Augusta Holmès et la femme compositeur/04

La bibliothèque libre.
Librairie Fischbacher (p. 25-26).


IV

L’Éducation d’Augusta Holmès


Augusta Holmès est née à Paris, en 1847, d’un père irlandais et d’une mère écossaise qui, chose étrange, ne pouvait souffrir la musique ; elle mourut quand Holmès était tout enfant.

Le poète Alfred de Vigny avait en grande affection la petite Augusta et s’occupa assidûment de son éducation. De cette direction, de cette intimité, naquirent certainement le goût d’Holmes pour les poèmes, et sa facilité pour la versification. Pour l’emporter sur la littérature ainsi accessible, il fallait les dispositions musicales les plus vivaces, les mieux formées ; Holmès mit à leur service le fruit de son instruction poétique, et on doit supposer que dans ce jeune cerveau toute poésie évoqua la musique.

Alfred de Vigny vit avec mécontentement ces dispositions pour les choses artistiques, il s’efforça de détourner sa pupille de la voie musicale et ne réussit qu’à éloigner de lui l’enfant chérie comme sa fille, car, dès qu’Augusta devint grande fillette, une rupture se produisit entre elle et l’éducateur qui voulait contrarier une irréductible vocation. Peut-être par la suite, elle ignora la maladie et la cruelle agonie de celui qui dirigea son enfance ; elle ne le revit jamais et avait environ seize ans quand il mourut. À un ami d’Alfred de Vigny qui, plus tard, lui parlait de l’isolement final de l’auteur de Chatterton, Augusta Holmès répondit : « Il a eu le bonheur de mourir seul, tout seul ! comme Beethoven ! » Peut-être une présence amie eût-elle été mieux appréciée du vieux poète qu’un point de comparaison dont il ne dut même pas s’aviser.