limite, qui confine à la soumission. « Son maintien, dit Mercy, est celui du courtisan le plus attentif, au point qu’il est le premier à traiter avec une distinction marquée ceux des entours de la Reine qu’elle favorise, tandis que l’on sait de notoriété qu’il ne les aime pas. » — « Quand, après les représentations les plus énergiques, reprend plus tard l’ambassadeur, la Reine répond que rien n’arrive sans le bon plaisir du Roi et qu’il est parfaitement content, toute réplique perd une bonne partie de sa force[14]. »


Louis XVI, à dire le vrai, se contente, la plupart du temps, de constater avec satisfaction que Marie-Antoinette, depuis la disgrâce de Turgot et le tolle qui en est résulté, a presque entièrement renoncé à s’occuper des affaires de l’Etat. Les derniers changemens de ministres l’ont trouvée inactive et comme indifférente. Elle n’y a pris aucune espèce de part; elle semble même « n’avoir été informée qu’après coup de l’élévation de Necker au poste de directeur général des Finances et du renvoi de Taboureau[15]. » Tous ses rapports avec Necker se borneront, pendant les premiers temps, à solliciter çà et là quelques faveurs pour ses amis, sous forme de pensions, sinécures ou « parts dans les fermes. » Quant à Maurepas, de tous temps sa bête noire, c’est à peine si parfois quelque raillerie piquante, quelque mot aigre-doux, rappelle de loin en loin l’ancienne antipathie, légers accès d’humeur, vite apaisés par l’habile souplesse du ministre, par l’officieuse intervention du Roi. En matière politique, le calme règne présentement dans le ménage royal, et c’est à quoi Louis XVI attache un prix particulier. Il est bien, sur ce point, le docile élève de Maurepas, car le mot d’ordre du vieillard, depuis le commencement du règne, est de se montrer indulgent pour les inconséquences privées, afin de détourner la Reine d’exercer son activité sur les affaires publiques. Cette tactique, pour l’instant, semble avoir plein succès.


III

Nulle part dans toute l’Europe, — sans même en excepter Versailles, — la situation difficile que je viens d’esquisser n’est plus exactement connue et plus amèrement déplorée qu’à la cour impériale d’Autriche. Par les rapports précis et consciencieux de Mercy-Argenteau, par les lettres confidentielles de l’abbé de Vermond, la vieille Marie-Thérèse et son fils, l’empereur Joseph II, sont tenus au courant des faits et gestes quotidiens des jeunes souverains qui règnent sur la France et des plus menus incidens de leur intimité. Ce qui leur est révélé de la sorte les remplit de chagrin, de confusion et d’inquiétude. La sollicitude maternelle se double, chez l’Impératrice, d’un sentiment d’humiliation profonde. Elle souffre à la pensée que, dans cette cour française, dont la frivolité, la légèreté, la « ridiculité, » comme elle dit volontiers en son patois tudesque, sont, de longue date, pour elle et pour son fils, un sujet habituel de blâme et de scandale, la plus frivole, la plus légère, soit une princesse de la maison d’Autriche. Cette idée la poursuit et blesse cruellement son orgueil.

Elle craint aussi, — et Joseph II le redoute plus encore, — que cette déplorable conduite, le désordre qui en résulte, l’effréné gaspillage d’argent, n’affaiblissent rapidement la puissance d’une nation alliée, dont l’Empire a besoin pour contenir l’ambition de sa dangereuse voisine, la Prusse.

Pour ces raisons diverses, et d’ailleurs toutes intéressées, la cour de Vienne souhaite ardemment voir la cour de Versailles revenir à des sentimens et des pratiques plus sages. Elle ne négligera rien pour parvenir à un si heureux résultat. Tels sont assurément la première origine et l’objet principal de la visite de Joseph II chez le Roi son beau-frère, effectuée au printemps de 1777. Les lettres publiées du prince et de ses confidens ne laissent là-dessus aucun doute.


Fils aîné de l’empereur François Ier de Lorraine, mort en 1765, et depuis lors associé par Marie-Thérèse au gouvernement de l’Empire, mais encore contenu et bridé par une mère jalouse du pouvoir, Joseph II jusqu’alors possédait une autorité plus honorifique qu’effective. De cette pénible dépendance il prenait une revanche en exerçant sur le reste de sa famille, et principalement sur ses sœurs, un contrôle un peu despotique, s’érigeant en censeur de leurs propos et de leurs actes, ne leur ménageant pas les remontrances bourrues et les reproches sévères. Tel il s’était montré, depuis son avènement au trône, à l’égard de la reine de France, ce dont était, entre elle et lui, résulté une certaine froideur. Las de morigéner en vain, voyant les lettres sans effet, peut-être, pensait-il, des entretiens en tête à tête, des observations faites de bouche, produiraient-ils de meilleurs fruits. C’était du moins son espérance.

Par malheur, l’humeur du souverain et sa nature d’esprit devaient faire douter du succès de sa diplomatie, surtout pour discuter avec une créature quelque peu nerveuse et sensible. Instruit, d’esprit ouvert, simple dans ses façons, il gâtait ces bonnes qualités par une sécheresse de cœur, par une rudesse de ton, une brusquerie d’allures, une mésintelligence des nuances, bien faites pour blesser les aines délicates. Deux fois veuf, il fuyait les femmes, méprisait leur commerce et s’en vantait très haut : « Je rétrograde furieusement en galanterie, et l’hibouisme me gagne, écrivait-il à son frère Léopold[16]. La compagnie des femmes est, ma foi, insoutenable à un homme raisonnable à la longue, et je peux dire que souvent les propos des plus huppées et spirituelles me tournent l’estomac. » Cette prétention à être constamment sérieux allait jusqu’à la pédanterie, et son souci de tout approfondir donnait quelque lourdeur à sa conversation.

On peut lui reprocher aussi le goût de se faire remarquer, le désir d’étonner, de s’attirer la popularité par des moyens vulgaires, qui frisent ce que la langue moderne nomme le cabotinage. Lui-même en convient sans détour, témoin cette phrase d’une de ses lettres à son frère : « Vous valez mieux que moi, mais je suis plus charlatan. Je le suis de raison, de modestie ; j’outre un peu là-dessus, en paraissant simple, naturel, réfléchi[17]. » Il plaisait, au reste, à la foule par sa bonne mine et par son visage noble — « la bouche jolie, les dents belles, le sourire agréable[18], » — par le soin qu’il prenait de traiter avec distinction les gens les plus modestes. « Dieu m’a fait naître gentilhomme, disait-il volontiers ; je fais le prince le moins que je peux. » Il eût été pourtant peu prudent de s’y fier ; à la moindre contradiction, il reprenait bien vite « un ton et une contenance de maître[19]. »


Le projet du voyage en France remontait chez l’Empereur à l’époque des fiançailles de Marie-Antoinette. A son départ de Vienne, en lui disant adieu, il avait dit et répété qu’il irait la voir à Versailles. Plus d’une fois, depuis lors, il avait rappelé cette promesse, mais plus mollement de jour en jour, et sans recevoir de sa sœur un encouragement bien marqué. Mais, au cours de l’été de l’an 1776, l’idée prend corps soudain, et, sur-le-champ, il s’occupe de fixer une date. « Je compte toujours, mande-t-il à Mercy-Argenteau[20], choisir un moment propice pour venir voir la Reine et la France… Voilà comment je penserais arranger cette course : je voudrais être les derniers jours du carnaval à Paris, en voir le bruit, et ensuite, pendant le carême, m’occuper des détails tant de la vie privée de ma sœur que des objets d’instruction et de curiosité que cette grande ville contient. » A quelque temps de là, il précise son dessein et revient avec insistance sur son désir de corriger sa sœur et de la mettre « dans le droit chemin, » car, ajoute-t-il, « il me parait qu’elle commence à s’en égarer, et vous pouvez compter que ce ne sera qu’après avoir bien vu et après avoir gagné sa confiance que je réglerai mes propos. »

L’annonce de cette visite fut accueillie, ainsi qu’on devait s’y attendre, avec une visible froideur par les hôtes de Versailles. « La Reine, écrit Mercy[21]au vieux prince de Kaunitz, premier ministre de l’Empire, la Reine est combattue entre le désir de voir son auguste frère, qu’elle aime bien véritablement, et la crainte qu’il n’aperçoive de trop près tout ce qu’elle présume qu’il trouvera à redire au système de conduite de la Reine, et un jour elle en est convenue avec moi. » Louis XVI, de son côté, — encore que pour d’autres raisons, — se sent vaguement inquiet du jugement que pourra porter sur les gens et les choses, et notamment sur les rapports conjugaux du ménage, cet incommode beau-frère. Les ministres, enfin, redoutent l’ingérence de Joseph dans les affaires publiques de France, soit intérieures, soit extérieures, la pression qu’il peut exercer sur un prince jeune et faible pour l’entraîner dans la politique de l’Empire. Vergennes rédige même à l’avance, à l’intention du Roi, un mémoire détaillé, où il énumère les questions que, dans leurs entretiens intimes, pourra soulever l’Empereur, et indique les réponses qu’il conviendra de faire[22].

Kaunitz, dans une lettre à Mercy, résume assez exactement cet état des esprits, dont il prend son parti avec une bonhomie narquoise : « 11 m’a paru, dit-il[23], tout simple que la Reine, le Roi et son ministère n’aient exprimé que très sobrement le plaisir que devrait leur faire le voyage de l’Empereur. En voici, selon moi, les causes : la Reine a peur d’être sermonnée, le Roi appréhende que l’Empereur ne le mette dans l’embarras en lui parlant affaires, et le ministère craint que l’Empereur n’insinue des choses favorables aux uns et défavorables aux autres. Et moyennant tout cela, il n’y a pas lieu de s’étonner que tous ces gens-là aient reçu un peu froidement une nouvelle, que certainement ils auraient accueillie tout autrement, s’ils avaient su ou pu croire qu’il n’arriverait rien de tout cela. »

Marie-Thérèse elle-même, malgré l’importance qu’elle attache à voir sa fille ramenée vers une existence plus sérieuse, n’est pas très rassurée sur la façon dont s’y prendra Joseph, sur le succès de ses semonces. « Je ne compte guère sur le bon effet de ce voyage, confie-t-elle à Mercy. Si je ne me trompe pas, il s’ensuivra une de ces deux choses : ou ma fille gagnera par ses complaisances et agrémentera (sic) l’Empereur, ou bien il l’impatientera en la voulant trop endoctriner. » De ces deux hypothèses, elle croit, ou feint de croire, la première plus probable : « Il aime, reprend-elle, à plaire et à briller. Je crois que, jolie et agaçante comme est ma fille, mêlant de l’esprit et de la décence dans la conversation, elle remportera son approbation, et il en sera flatté[24]. » Le voyage, dans ce cas, deviendrait inutile, peut-être même plus nuisible que profitable.

Pour remédier à ces inconvéniens divers, le prudent et subtil Kaunitz s’avise de dicter à l’Empereur tout un plan de campagne, qui n’est pas dénué d’habileté : « Qu’en arrivant[25]il dise avec cordialité à sa sœur et à son beau-frère : Je ne viens ici que pour donner à tous deux, par la visite que je vous fais, une marque de ma bonne et sincère amitié. Qu’à tous deux, ainsi qu’à leurs ministres, il ne parle d’aucune affaire, ni domestique ni autre, à moins qu’ils ne lui en parlent les premiers. Pour ce qui est de la Reine, quoi qu’il puisse voir pendant son séjour, qu’il ne lui dise rien du tout, jusqu’au moment où il prendra congé d’elle ; mais qu’il lui dise alors : Je ne vous ai pas dit un mot, ma chère sœur, pendant tout le temps que j’ai passé ici avec vous, sur ce qui vous regarde, parce que je n’ai pas voulu vous mettre dans le cas de supposer que je veux me mêler de vos affaires. Mais je crois devoir vous dire amicalement ma pensée à cet égard, à présent que je suis sur le point de vous quitter. » Suit tout un modèle de harangue, remplie de bons conseils, d’exhortations à la sagesse, du ton le plus attendrissant, de la plus vertueuse éloquence.

Dûment endoctriné, Joseph promet tout ce qu’on veut, et le prince de Kaunitz s’empresse, d’en informer son ambassadeur à Paris : « Je vous prie d’aller dire de ma part à la Reine que l’Empereur ne vient à Paris que pour avoir le plaisir de la revoir et d’établir une bonne et sincère amitié personnelle entre lui et le Roi son époux, qu’elle peut être assurée qu’il ne lui parlera d’aucune affaire quelconque, ni domestique, ni autre, à moins qu’elle ne lui en parle, et qu’il serait utile qu’elle prévînt là-dessus en secret le Roi et ses ministres, afin que tout le monde ait l’esprit en repos[26]. »


On négocie parallèlement sur tous les détails du séjour. L’empereur tient avant tout à conserver l’incognito dans la mesure possible. Il ne sera pas Joseph II, mais le comte de Falkenstein, du nom d’un fief de sa maison situé aux frontières de Lorraine, et il sera traité comme tel du jour de l’arrivée jusqu’au jour du départ. « Il est essentiel, écrit-il[27], que je puisse voir les choses dans leur état naturel et qu’on me traite en comte de Falkenstein, tant à la Cour qu’en ville et dans les provinces ; tout le fruit de mon voyage et tout l’agrément en dépendent. »

Ce désir d’être pris pour un simple particulier, il le poussera, au cours de son voyage, jusqu’à la mystification. Dans une auberge où il couchera, la servante « qui lui tient le plat, dans le temps qu’il se rase, » lui demandant s’il n’a point, par hasard, quelque emploi auprès de l’Empereur : « Oui, répondra-t-il gravement, c’est moi qui lui fais la barbe. » Ailleurs, son cuisinier, avec son agrément, se fera passer pour l’Empereur, recevra les harangues du maire et du curé, leur donnera sa main à baiser[28].

Un point qui le préoccupe fort, — et le seul qui soulève quelques difficultés, — est la question du logement à Versailles. « Je suis très décidé, mande-t-il à Mercy-Argenteau, de n’accepter de logement ni au château, ni au Petit-Trianon, ni dans aucun endroit appartenant à la Cour ou aux princes. Il me faut y être logé pour mon argent, et je préférerais retourner plutôt tous les soirs à Paris que de renverser, pour une seule nuit que j’accepterais de loger à la Cour, tout l’édifice de mon incognito[29]. » Après d’assez longs pourparlers, des observations inutiles, il en faut bien passer par là, en dépit du petit scandale que cause cette fantaisie et des craintes qu’on éprouve sur les « gloses » du public. « Il me sera dur de ne pouvoir le loger auprès de moi, déclare[30]. Marie-Antoinette à sa mère. On en sera surpris. Mais je sacrifie tout à ses goûts. Il sera logé et vivra comme il l’ordonnera. » De même, on accepte à Versailles, dans ses détails un peu puérils, la mise en scène de comédie réglée à l’avance par Joseph. « Le jour où l’Empereur arrivera, spécifie Mercy-Argenteau[31], je conduirai Sa Majesté par des passages détournés jusque dans les cabinets de la Reine, de façon qu’il ne soit aperçu de personne. Le Roi surviendra quelques momens après, par la communication intérieure de son appartement avec celui de la Reine… »


IV

Différentes circonstances, notamment la mauvaise saison, firent ajourner le voyage de quelques semaines. Le vendredi 18 avril, eut lieu enfin l’arrivée à Paris. Vêtu de gris, sans décoration, sans escorte, deux laquais sur le siège, un aide de camp assis à ses côtés, l’auguste voyageur occupait une petite voiture, « laide et légère, » entièrement découverte, et, comme il pleuvait à torrens, il « était trempé d’eau[32]. » Il descendit l’ambassade d’Autriche, au « Petit-Luxembourg[33], » d’où, le lendemain matin, on le conduisit à Versailles dans une voiture de poste. Tout se passa comme il était convenu, et sans aucun cérémonial. Dans les premiers instans, entre Joseph II et sa sœur, on crut remarquer quelque gêne ; il fallut, pour les mettre à l’aise, l’entrée du Roi, cordial et simple, sincèrement affectueux. On dîna peu après dans la chambre à coucher de Marie-Antoinette, les trois convives « perchés sur des plians égaux, » d’une manière assez incommode ; on écartait ainsi des difficultés d’étiquette. L’Empereur, au cours de ce repas, semblait un peu embarrassé ; il avait l’air, dit le duc de Croy, « d’un étranger respectueux. » Le service était fait par les femmes de la Reine. Le dîner fut rapide ; Louis XVI, contre son habitude, fit presque tous les frais de la conversation.

A quatre heures, on se sépara, et Joseph se rendit à pied chez le comte de Maurepas. Il trouva l’antichambre « pleine de solliciteurs, » et comme, au nom du comte de Falkenstein, le valet, ignorant la qualité du visiteur, « ne se pressait pas d’annoncer, » l’Empereur alla se mettre au milieu de la foule, le dos contre la cheminée, affectant de dire à voix haute : « S’il est en affaires, ne le dérangez pas. » Maurepas, prévenu, accourut bientôt, essoufflé[34]. L’entretien terminé, Joseph retournait à Paris et se réinstallait au Petit-Luxembourg. Trois jours plus tard, il allait encore à Versailles, y demeurait le soir et couchait à l’hôtel du Juste, tenu par le baigneur Touchet. Il y dormait sur une paillasse avec une peau d’ours pour matelas.

Ces détails singuliers, embellis, amplifiés, commentés dans toutes les gazettes, provoquent la curiosité tout d’abord, puis l’admiration du public. Ce détachement, cette bonhomie, cette « familiarité vraiment philosophique, » plaisaient à l’opinion, s’accordaient merveilleusement bien avec l’esprit du temps. « Tout le monde, écrit avec ironie la comtesse de la Marck, courait après ce monarque extraordinaire, » qui méprisait le faste et, comme il le disait lui-même, « couchait au cabaret. » Partout où il allait, une multitude, pleine d’enthousiasme, se pressait sur ses pas, s’émerveillant de la simplicité et des allures bourgeoises de ce souverain d’un vaste empire, qui se promenait à pied par les rues de la capitale, suivi de deux laquais en gris, et qui entrait dans les boutiques pour y faire lui-même ses achats. On se pâmait sur ses moindres paroles : « On répétait les lieux communs qu’il disait avec une emphase à faire mourir de rire. La tête en tournait à tout Paris[35]. »

Aussi le peuple fondait-il les plus grandes espérances sur la bienfaisante influence que ne pourrait manquer d’avoir un prince si admirable. Après avoir donné l’exemple, il saurait donner la leçon. Il arrêterait le gaspillage, convertirait la Reine, assagirait la Cour. Et, comme « il voyait tout et s’instruisait sur tout, » il conseillerait le Roi de la manière la plus utile, il lui rapporterait le fruit de ses observations, lui parlerait avec franchise sur les abus et les réformes[36].


Il n’est pas dans mon plan de raconter par le menu les faits et gestes de l’Empereur pendant les six semaines de son séjour sur les rives de la Seine. D’autres ont fait ce récit avant moi, et je ne puis mieux faire que d’y renvoyer le lecteur[37]. Je ne veux rapporter ici que ce qui touche aux grandes affaires, ainsi qu’aux principaux personnages de la Cour. Au point de vue de la politique générale, et particulièrement de la politique extérieure, Joseph tient fort scrupuleusement les promesses faites à Mercy-Argenteau. Il ne s’y aventure qu’avec une grande circonspection, par allusions voilées, et, somme toute, il témoigne de plus de réserve et de tact que l’on ne pouvait en attendre. Trois fois il se rend chez Necker, sans le trouver chez lui, ne s’étant pas fait annoncer à l’avance, et, quand il le rencontre enfin, la conversation ne roule guère que sur des choses banales, ce qui ne l’empoche pas, dit-il, de « remporter l’idée la plus avantageuse de l’esprit » du nouveau directeur des Finances, idée « bien conforme, ajoute-t-il, à celle de son caractère, au sujet duquel il n’y a qu’une voix[38]. » C’est de la même manière qu’il cause avec Maurepas, auquel il promet néanmoins « sa protection » auprès de Marie-Antoinette[39], mais sans sortir des généralités, sans s’ingérer dans la politique intérieure, sans souffler mot des intrigues et cabales de la Cour.

Les amis de Choiseul s’étaient flattés de l’espérance que l’Empereur parlerait du duc et chercherait à dissiper les préventions et les défiances du Roi. Une des inquiétudes de Louis XVI était même de voir son beau-frère aborder avec lui ce sujet délicat. Joseph, tout au rebours de ce qu’on supposait, se montra très peu favorable au retour de l’ancien ministre et il félicita le Roi d’avoir tenu bon sur ce point, attitude imprévue qui causa le plus vif dépit à Marie-Antoinette. Bien mieux encore, à quelques jours de là, lors d’une visite de Joseph II chez Mme de Brienne, la duchesse de Gramont, sœur du duc de Choiseul, « ayant fait tomber le discours à plusieurs reprises sur son frère, » en disant à l’Empereur qu’il « viendrait dans peu à Paris et qu’il serait très empressé à lui faire sa cour, » le prince ne répond rien et tourne les propos sur la pluie et le beau temps, » ce dont la duchesse de Gramont se montre « extrêmement mortifiée[40]. »


V

Circonspect sur les choses d’Etat, Joseph prend sa revanche avec les questions de personnes et les détails de vie privée. Après les premiers jours employés à se renseigner, à observer ce qui se passe, il se laisse aller peu à peu à sa manie critique, à son esprit frondeur, à son goût de morigéner. C’est sa sœur, la plupart du temps, qui sert de cible à ses sarcasmes, à ses remarques ironiques, parfois à ses coups de boutoir. Il censure ses manières, ses propos, ses dépenses, son penchant pour le luxe ; il lui reproche durement la société qu’elle s’est choisie et « l’entourage de ses valets[41]. » Il court dans le public des mots piquans qu’il a, dit-on, décochés à la Reine, comme le jour où, celle-ci le consultant sur sa coiffure surmontée d’un panache de plumes : « Je la trouve bien légère pour porter une couronne, » aurait-il répondu.

Elle supporte ces flèches, pendant les premiers temps, avec une patience méritoire, mais non toutefois sans témoigner qu’elle en ressent la pointe. « L’Empereur est toujours le même, écrit-elle à sa sœur. Il fait des observations très justes sur tout ce qu’il voit et donne des conseils comme personne n’en sait donner. Des fois, il faut l’avouer, il y met une forme un peu brusque. » Mais à mesure que le séjour s’avance, ces attaques répétées l’énervent, l’irritent davantage ; elle lui reproche, non sans raison, de « pousser la franchise jusqu’au défaut de courtoisie ; » plus d’une fois, à présent, il s’élève de « petites querelles, » que suivent « de légères bouderies. » Joseph continuant de plus belle, l’heure vient enfin où la Reine se fâche tout à fait et demande nettement à son frère de renoncer, du moins, « à la critiquer en public[42]. »

Louis XVI n’est pas exempt non plus des remontrances de son beau-frère, mais il les prend avec une douceur désarmante. « Le Roi, dit Marie-Antoinette, le regarde avec amitié et, comme il est très timide et peu parlant, il 1 écoute volontiers sans mot dire ; quand notre frère lui donne de ses coups de critique, il se borne à sourire et se tait. » Si l’on en croit Mercy, Louis XVI, en plusieurs circonstances, aurait provoqué de lui-même les observations de Joseph, lui confiant avec bonhomie les choses les plus intimes, l’entretenant notamment de ses rapports avec la Reine, de sa réserve conjugale, expansif jusqu’au point de gêner son beau-frère, qui ne se retient pourtant pas de lui donner quelques conseils pratiques. On assure que l’Empereur, après ces confidences, eut avec le médecin Lassonne un entretien secret, peu de jours avant son départ, et que ce qu’il lui dit eut une grande influence sur la conduite ultérieure de Louis XVI. Joseph exhorte aussi le Roi à se montrer davantage au public, à sortir du cercle fermé où il se confine d’ordinaire, à observer choses et gens par ses yeux et à tenir parfois « des cercles de conversation, » car rien n’instruit un homme, affirme-t-il, « comme la causerie, le débat des idées. »

Véri, dans son Journal, rapporte un entretien où Joseph s’est vanté à lui d’avoir donné ces excellens conseils : « J’ai dit au Roi, raconte l’Empereur, qu’il ferait bien, les après-dînées, d’aller, en petit cercle, causer chez M. de Maurepas. Il n’y dira rien d’abord, mais, à la fin, il fera comme tout le monde. — Personne en effet, acquiesce l’abbé Véri, ne serait plus propre à remplir cette vue que M. de Maurepas, car c’est précisément dans la conversation qu’il a le plus de lumières. Il discute bien, il voit à merveille, et si l’action y répondait !… »

Il semble bien, d’ailleurs, que, sur la plupart des sujets abordés dans leurs entrevues, les deux souverains soient tombés à peu près d’accord. Telle est leur bonne entente, au moment du départ, qu’ils conviennent, une fois séparés, de ne pas rompre leur commerce et d’entretenir ensemble une correspondance régulière.

Il en est tout différemment avec les princes du sang, surtout avec les Comtes de Provence et d’Artois. De leurs torts et de leurs défauts, rien n’échappe aux regards du trop clairvoyant visiteur : les intrigues du premier, ses menées souterraines pour s’attirer, au détriment du Roi, la faveur populaire, le soin constant qu’il prend de contrecarrer sournoisement les intentions et les vues de son frère ; la vie débauchée du second, ses étourderies, ses folies, sa fureur de dépenses. Joseph ne peut, dans ses lettres intimes, retenir l’expression de son antipathie, de son aversion même, pour la plus grande partie de la famille royale : « Monsieur, écrit-il à son frère, est un être indéfinissable ; mieux que le Roi, il est d’un froid mortel. Madame, laide et grossière, n’est pas Piémontaise pour rien, remplie d’intrigue. Le Comte d’Artois est un petit-maître dans toutes les formes ; sa femme, qui seule fait des enfans, est imbécile absolument[43]. »

Le hasard veut que les deux princes entreprennent, à cette heure, un grand voyage à travers les provinces, dans l’Est et le Sud de la France. Ils y déploient un fastueux « appareil, accompagnés d’une suite nombreuse, donnant et recevant partout les fêtes les plus coûteuses, provoquant le scandale de tous les pays qu’ils parcourent. La comtesse de la Marck, dans ses lettres à Gustave III, nous donne la note du sentiment public : « Monsieur et le Comte d’Artois, écrit-elle[44], viennent de voyager, mais comme ces gens-là voyagent, avec une dépense affreuse, la dévastation des postes et des provinces, et n’en rapportant qu’une graisse étonnante. Monsieur est revenu gros comme un tonneau. Pour M. le comte d’Artois, il y met bon ordre par la vie qu’il mène. » On juge quelles sont, à ce spectacle, les impressions du souverain économe qui, pour un voyage de deux mois, s’enorgueillit de n’avoir pas, en tout, dépensé un million, en comptant dans cette somme de riches présens et des charités abondantes. « Je n’ai pu voir tout cela sans indignation, confie-t-il à Mercy[45], et à moins que votre Maurepas ne soit une pomme cuite (sic), on ne conçoit pas qu’il souffre chose pareille ! »


La vraie opinion de Joseph sur les personnes et les institutions, c’est dans les lettres qu’il adresse à son frère Léopold[46]qu’il convient d’en chercher surtout la sincère expression. Au demeurant, et malgré ses vertes critiques, on y voit bien qu’il n’est pas pour sa sœur un juge foncièrement malveillant ; il rend même hommage en passant à certaines de ses qualités : « La Reine est une jolie femme ; mais c’est une tête à vent, qui est entraînée toute la journée à courir de dissipation en dissipation, parmi lesquelles il n’y en a que de très licites… Elle ne pense qu’à s’amuser ; elle ne sent rien pour le Roi. Sa vertu est intacte ; elle est même austère par caractère… C’est une aimable et honnête femme, un peu jeune, peu réfléchie, mais qui a un fond d’honnêteté et de vertu. Le désir de s’amuser est bien puissant chez elle, et, comme l’on connaît ce goût, on sait la prendre par son faible… » Quand il parle du Roi, il le trouve « mal élevé, faible pour ceux qui savent l’intimider, et par conséquent mené à la baguette, dans une apathie continuelle, » point sot pourtant, assez instruit, rempli d’intentions droites.

Il met le doigt avec justesse sur le vice capital de la haute administration dans les dernières années de l’ancienne monarchie française : « Chaque ministre, dans son département, est maître absolu, mais avec la crainte continuelle d’être, non dirigé par le souverain, mais déplacé. Par là, chacun ne tend qu’à se conserver, et aucun bien ne se fait, s’il n’est analogue à cette vue. Le Roi n’est absolu que pour passer d’un esclavage à un autre. »


VI

Six semaines s’étaient écoulées à cette espèce de revue générale, passée par le souverain de la nation alliée. Tant chez les hôtes que chez le visiteur, une certaine lassitude commençait à se faire sentir. Le public parisien revenait peu à peu de l’engouement des premiers jours, de l’excessive admiration qu’avaient d’abord excitée les allures d’un prince aussi original. « On s’est peut-être trop accoutumé à le voir, remarque Mme Du Deffand. Les impressions qu’il a faites sont usées. La simplicité plaît, mais à la longue paraît peu piquante. » L’Empereur, de son côté, se fatiguait visiblement de maintenir sans relâche l’attitude affectée à laquelle il devait la plus grande part de son succès. « J’ai passé pour un oracle sans l’être, confesse-t-il à son frère. Je quitte ce royaume sans regret, car j’en avais assez de mon rôle. » Les derniers jours du mois de mai furent employés par lui aux préparatifs du départ et à la réalisation du but essentiel du voyage.

A la veille de quitter Paris, se ressouvenant sans doute des conseils de Kaunitz, il s’occupe, en effet, de rédiger, pour la laisser à Marie-Antoinette, une instruction écrite, où elle trouvera un guide moral pour se conduire désormais dans la vie. Voici comment la Reine en informe l’Impératrice : « J’avouerai[47]à ma chère maman qu’il m’a donné une chose que je lui ai bien demandée et qui m’a fait le plus grand plaisir : c’est des conseils par écrit qu’il m’a laissés. Cela fait ma lecture principale dans le moment présent. » En dépit des affirmations de Marie-Antoinette, on a droit de concevoir des doutes sur l’efficacité de cette longue homélie, édifiante à coup sûr, mais filandreuse, déclamatoire, d’une sensiblerie larmoyante et d’une vague phraséologie, où manque essentiellement l’accent de la sincérité : « Vous êtes faite pour être heureuse, vertueuse et parfaite ; mais il est temps, et plus que temps, de réfléchir et de poser un système qui soit soutenu. L’âge avance ; vous n’avez plus l’excuse de l’enfance. Que deviendrez-vous, si vous tardez plus longtemps ? Une malheureuse femme, et encore plus malheureuse princesse ; et celui qui vous aime le plus dans toute la terre, vous lui percerez l’âme ! C’est moi, qui ne m’accoutumerai jamais à ne pas vous savoir heureuse… » Joseph comptait beaucoup sur l’effet de cette éloquence : « Vous me ferez plaisir, écrit-il à Mercy quelques jours après son départ, de me dire si mes sermons ont produit quelque fruit et changement dans la vie de la Reine. »

A en croire Marie-Antoinette, elle eût été d’abord profondément touchée. Rien, disons-le, n’empêche de supposer que, sur cette âme douce et frivole, ces marques d’intérêt, ces adieux solennels, aient fait d’abord quelque impression, une impression vite effacée. On le croirait d’après ses premières lettres : « Madame ma très chère mère, le départ de l’Empereur m’a laissé un vide, dont je ne puis revenir. J’étais si heureuse pendant ce peu de temps, que tout cela me paraît un songe dans ce moment-ci. Mais ce qui n’en sera jamais un pour moi, c’est tous les bons conseils et avis qu’il m’a donnés et qui sont gravés à jamais dans mon cœur… » Elle parle encore, un peu plus loin, de son émotion violente et de son « désespoir » à l’heure de la séparation. Elle se loue fort aussi des « attentions et des recherches de tendresse du Roi, » pour atténuer sa peine, attentions et recherches, ajoute-t-elle d’un ton pénétré, « que je n’oublierai de ma vie et qui m’y attacheraient, si je ne l’étais déjà[48]. »


Il est juste de constater, dans les semaines qui suivent, comme un léger effort de Marie-Antoinette pour mettre un peu plus de sérieux dans sa vie. Les lettres de Mercy sont sur ce point formelles : « Elle m’a parlé[49]d’un ton fort recueilli sur ses projets de réforme de conduite. Depuis huit jours, elle n’a fait aucune promenade dans Paris, et elle n’a point joué aux jeux de hasard. Il est visible qu’elle réfléchit au point capital, d’être plus attentive avec le Roi et de se montrer plus fréquemment avec lui. » Deux mois après, assure l’ambassadeur, toute trace des leçons de Joseph n’a pas encore entièrement disparu. Il est vrai qu’il le dit à l’Empereur en personne, ce qui infirme un peu l’autorité du témoignage : « Cette auguste princesse[50]reste encore, dans plusieurs articles de sa conduite, dans les termes de réformes que Votre Majesté y a opérées. Les momens de retraite et de lecture subsistent, ainsi que le maintien plus attentif et plus amical avec le Roi. Il faut joindre à cela une diminution considérable dans les objets de dissipation bruyante. »

Mais, aussitôt après ces constatations consolantes, il se voit obligé d’avouer que, des torts de la jeune souveraine, le plus dangereux, « le plus fatal » reparaît de plus belle, à savoir la passion du jeu ; « La princesse perd maintenant assez pour se trouver très gênée dans toutes ses autres dépenses. Il n’y a plus de fonds pour les œuvres de bienfaisance, et le pire de tout, c’est le mauvais exemple, le regret qu’il cause au Roi, et l’effet fâcheux qu’il produit dans le public. »

Que l’on attende deux mois de plus, et tout reprendra comme devant, peut-être même avec aggravation. « Je ne reviens point de mon étonnement, dira le bon Mercy-Argenteau[51], sur la courte durée des impressions faites par Sa Majesté l’Empereur sur l’esprit de la Reine, et, après avoir vu cette auguste princesse, pendant deux mois, si bien pénétrée des vérités utiles qui lui ont été représentées, il est inconcevable que toutes choses reviennent à un état réellement pire qu’il n’était avant le voyage de l’Empereur. J’ai lieu de croire que le règlement écrit par Sa Majesté a été supprimé et jeté au feu ! »


Au bout du compte, le seul résultat appréciable, — et il est important sans doute, — du voyage de Joseph est le rapprochement conjugal qui s’opère à Versailles dans les premières semaines qui suivent le départ du souverain. « Enfin, me voilà reine de France ! » s’écriera Marie-Antoinette en s’adressant à sa lectrice, Mme Campan, entrée un matin dans sa chambre. Louis XVI lui-même, à quelque temps de là, envoie à son beau-frère ces lignes où respire une naïve et touchante fierté : « Vous me reprocherez de ne vous avoir pas mandé ce qui s’est passé entre la Reine et moi. J’attendais quelque chose de plus pour vous en faire part. Deux fois, nous avons eu quelques légères espérances ; mais, malgré qu’elles n’aient pas réussi, je suis sûr d’avoir fait tout ce qu’il faut, et j’espère que l’année prochaine ne se passera pas sans vous avoir donné un neveu ou une nièce[52]. » Après ces confidences intimes, il ajoute d’un ton attendri : « C’est à vous que nous devons ce bonheur, car, depuis votre voyage, cela a toujours été au mieux, jusqu’à parfaite conclusion. » A quoi l’Empereur réplique en ces termes encourageans : « Les nouvelles que vous voulez bien me donner de votre lien conjugal me font le plus grand plaisir, et vous voulez même presque me laisser l’opinion d’y avoir contribué par mes propos… Continuez de même. »

Prochainement, en effet, apparaîtront des symptômes de grossesse, et à Versailles les gens bien informés devinent à qui revient l’honneur de ce grand événement. « On en attribue le mérite à l’Empereur, écrit dans ses Mémoires le comte de Saint-Priest. En interrogeant sa sœur sur sa stérilité, il en apprit la cause. Il ne s’agissait que d’un peu d’adresse de la part de la Reine[53]… » À ce point de vue tout au moins, le voyage de Joseph n’avait pas été en pure perte.


Quant à l’effet produit sur l’opinion par la visite en France du monarque autrichien, il semble bien que cette visite ait été, tout compte fait, plus nuisible qu’utile. Nul ne doutait que le but de Joseph ne fût essentiellement de raisonner et d’assagir sa sœur, de l’arracher aux influences qui l’entraînaient dans des voies périlleuses, de remettre de l’ordre et de la décence à la Cour. Le désappointement fut profond, lorsqu’on vit les bonnes impressions si rapidement détruites et les anciennes façons de vivre si aisément ramenées à leur train coutumier. On avait beaucoup espéré ; on s’en irrita davantage. La physionomie de façade adoptée par l’Empereur, son économie, son sérieux, sa simplicité d’existence faisant contraste avec le luxe et le goût du plaisir étalés à Versailles, suscitèrent dans l’esprit public des comparaisons désastreuses. La frivolité de la Reine en parut plus choquante, la faiblesse du Roi plus fâcheuse. On les jugea dès lors l’un et l’autre incurables, et la tentative avortée rendit les vices plus apparens, les abus plus intolérables.


SEGUR.

  1. Copyright by Calmann-Lévy, 1912.
  2. Voyez la Revue du 15 janvier.
  3. Soulavie, Mémoires sur le règne de Louis XVI.
  4. Lettre du 8 juillet 1774 à Mme d’Epinay. Édition Asse.
  5. On l’appelait couramment dans la famille royale, rapporte Frénilly, le serrurier ou le gros cochon.
  6. Lettre du 13 juin 1776. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  7. Voyez les lettres de Mercy-Argenteau à Marie-Thérèse, et notamment celle du 17 novembre 1778. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  8. Journal de Hardy, 17 août 1777.
  9. Lettre du 31 octobre 1776. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  10. Note jointe par Mercy à sa lettre du 17 septembre 1776. — Ibid.
  11. Allusion à la princesse de Guéménée.
  12. Lettre du 17 novembre 1776. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  13. 14 janvier 1777.
  14. Lettres des 15 novembre 1776 et 15 novembre 1777, à l’Impératrice. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  15. Lettre de Mercy du 15 août 1777. — Ibid.
  16. Lettre du 13 juillet 1772. — Maria-Theresia und Joseph II, publié par d’Arneth.
  17. Lettre du 11 juillet 1777. — Maria-Theresia und Joseph II.
  18. Souvenirs du marquis de Valfons.
  19. Ibidem.
  20. Lettre du 22 août 1776. — Correspondance publiée par Flammermont.
  21. Lettre du 15 novembre 1776. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  22. Mémoire du 12 avril 1777. — Archives nationales K. 164.
  23. Lettre du 1er janvier 1777 à Mercy. — Correspondance publiée par Flammermont.
  24. Lettres des 31 octobre et 30 novembre 1766 et 3 février 1777. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  25. Lettre du 1er janvier 1777. — Correspondance publiée par Flammermont.
  26. Lettre du 3 janvier 1777. — Correspondance publiée par Flammermont.
  27. Lettre à Mercy du 30 novembre 1776. — Ibidem.
  28. Journal du duc de Croy. — Autour de Marie-Antoinette, par M. de Routry.
  29. Lettre du 31 décembre 1776. — Correspondance publiée par Flammermont.
  30. Lettre du 16 janvier 1777. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  31. Lettre du 17 janvier 1777. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  32. Journal de Croy.
  33. La suite fut logée dans un petit hôtel de la rue de Tournon, aujourd’hui le restaurant Foyot.
  34. Journal de Croy.
  35. Lettre de la comtesse de la Marck à Gustave III de Suède, du 7 août 1777. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  36. Correspondance secrète publiée par M. de Lescure, 1er mai 1777.
  37. On peut consulter notamment, dans l’ouvrage de M. de Routry, Autour de Marie-Antoinette, le chapitre sur le Voyage de Joseph II en France, p. 289-301. — Un des correspondans du prince Xavier de Saxe, le sieur Pommiès, ajoute les détails suivans sur l’un des incidens qui firent le plus de bruit à Versailles : « L’Empereur a été au pavillon de Louveciennes et a causé un quart d’heure avec Mme du Barry, qui était sortie dans ses jardins pour lui laisser la liberté de voir plus à son aise le pavillon. L’Empereur ayant demandé si la maîtresse de la maison était absente, on lui a dit qu’elle était dans le jardin. Alors il a été la chercher, lui a donné le bras jusqu’au pavillon, et ils ont causé d’une manière fort agréable. L’Empereur en a été charmé. » Lettre du 22 mai 1777. — Archives de Troyes.
  38. Lettre de Joseph II à Mercy, du 4 mars 1780. — Correspondance publiée par Flammermont.
  39. Lettre de Mercy à Marie-Thérèse, du 15 janvier 1777. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  40. Lettre du prince X. de Saxe du 30 avril 1777. — Archives de Troyes.
  41. Journal de l’abbé de Véri. — Passim.
  42. Mémoires de Mme Campan. — Correspondance secrète publiée par M. de Lescure, etc., etc.
  43. Lettre du 11 mai 1777. — Maria-Theresia und Joseph II. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  44. Lettre du 7 août 1777. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  45. Lettre de Mercy à Marie-Thérèse, du 15 juillet 1777. — Ibidem.
  46. Maria-Theresia und Joseph II, passim.
  47. Lettre du 14 juin 1777. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  48. Lettre du 14 juin 1777. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  49. Lettre du 15 juin 1777. — Ibidem.
  50. Lettre du 15 août 1777. — Correspondance publiée par Flammermont.
  51. Lettre à Marie-Thérèse, du 17 octobre 1777. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  52. Lettre du 22 décembre 1777 à l’Empereur, citée par M. le comte de Pimo-dan, dans son livre récent sur le Comte de Mercy-Argenteau.
  53. Mémoires inédits du comte Guignard de Saint-Priest.