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Au seuil de l’espoir/4

La bibliothèque libre.
Léon Vanier, libraire-éditeur (p. 33-50).
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IV

La brume se déroule en troubles mousselines
Lâches, d’argent fumeux broché de fleurs lilas
Et lustre d’un brillant mouillé les cornalines
Des branches fines, la blondeur des chaumes plats
Et le satin crépu des croupes des collines :

En l’écrin sombre des gros arbres arrondis
Qui retiennent la nuit sous leur velours, — la baie
Semble, aux derniers frissons de la houle tombée
Un diamant vivant aux feux pâles verdis :
Dans le ciel veiné d’une opaline marbrure,
Le soleil transparaît en vitrail flou, teinté
De topaze mourante et de rubis lacté ; —
La barque va, rayant l’eau froide, comme dure,

D’un sillage luisant et mince, au frisselis
Coupant, d’où gicle, bref, un bouquet de paillettes.

De longs sentiers de bois aux voûtes violettes
Pivotent, découvrant leurs lointains de taillis
Devant le glissement de la yole filante.

Parfois, sous l’épaisseur moite des frondaisons,
Se devinent de noirs conciles de maisons ;
De loin en loin cligne une étoile vacillante,
Qui grandit, — vitre d’or que sabrent des rameaux
Et qui jette un clinquant d’irradiants émaux
Sur quelques feuilles, — dans la masse ténébreuse ;
Puis s’enfonce en cillant dans l’ombre vaporeuse,
Œil rouge et triste, ouvert aux soucis du matin,
De flamme plus vivante en sa mélancolie
Que le jour qui s’allume au vitrail incertain
La foret fuit — et c’est La falaise polie,
Rose à peine, — et la plage étroite aux rocs pourpres
Où les tamaris nains tremblent et s’échevèlent,
S’entrefouettant de leurs ramilles qui s’emmêlent,
Fils de souple corail à reflets mordorés,
Sous les premiers rayons, obliques flèches molles.

Les flots crêtes de blanc bouillonnent à l’assaut
Du cap qui vire, ainsi qu’un monstrueux vaisseau,

À l’élan du canot qui le double — et les folles
Mouettes volent comme une écume de l’air.
Défiant le géant qui déchire les vagues
De son brusque éperon d’acier rougeâtre et clair.

Déjà le large étreint la barque de ses vagues
Chatoiements bleus — qui font des halos indécis
Liquidement glissants, embrouillés en lacis
Arachnéens — de rais éblouissants qui dansent
Comme élastiques, — se calment et se rélancent
Sur le blanc miroitant du bordage verni,
Au clapotis fantasque et berceur de la houle
Dont le scintillement ruisselle, mousse et roule
Glaçant l’azur de rets souples d’argent bruni.



L’hôte est bien seul dans l’air acre et libre qui saoule,
Sous sa voile qui bat et s’enfle en se plaignant ;
Là-bas, une île est comme un flocon qui s’irise ;
Un grand voilier spectral oscille en cheminant,
Dressant de hautes tentes bises dans la brise ;
La terre proche est un cristal s’illuminant
Comme en songe ; — pourtant, au creux d’une « veilleuse »
Plus précise avec ses arbres d’un vert épais,

La brume fume encore en fantômes drapés
De longues traînes de gaze mauve, onduleuse ;
Et lorsque le dernier monte dans la tiédeur
Diaphane, nacrant l’exubérante brèche
Qui taille et blottit, dans l’humide profondeur
Des fervides rochers, comme une oasis fraîche,
La forme lente qui se diapré au soleil
Et flotte, évoluant sous un nimbe pareil
A ceux des Saintes, aux Sanctuaires mystiques.
Prend la langueur et les grâces énigmatiques
De Celle qui voulut, pour requiem, le chant
Inconsolablement serein de L’Océan
Et pour lieu de repos les bois mouvants des plages :

Peut-être a-t-elle aimé ce coin d’ombre frôlé
D’un souffle d’Inconnu, — le Soir vert des feuillages,
Dans le sauvage éclat du grand Vide perlé !…

Va-t-il, en abordant à la falaise accore,
Savoir l’occulte Sens de l’apparition
Pourquoi vaine ? — Cueillir avec dilection
Quelque secret qui la rendra plus chère encore ?

Vers la faille au bosquet marin qui le ravit
Laissant porter sa barque au flux vif des vaguettes
Où le ciel onde sous des béryls en aigrette
Il accoste aux parois de granit et gravit

La sente en pleins blocs bruts, où cliquette une source
Qui bouillonne et sautelle et rejoint dans sa course
Poudroyante, — le vol des embruns lumineux.
Pus haut, la mousse frise et tapisse les pentes
Sous les verdures aux tiédeurs enveloppantes
D’où filtre en tournoyants paillons, l’or bruineux
Des Espaces.

Au cœur d’un bouquet de fougères
Qui s’empanachent — courts palmiers moins plumuleux, —
Une case de chaume et de lattes légères,
Telle qu’on rêve, en son isolement joyeux,
La paillotte de l’Inde ou des forêts malaises,
Se tapit en la sylve étroite des falaises,
A l’abri du galop balourd et saugrenu
Des bestiaux errants et des brutes humaines.

La porte basse, sous les liserons amènes,
Larges veux bleus, riants pour l’hôte bienvenu,
A cédé sous l’effort des bises hibernales
Qui raclent les ravins en trombes infernales.

Pourtant, l’air semble encore alourdi des parfums
Qui hantaient ses cheveux aux profonds ambres bruns.
Toute la pièce exhale une atmosphère intime
Qu’il a connue : Il sent qu’il peut aller, sans crime,

Aux rares meubles qui sont presque des amis :
Qu’il vit ailleurs, brillants d’une bourgeoise aurore
Et qu’il retrouve doux, fanés, comme blêmis.
Au divan de rotang tressé de Bengalore
Ou du Coromandel ; au fauteuil à semis
De roses naines dont les graciles pétales
S’effacent, éraillés dans le tissu blafard, —
Papillons morts tombant très loin dans un brouillard,
A la table de faux santal, aux nacres pâles,
Dont le tiroir gardait ses livres préférés,
Et qui boîte, les pieds gonflés de vieilles pluies,
Tordus, rongés et leurs sculptures en bouilli,
Vraiment à plaindre, avec ses membres perforés, —
Tant la ruine semble humaniser les choses,
Ajouter de tristesse à leur ennui muet
Et même de souffrance à leurs métamorphoses î !
— Pensif, il reconnaît jusqu’au bronze fluet
Dont le socle verdi cachait la clef menue
Qui dort encore, — comme attendant sa venue, —
Un peu rouillée en son sachet de velours noir :

Voici reliés de souple maroquin mauve, —
Tranche « pensée » avec un givre d’argent fauve,
Signets d’hyacinthe, — une améthyste au fermoir, —
Maîtres qu’elle aimait pour leur mélancolie
Et qu’elle appelait ses « poètes violets » :

Ceux dont l’effusion lointaine et recueillie
A l’âpre exquisité de tels sombres œillets
Dans le soir pourpre, — sous le tremblement stellaire
Délicieusement triste, — pleurs contenus :
André Lemoyne, Dierx, le divin Baudelaire,
L’ange déchu Verlaine aux tourments ingénus
Et le magicien Poictevin, dont la prose
Est un vers plus fluide à l’orient troublant
Qui surprendrait l’émoi nuancé, tressaillant
De la rosée au cœur d’aurore d’une rose
Ou la musique des rayons sur un cristal.
Il prend chaque subtil et précieux volume
Et tourne les feuillets comme un exilé hume
Les senteurs qui jadis montaient du Sol natal…



Seul, demeure en un coin du tiroir, tout livide,
Tout froissé, tavelé des rouilles de la mer,
Gardant, après des ans, comme un reflet humide
D’abîme gris, béant sous la pâleur de l’air,
Un gros cahier rugueux qui sort d’une enveloppe,
Bien brillante pour lui ! — de moire héliotrope :
L’écriture indécise et brusque, — il la connaît ;
Et c’est tout un passé bizarre qui renaît :

Car ce poème qu’il a rêvé loin d’Europe,
Sous les nipas tagals ou les rôniers géants
De Guinée, — aux frissons des pennes des Antilles,
Sur les grands orbes clairs, mouvants, des Océans,
Il l’écrivit au jour douteux des écoutilles,
Aux oscillations d’une lampe de bord,
Ou dans quelque « roumah » de fantastique port
Presque invisible à deux cents brasses des mouillages
Sous les cascades, les maelstroms de feuillages.
Au milieu des buveurs au teint de bronze huileux
Rougi par la lueur de couchant nébuleux
Des lampes de « klapa » qui fumaient, grésillantes,
Cuivrant les hanchements lourds et les torsions
Fauves — des bustes nus des servantes dolentes.



Ô le triste poème et les obsessions
Qu’il réveille dans les fraîcheurs de la willeuse !
Quels bouges a frôlé l’Idylle ! — Comme il sent
Que son âme eût été moins atroce, oublieuse,
Toute livrée au bas pittoresque et laissant

L’ame blanche au jardin des edelweiss mystiques,
Moins neigeux, roses de Ses pudeurs extatiques,
Dans l’exquisité d’une atmosphère de ciel, —
Qu’en évoquant, par ces vapeurs de beuveries,
Parmi les rires sourds et les agaceries
Des gouges brunes, — son rêve immatériel,
La pure vision d’aube vierge d’aurore,
Qu’il osa contempler et qu’il « voulut » encore, —
En son inconsciente et lâche abjection, —
Emue et souriante à cette passion
Triomphante du philtre « enchanteur » des relâches ! —
C’est ce papier souillé sur les tréteaux poisseux
De borgnes cabarets sumatrains ou malgaches
Qu’elle a placé, paré de soie auprès de Ceux
Qui de leur mélodie ample, aux blandices sûres
Bercèrent son spleen ou ses tendresses obscures !
O déchirer le vil cahier blasphémateur,
Le crasseux monument de plate effronterie,
Insultant et naïf — et sincère — et menteur !…

. . . . . . . . . . . . . . . . . .


Comme il brandit la loque adornée et flétrie,
Un vol papillotant de fins papier lilas
Palpitants, retombant comme des oiseaux las
S’éparpille, jonchant le plancher qui se ronge
Des feuilles mortes d’un tendre automne de songe,

Qu’il recueille, non sans malaise et sans remords, —
— Commentaires soigneux, écrits d’une encre étrange,
D’un vert bengalisé de turquoises et d’ors,
Qui semble refléter SES veux pers, sous leur frange
De cils de soleil brun septembral, triste et doux



Ces notes ont creusé, vers par vers, le poème,
Inquiètes du sens occulte, des « dessous », —
Disant ce qu’eût voulu dire l’ « œuvre » elle-même,
La comblant des trésors de mille illusions,
Prêtant un sens charmant aux grossières emphases
Fleurissant de bouquets discrets d’allusions
Le désert spécieux des phrases, — rien que phrases !



Il croit revoir « sa » tête inclinée : Elle a dû
Relire bien souvent chaque strophe incertaine
Dans le mystère vert de son ravin perdu !
— La voici : L’index mat à la tempe châtaine.
Son index rose-thé que le frêle incarnat
De l’ongle à l’orient teinté d’un lait grenat

Nacre du chatoiement d’une perle florale ;
Les cils tremblent, baissés, sous la ligne augurale
Des sourcils d’un châtain plus sombre, — duveteux :
L’éclat du ciel marin que la vitre tamise,
Adouci du frisson des feuilles dans la brise,
Poudre de jours cendrés diaphanement bleus
Et d’un smaragdin faible et flou la crespelure
Indomptable de sa mousseuse chevelure.
La bouche détend l’arc ferme, à peine charnu,
De ses lèvres d’un rose intense d’azalées,
Ou l’affine encore en un sourire menu.
Son nez cambré, mince, aux narines ciselées
Dans un ivoire aux tons camélia, gonflées
Imperceptiblement, subodore au lointain
L’insinuant parfum des forêts tropicales
Qu’il décrivit, pompeux, au hasard des escales.
— Sa poitrine que moule un bizarre satin
Presque terne, malgré d’évanescentes flammes
Qui courent dans l’étoffe, ondulantes, en lames
Phantasmatiquement serpentines de kriss, —
Et qui rappelleraient les reflets indicibles
Des brasiers d’un couchant voilé sur des iris, —
Se soulève, battante, aux passages terribles
De tempêtes, de durs traitements et de faim,…

. . . . . . . . . . . . . . . . . .


O routes de retour que l’on cherchait en vain, —

Gouvernail arraché, mâts rasés, toile au diable, —
Entre la vague opaque et la brume insondable !…

. . . . . . . . . . . . . . . . . .


Il la détaille si nettement, — l’œil mi-clos
Tout brillante de la rosée adamantine
De larmes qu’un rayon d’horizon clair lutine,
Le regard vers un point de l’« au-delà » des flots, — …
… Une bouclette aérienne, — un rien qui frise,
Enroulement de jour soyeux, presque irréel
Qui caresse le iront d’un soupçon d’arc-en-ciel, —
… — Ce veloutis de pèche ombrant la nuque exquise,
… — Et ce lacis d’azur faible sur le bras nu
Qui s’enchâsse d’un lourd bracelet inconnu'
Comme ce collier fait d’opales lilacées
De crépuscule tiède et triste nuancées
lit cette robe au feu violàtre dormant,…
Il la retrouve si semblable et si « nouvelle »,
Avec sa langueur grave, — et dans son œil aimant
Quelque chose d’« atteint » qui n’était pas en elle,
Qu’il ne sait plus s’il la « veut », passionnément,
Présente dans la case où son rêve l’appelle, —
n pitié par un Monde ignoré
Mais toujours ambiant et 8 présent » dans l’espace,
Il n’est pas le jouet complaisamment leurré
De quelque bienveillant fantôme trop fugace !…

— Il est bien seul avec le vent du large, — amer, —
Pénétrant les cloisons de l’haleine marine ;
Et sur le manuscrit micacé d’eau saline
Miroitent les yeux pers et railleurs de la Mer.



Mais, ensevelissant la lointaine relique
Dans le frêle tombeau du vieux meuble effondré
Il découvre ces vers d’un feuillet égaré
Que cerne un trait puissant de l’encre chimérique :

« Si l’amour qui franchit les gouffres est menteur
« Quand il hante, plaintif, l’âme qui le repousse
« C’est un perfide, aussi, que l’oiseau migrateur
« Qui fuit les bois du Sud et la floraison douce
« Des bosquets roses où vont giter les ramiers
« Et la feuille roulée en nid qui le recueille,
« Cherchant au Nord pâli les vieux murs coutumiers
« Et la fenêtre amie où bat le chèvrefeuille,
« Et le lierre noir bruissant du frôlis
« Des églantiers grimpants et des volubilis… »

— Lui-même vient répondre à sa propre détresse
Et l’emphatique trait dit qu’EIle a deviné
Le pauvre cœur privé de réelle tendresse
Et que — n’ignorant rien — elle a tout pardonné.



Il reviendra parfois dans L’étroite cabane
Où tiennent les lueurs de l’énorme Océan,
Le Vent, dur pourvoyeur de L’abîme béant,
Tout ce qui flotte et sombre avec tout ce qui plane,
Et bien humble, — mêlée aux tragiques combats
Des Forces folles, — dans la ruée emporta
Parcelle de l’embrun qui flotte ici, Là-b,
Vers le Vague, — sa vie entière reflétée ;
Et dans ce cadre fruste et naguère choyé
Pourtant, — paré de fleurs dont telle jardinier.. —
Malgré les Ouragans hurlant dans la chaumière, —
Conserve encore un fil roux de tige, — noyé
Au mince Bot d’oubli montant — de la poussière.
— Dans ce cadre infléchi qui dure en s’effritant,
Vieillot à souhait, plein de souvenirs d’autan,
Il revivra sa trop berçante adolescence
Et sa maussade enfance, et sa maturité
Trop précoce, de fruit gaulé, meurtri, gâté

Par les doux créanciers de sa reconnaissance,
En relisant ses vers dont la sincérité
S’affirme en la si chère et lointaine Présence.



Au « Noroît » qui se lève, estompant le bleu vif
Du ciel plus froid que gagne une buée ailée,
La barque « hanche » sous la voile regonflée :
La côte se referme en rempart agressif
Dont les pointes de roc, rouge denture avide
Se tendent méchamment pour happer les vaisseaux,
Et les vallons boisés, refuges des oiseaux
Et des rêves lassés des essors dans le vide,
Comme l’herbe et la lande astrale des ajoncs
Ne sont plus qu’une mousse aux flancs d’âpres donjons.



Dans la lagune étroite et profonde où l’eau gronde,
D’un olivâtre vert glacial sous le grain
Et s’enfle en galopant, roulante et furibonde,
Se flagellant de ses crinières de poudrin, —
Enlacé des varechs que le flux brusque entraine,
Un brick noir fourvoyé tourne au bout de sa chaîne

Grinçante en les naseaux de fer des écubiers.
Et les moutons errants qui paissent sur la dune
Se tassent à l’abri frissonnant des halliers,
Sous le vent rebroussant leur toison beige ou brune.



Clairsemés, des pécheurs aux « cirages » battants —
Que l’on ne voit qu’aux jours farouches de bourrasques,
Toujours enfuis aux bleus perlés et miroitants,
Courant sur les bancs clairs des croisières fantasques,
Ou terrés dans la nuit fumeuse des taudis, —
Sur les buttes de sable, incrustés et raidis,
Surveillent leurs bateaux mouillés loin dans les passes.
— Et comme le canot range les pointes basses,
Rasant les coteaux bis piqués de joncs marins
D’où se détachent sur étain les silhouettes
Claquantes — des guetteurs obstinés et chagrins,
Sinistres sous le vol livide des mouettes,
L’« isolé » qui bataille avec son toc mouillé,
Songe, naïf, que ces haillonneuses statues
Le devinent, peut-être, et prennent en pitié
L’équivoque rôdeur des ravines perdu
Ou qu’une Seule a « Su », qui n’a pas oublié

Et ne guette que lui, débile, dans son cotre, —
Spectre vengeur, gardien du mystère d’« Un autre ».
Et souriant un peu du lugubre roman
Éclos dans son caprice à la hideur sournoise
Des nuages en deuil qui font, se déformant,
Glisser sur l’eau de fiel des vampires d’ardoise,
Et ne sont plus bientôt qu’un crêpe diapré
Dont l’écharpe s’effrange aux rondeurs irisées
Des collines riant de leur vert relustré,
Il voit monter son toit dans les masses boisées
Et luire les clins d’œil changeants de ses croisées
Inviteurs sous leurs cils, de glycine alourdis. —
Si vermeille aux dardants soleils d’après-midis, —
Dans la rouge chaleur, somnolente et joyeuse, —
La vieille maison semble en la jauneur crayeuse
D’un timide rayon comme convalescent
Que filtre un cumulus d’ocre bleuâtre et brune
Serti d’un fil d’or violet, opalescent,
Un logis d’enchanteur sous un rayon de lune.



Et malgré sa douceur de gîte reconnu,
Tendant son perron bas au flot qui le ramène,
L’« hôte » la sent pareille à ce carbet chenu
Qui se meurt, là-haut, de tristesse surhumaine :

Deux moribonds n’ayant qu’une âme pour eux deux :
Le charme condamné de SA mélancolie
Et qu’une expression dans la vie abolie,
Qu’y fixèrent de longs regards des mêmes yeux.