Bulletin de la société géologique de France/1re série/Tome I/Séance du 20 juin 1831

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Vingtième séance. ─ 20 juin 1831.


M. Cordier occupe le fauteuil.

Après la lecture et l’adoption du procès-verbal de la dernière séance, on passe à la correspondance.

M. de Caumont fait hommage à la Société de la deuxième partie du premier volume de la Revue normande.

On y remarque l’extrait d’un mémoire de M. de Caumont sur les deux espèces de poteries employées dans les laiteries de l’arrondissement de Bayeux, dont l’une est fabriquée avec des glaises d’un âge peu certain et surmontant le grès intermédiaire, et la seconde avec des argiles du grès bigarré.

M. Deslongchamps a lu à la Société linnéenne un mémoire sur le genre Plagiostome qu’il réunit à celui des Limes. Il les divise en quatre sections comprenant dix-sept espèces, savoir : la première, à bords des valves entiers, non coupés en biseau et à lunule distincte (Lima gigantea et heteromorpha) ; la deuxième, à bords des valves sinuoso-dentés et à lunule distincte (Lima sulcata, variabilis, radiata et punctata) ; la troisième, à bords des valves coupés en biseau aux dépens de la face interne et à lunule distincte (Lima elliptica, lucida, pulchella, uniaurita, typus, lœvis et semi-striata) ; et la quatrième, à bords des valves sinuoso-anguleux et sans lunule (Lima alternans, duplicata, gibbosa et exigua).

Il est présenté :

1° Par M. Brongniart, deux brochures de M. le docteur Morton sur quelques fossiles crétacés du nouveau Jersey et du Delaware, extrait des Annales d’histoire naturelle de New-York.

2° Par M. Boué, le premier cahier du septième volume du. Teutschland de M. Keferstein, qui contient un mémoire de M. le comte Munster sur la découverte du calcaire jurassique inférieur près de Hohenstein en Saxe. L’éruption siénitique aurait, d’après l’auteur, mis au jour ces couches. On trouve aussi dans ce cahier l’annonce de M. G. Richter, que l’administration, du comptoir minéralogique attaché à l’académie des mineurs de Freiberg offre de nouveau de fournir des collections géologiques à divers prix.

La Société décide 1o  que les personnes qui voudront assister à la réunion extraordinaire à Beauvais (dép. de l’Oise) devront y être rendues le 6 septembre prochain.

2o  Qu’elle continuera encore ses séances pendant le mois de juillet.

M. d’Omalius d’Halloy communique l’extrait suivant d’une lettre de M. le docteur Sauveur fils.

M. le docteur Schmerling, de Liége, poursuit ses recherches sur les ossemens fossiles. Le nombre des cavernes à ossemens découvertes par lui dans les environs de Liége se monte de 12 à 15 au moins. Dans l’une d’elles, située à Engihoul, à 70 mètres au-dessus du niveau de la Meuse, il a trouvé enfouis dans une couche argileuse mêlée de cailloux roulés de quarz, de silex et de fragmens de calcaire, des ossemens humains bien caractérisés confondus avec des débris d’ours, de deux espèces du genre Mus, de quatre espèces d’oiseaux, etc. Ces ossemens ne paraissent nullement avoir été rongés.

M. Schmerling a aussi lu dans la séance de la Société des sciences naturelles de Liège, du 22 avril dernier, un mémoire sur des débris d’un rhinocéros fossile trouvé dans un terrain meuble à Chokier, près de Liège.

M. d’Omalius lit ensuite l’extrait suivant d’une lettre de M. Cauchy, professeur de minéralogie, etc., à Namur.

Je vous envoie un dessin de grandeur naturelle de deux fragmens de pierre présentant une partie, malheureusement assez petite, d’un fossile qui vient d’être trouvé dans une carrière de calcaire anthraxifère à Erpeut, près de Namur. L’ouvrier qui l’a mise au jour prétend en avoir vu la tête, qui ressemblait, dit-il, à celle d’un gros rat ; mais toutes les recherches que l’on a faites jusqu’à présent dans les débris de la carrière pour retrouver ce précieux morceau ont été inutiles.

Plusieurs membres de la Société ont reconnu dans ce fossile une grande orthocère remarquable par la position de son siphon.

M. Dufrénoy lit une Note sur la position géologique du calcaire de la Brie, et en particulier sur celui des environs du Champigny.

Cette note se termine par les conclusions suivantes :

Les détails que nous venons de donner sur le calcaire siliceux, détails que nous aurions pu multiplier à l’infini, les mêmes superpositions se voyant dans un grand nombre de localités, nous portent à conclure :

Que le calcaire siliceux de Champigny est supérieur à la pierre à plâtre de Paris ;

Qu’il est inférieur au grès marin supérieur ;

Enfin, qu’il dépend encore de la formation gypseuse.

Cette position du calcaire siliceux de Champigny est absolue ; néanmoins il ne serait pas exact d’en conclure que toute la formation du calcaire siliceux de la Brie est plus moderne que la pierre à plâtre.

L’exemple de Saint-Ouen, où l’on voit la partie supérieure du calcaire grossier passer à l’état de calcaire siliceux, nous porte à croire, comme MM. Cuvier et Brongniart l’ont indiqué dans la description géologique du bassin de Paris, qu’une partie du calcaire siliceux de la Brie est parallèle aux silex de Saint-Ouen. Seulement nous regarderions la pierre à plâtre comme accidentelle et enclavée dans le calcaire siliceux qu’elle partagerait en deux parties. Si même on divise les terrains tertiaires du bassin de Paris en deux groupes, dont la ligne de séparation serait le grès marin supérieur, division qui résulte de la comparaison des fossiles et de plusieurs autres considérations, on est conduit à admettre que les formations qui composent l’étage inférieur sont parallèles et peuvent se remplacer. La superposition directe que l’on observe à Montereau du calcaire siliceux sur l’argile plastique et le passage que présentent ces deux formations sont d’accord avec cette idée. Dans cette dernière localité, non-seulement le calcaire siliceux remplacerait le plâtre, mais il représenterait en outre le calcaire grossier.

M. Cordier remarque qu’une petite couche de calcaire à paludines a été signalée depuis long-temps par MM. La Jonkaire, Menard-la-Groye et lui entre les marnes vertes de Montmartre, et qu’il ne faut pas confondre ce calcaire avec le calcaire siliceux proprement dit.

Dans la vallée de la Seine, près de Corbeil, il a trouvé constamment un calcaire siliceux sous les assises gypseuses représentées simplement par des glaises et recouvertes par les marnes à huitres. Entre ces dernières et la meulière de Petitbourg, il y a un calcaire d’eau douce.

M. Underwood donne la coupe d’Essonne, où les marnes supérieures au calcaire siliceux sont couvertes par les sables.

M. de Beaumont émet l’opinion que le grès de Fontainebleau est plus ancien que le calcaire d’eau douce d’Orléans, et qu’il parait comprendre certains grès des plateaux du Mans, les sables de la Sologne, et même les arkoses tertiaires de la Limagne, de manière que le calcaire d’eau douce d’Auvergne serait environ de l’âge de celui de Fontainebleau.

M. d’Omalius demande s’il ne serait pas possible que les marnes de Corbeil fussent, comme celles de Melun, entre deux assises de calcaire siliceux, et que ces marnes, au lieu de représenter celles de Montmartre, formassent une nouvelle assise, supérieure au calcaire de Champigny, et séparée du grès de Fontainebleau par une troisième assise de calcaire siliceux.

MM. Cordier et Brongniart s’accordent pour mettre en parallèle les couches de Saint-Ouen et de Coulommiers, ou abondent les marnes magnésifères.

M. Dufrénoy pense, au contraire, que les marnes de Coulommiers sont supérieures au gypse de Montmartre, et il dit avoir trouvé de la magnésie dans des roches semblables et placées évidemment dans cette position. Il croit qu’on peut séparer les dépôts du bassin de Paris en deux masses, dont la supérieure commence aux grès de Fontainebleau. Il ajoute qu’il est maintenant persuadé que les calcaires d’eau douce du S. O. de la France sont postérieurs à ces dernières roches.

M. C. Prévost revient sur sa théorie pour expliquer la distribution des couches du bassin parisien, et il en met une coupe sous les yeux de la Société. Il pense que les calcaires siliceux supérieurs et d’eau douce, séparés par des couches marines dans la partie nord du bassin, ne le sont pas dans la portion sud-est, et que le calcaire siliceux est un dépôt parallèle aux couches supérieures du calcaire grossier, au gypse et au calcaire supérieur d’eau douce.

M. Brongniart admet l’idée que le gypse de Montmartre n’est qu’un grand amas allongé ou une amande au milieu des marnes et des calcaires d’eau douce.

M. Boubée observe que le calcaire d’eau douce inférieur au gypse se présente constamment avec des caractères minéralogiques et zoologiques bien distincts et dans des circonstances géologiques toutes particulières, qui ne permettent de le réunir à aucune des assises supérieures au gypse. Il lui paraît que les marnes dendritées supérieures au calcaire grossier avec les sables, les grès, la silice non aglutinée, les nombreuses variétés de silex, les argiles magnésiennes et le calcaire compacte d’eau douce mêlé de coquilles marines, forment un étage bien distinct, et caractérisé encore minéralogiquement par la chaux carbonatée spathique inverse et granulaire, la chaux fluatée, le quarz grenu et prismé, le quarz épigène sous diverses formes du gypse, et zoologiquement par le Cyclostoma mumia, les Bulimus atomus et pusillus, et surtout par le mélange de coquilles marines, notamment de Corbules, de Turritelles, de Mélanies marines au milieu des coquilles terrestres. M. Boubée observe que cet étage, le plus riche de ceux qui constituent notre bassin, se présente partout, dans les environs de Paris, au-dessus du calcaire grossier, et nulle part au-dessus de la formation gypseuse, dont il est toujours séparé inférieurement par plusieurs couches marneuses.

On lit des Observations géognostiques faites dans le petit Atlas par M. Rozet :

Le résultat de ces observations est 1o  que le petit Atlas a été reconnu être composé de lias sur une longueur de 30 à 40 mille mètres, à partir de la vallée d’Afroun et marchant de l’ouest à l’est ; 2o  que le terrain tertiaire très-développé au sud de cette chaîne, ne se rencontre qu’en lambeaux sur le versant opposé, mais qu’il existe probablement sous le terrain de la plaine de Metidjah ; 3o  que les roches du lias de l’Atlas prennent, comme dans les Alpes, les caractères des roches de transition.

On continue la lecture du mémoire de M. Botta sur le Liban et l’Anti-Atlas.

M. J. Byerley présente des Considérations sur la précession des équinoxes et l’inclinaison de l’axe de la terre.