Biographie universelle ancienne et moderne/1re éd., 1811/Théodore (Santabaren)

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THÉODORE (Santabaren), imposteur célèbre par ses relations avec l’hérésiarque Photius et les empereurs d’0rient, Basile Ier et Léon VI. Elevé à Constantinople dans le monastère de Stude, il fut fait évêque par Photius (voyez ce nom). A l’époque de sa première intrusion sur le siége patriarcal de Constantinople, son protecteur ayant été chassé, Théodore lui conseilla, dit-on, de faire prendre à l’empereur des breuvages préparés par ses enchantements, afin de changer en amitié la haine que l’on avait inspirée à ce prince contre Photius. Quoi qu’il en soit, celui-ci ayant réussi vers l’an 878 à s’insinuer de nouveau près de Basile, recommanda Théodore au prince comme un religieux d’une science, d’une sainteté extraordinaire, et qui possédait même le don de prophétie. L’empereur voulut le voir et, en peu de temps, il gagna si complétement ses bonnes grâces, que le prince voulut l’avoir constamment auprès de lui. (Voy. Basile, t. III, p. 479.) Se fiant sur cette faveur, Théodore engagea l’empereur à chasser le patriarche Ignace (Voyez ce nom) et à mettre de nouveau Photius sur le siége patriarcal. Cette première tentative n’ayant point réussi, Photius, quoique déposé par un concile général, reprit, de concert avec Théodore, ses fonctions épiscopales qu’il exerça publiquement. Saint Ignace étant mort de vieillesse, peu de temps après, Photius remonta aussitôt sur son siége, et, afin de récompenser les bons offices que Théodore lui avait rendus, il lui promit tous les évêchés qui seraient à sa convenance dans les environs de Constantinople. On commença par le siége archiépiscopal d’Euchaïte que l’on ôta par force à l’évêque titulaire ; et on continua en venant à d’autres églises que Théodore désignait et dont Photius l’investissait au mépris des canons. Ainsi chargé d’évêchés, Théodore fut nommé protothrone ou évêque du premier siége dépendant du patriarche, qui, dans les cérémonies, le faisait asseoir près de son trône patriarcal. Peu après, l’empereur Basile ayant perdu presque subitement son fils aîné, Constantin, qu’il avait fait couronner empereur, et les catholiques disant hautement que cette mort était une punition du ciel, qui voulait venger les crimes commis par Photius et Théodore, ces deux intrigants recoururent à leurs supercheries ordinaires ; ils osèrent mettre Constantin au nombre des saints, consacrer, sous l’invocation de son nom, des églises, des monastères, et Théodore réussit même, à ce que l’on assure, à faire paraître à l’empereur, comme il traversait une forêt, un fantôme à cheval, revêtu d’or, qui disparut aussitôt que ce prince l’eut embrassé, le prenant pour son fils. Théodore prit une part très-active au faux concile, qui fut tenu, en 879, à Constantinople pour le rétablissement de Photius. Après la mort de Constantin, les affections et les espérances de l’empereur Basile avaient passé sur son second fils, le prince Léon qu’il avait eu de l’impératrice Eudoxie et qui était couronné depuis l’an 870 (Voy. Léon VI t. XXIV, p. 141). Ce jeune prince qui, ayant depuis succédé à son père, fut surnommé le Sage, le Philosophe, ne pouvait se souvenir sans en être affligé, du crédit que Théodore avait pris sur l’esprit de son père ; il en parlait hautement comme d’un vil séducteur qui avait abusé constamment de lui, de la confiance de l’empereur. Théodore résolut de s’en venger. Sous l’apparence de donner au jeune prince un conseil d’ami, il lui dit : « Etant le premier, après votre père, vous devriez, lorsque vous le suivez dans ses promenades ou à la chasse, porter de quoi le défendre si cela devenait nécessaire. » Il n’était sans doute point d’usage alors que ces princes portassent l’épée ou d’autres armes en temps de paix ; Léon, donna dans le piége et, devant suivre son père à la chasse, il mit un couteau dans ses brodequins, ce que Théodore se hâta d’aller annoncer à l’empereur, en lui insinuant que son fils voulait lui ôter la vie, qu’il n’avait qu’à lui faire tirer ses brodequins ; qu’il y trouverait ce que le prince y avait caché. Etant sortis ensemble, comme à l’ordinaire, l’empereur, pour s’en assurer, demanda un couteau, dont il feignit d’avoir besoin. Léon qui ne se doutait de rien se hâta de tirer le sien. Basile, le tenant pour convaincu, le fit jeter en prison, après lui avoir ôté ses brodequins rouges (c’était une marque de la dignité impériale). D’après les instigations de Théodore, le père aurait peut-être fait crever les yeux à son fils, si le sénat n’avait apaisé son ressentiment ; mais il le laissa détenu dans une dure captivité. L’empereur étant mort quelque temps après, Léon qui lui succéda, instruit que Photius et Théodore avaient formé un complot pour élever sur le trône impérial une de leurs créatures, fit instruire leur procès ; mais on ne put les convaincre, Théodore ayant rétracté les aveux qu’il avait faits auparavant. L’empereur le fit frapper de verges et lui fit crever les yeux, puis il le rélégua en Natolie. Quelques années après, il le rappela à Constantinople et lui donna une pension sur une église. Théodore survécut au prince, n’étant mort que vers l’an 912. G—y.



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