C. E. Casgrain : mémoires de famille/1

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In memoriâ æternâ crit justus,
La mémoire du juste sera éternelle.


I


Naissance de M. Casgrain — Son éducation — Son mariage — Lettres de sa mère.


C’est à la demande de votre frère Raymond, mes chers enfants, que j’ai entrepris de tracer ces lignes. Je voudrais par là mettre sous vos yeux les vertus et les exemples que votre père a laissés après lui. Vous apprendrez en les lisant que le bon chrétien fait aussi le bon citoyen.

Votre père Charles-Eusèbe Casgrain est né à la Rivière-Ouelle le 25 de décembre 1800. Il était le cadet des enfants de Pierre Casgrain, seigneur de cette paroisse et de Marie-Marguerite Bonenfant. De plusieurs autres enfants cinq seulement vécurent, savoir : Pierre-Thomas, Olivier-Eugène, Sophie, Justine et Luce. C’est au milieu de cette famille que votre père passa ses premières années. Dès l’âge de dix ans, il fut placé au Séminaire de Québec où il ne resta que peu de temps. Il entra ensuite au Collége de Nicolet, et y continua ses études jusqu’à sa Rhétorique inclusivement. Les succès les plus beaux couronnèrent son travail assidu. J’ai encore en ma possession deux ouvrages qui lui furent décernés en prix : le Télémaque et les œuvres de Boileau. Ce dernier lui fut décerné en Rhétorique.

Mais l’anecdote suivante prouvera encore mieux son application et l’estime que lui portait ses maîtres.

Mgr Plessis, d’illustre mémoire, et dont, comme on le sait, le Collége de Nicolet fut l’œuvre, était venu présider aux examens de cette institution naissante. Après avoir interrogé les élèves et distribué aux écoliers studieux les récompenses alors peu nombreuses, à l’instigation des prêtres qui l’entouraient, il fit venir le jeune Charles et lui posa plusieurs questions relatives à ses études. Charmé des réponses de l’enfant, l’Évêque voulut donner un témoignage éclatant de sa satisfaction. Il envoya cueillir dans le jardin, une branche flexible et garnie de ses feuilles, en fit lui-même une couronne qu’il plaça sur la tête du jeune élève.

Jugez avec quel plaisir l’excellent écolier dût offrir à sa mère ces lauriers si glorieux. Madame Casgrain de son côté garda soigneusement cette précieuse récompense accordée à son fils. Malheureusement après la mort de celle-ci, arrivé le 13 mars 1825, Monsieur Casgrain votre grand père ayant fait faire encan de ses meubles, l’avait fait mettre de côté pour m’en faire don, et quand il voulut me la présenter on s’aperçut qu’elle avait disparu. C’est alors qu’on me raconta cette anecdote que l’humilité de votre père a toujours tenue secrète. C’est à cause de cette ignorance bien involontaire de ma part, que je n’ai pu sauver cet hommage rendu à la vertu et à diligence de votre père.

Il était âgé de dix-huit ans lorsqu’il fut atteint d’une pleurésie qui lui survint à la suite d’une traversée du lac Saint-Pierre, qu’il fit monté sur ses patins. Il fut obligé d’interrompre ses études et on le ramena le même hiver au sein de sa famille, où il fut l’objet des soins les plus tendres. Ce fut un chirurgien de la marine, le docteur Donnelly, qui le traita ; il le soigna, et lui appliqua les ventouses dix-sept fois. On a dit qu’il l’avait soigné comme il l’aurait fait d’un matelot. Toujours est-il que depuis cette époque, la santé de votre père s’est altérée, et sa complexion fut toujours délicate jusqu’à sa mort.

Les médecins lui prescrivirent aussitôt après son rétablissement de faire un voyage sur mer. Il se rendit l’été suivant à Halifax, où il reçut de sa mère, qui ne le perdait jamais de vue, la lettre suivante, où elle lui annonce le mariage de sa sœur Luce, avec M. Philippe Panet, alors avocat, et depuis juge à Québec.[1]


« Rivière-Ouelle, 19 juillet 1818.
« Mon cher fils,

« Depuis que j’ai reçu ta lettre datée du 27 juin, qui était à l’adresse de Justine, j’ai désiré t’écrire sans pouvoir trouver le temps de le faire. La diversité d’occupations qui m’en ont empêché, exige pour ta satisfaction et la mienne que je t’en fasse un détail, d’autant plus qu’il est aussi intéressant pour toi que pour le reste de la famille : je te préviens que cela va être long ; mais dans la persuasion où je suis que cela ne t’ennuiera pas, je vais donc commencer par te dire que ta chère Luce est mariée du 14 du courant. Cela va sûrement te surprendre, car tu ne pensais pas plus que nous que ce serait si tôt. Je vais te dire ce qui en est. C’est le départ de Monseigneur[2] qui, comme tu ne l’ignores pas, doit rester en ville tout le temps que Monseigneur Plessis sera absent. Tu peux t’imaginer aisément la peine que nous cause son absence. Nous avons profité du peu de temps qu’il est resté à la Rivière-Ouelle pour ne pas le priver, ainsi que nous, du plaisir qu’il avait de faire ce mariage, qui, comme tu n’en doutes pas, était autant de son goût qu’il l’est du nôtre. Nous avons eu le plaisir d’y voir la plus grande partie de la famille de M. Panet, c’est-à-dire sa maman, M. Louis, M. Charles, M. LeBourdais, Mlle Rose. Nous n’avions d’étrangère que Mme Wyss.

« Cher ami, ce jour qui était pour moi si beau, comme pour toute la famille, a souvent été interrompu par cette idée, qui partout me poursuivait : il me manque ici mon cher Charles ; que ne peut-il partager la joie que nous avons de l’heureux choix qu’a fait sa sœur ! Je t’assure que souvent je me trouvais attendrie en me faisant cette réflexion, et j’avais bien de la peine à le dissimuler, et je ne doute pas que dans la famille plusieurs ont pensé ainsi que moi, sans oser me le dire, sachant bien ce que je pensais. La chère Luce m’a dit cependant : Maman, si ce cher petit Charles était ici, que je serais contente ; et alors je pensai à la gageure que vous aviez faite tous deux. Je lui dis s’il était ici il s’acquitterait, car il éprouverait une grande satisfaction en perdant ainsi son argent, lorsqu’il verrait son tout aimable beau-frère. Il faut te dire que nous avions fait les préparatifs de la noce sans être sûrs où on pourrait dîner ce jour-là ; car nous ne savions si Émilie[3] attendrait que cette cérémonie fut faite, avant de faire la sienne, mais le tout s’est passé tel qu’on pouvait le désirer ; elle a passé la journée gaiement avec nous, aidant à tout ce qu’elle pouvait, tel qu’elle avait coutume de le faire, et le lendemain matin, elle m’a dit : vos affaires sont finies, je crois qu’il est temps que je fasse les miennes ; à la vérité, elle ne s’est point trompée, car à deux heures et demie, le 15, elle nous a fait politesse d’un gros garçon, qui est très-bien portant, et elle est très-bien. J’ai eu le plaisir d’être la marraine avec M. Panet, il se nomme Pierre-Philippe ; imagine-toi, d’où tu es, voir ton Papa, et ton frère ; la joie où ils sont d’avoir ce gros garçon. Vois si, depuis un certain temps, j’ai dû être occupée, et que j’avais des raisons qui m’empêchaient de t’écrire aussitôt que je l’aurais désiré. J’attends avec impatience une des tiennes. Je désire savoir comment tu es et le temps que tu as mis à te rendre, si tu te trouves mieux, aussi si tu te plais bien, tout cela m’intéresse, cher fils ; ne manque pas de m’informer de tout, la manière dont tu te comporteras, ne trompera pas mon attente, au moins j’ose l’espérer. Ton papa te fait ses embrassements les plus tendres, ainsi que la famille. Madame Panet, quoique sans cesse occupée des petits soins et attentions, qu’elle doit à son cher époux, n’oublie pas son cher Charles, elle me charge de beaucoup de choses qui te regardent, et que je ne puis t’écrire ; je te dirai seulement que ton papa vient de lui payer la gageure, qu’elle a double plaisir et profit à gagner. Crois-moi, cher fils, ta tendre et affectionnée maman.

« Marie Bonenfant Casgrain. »


Il ne faut pas s’étonner de rencontrer peu de style, dans cette lettre de Madame Casgrain ; il y a plutôt lieu d’en admirer les beaux sentiments, quand on songe que cette dame a eu seulement l’avantage de fréquenter, pendant une année ou deux, le couvent de Saint-François-du-Sud, l’un des premiers que les Sœurs de la Congrégation aient établi dans le district de Québec.

À mesure que j’avancerai dans ce récit, je citerai quelques autres de ces lettres.

Pendant le séjour que votre père fit alors à la Rivière Quelle, il y avait chez M. Casgrain, une jeune convertie, Mlle Bradford, fille d’un ministre protestant. Elle était entrée comme postulante chez les Ursulines de Québec, mais le défaut de santé l’obligea de sortir ; et pour se rétablir, elle fut placée chez Madame Casgrain. Quatre ans plus tard, cette même personne ayant été recommandée à Madame Ross Lewin, où je demeurais alors, cette dernière la prit chez elle.

Votre père commença l’étude du droit aussitôt après son rétablissement en 1820. Il entra en qualité de clerc chez M. Moquin, avocat célèbre de Québec. Québec était encore une petite ville ; tous ses citoyens se connaissaient de vue, et je crois pouvoir dire que tous les Québecquois m’étaient à peu près connus. Il y avait dans la classe élevée trois jeunes gens qui se distinguaient entre tous les autres par la régularité de leur conduite et par leurs bonnes manières ; ils appartenaient à des familles aisées. Leurs noms étaient : Wolsey, Lindsay et Casgrain, et comme on en parlait souvent chez Madame Ross Lewin, dans l’intimité de la famille, Mlle Bradford, cette jeune convertie que j’ai nommée plus haut, faisait souvent l’éloge des vertus de M. Charles Casgrain qu’elle avait été à même d’admirer pendant sa maladie. Elle s’étendait surtout sur sa patience au milieu des souffrances qu’il endurait ; et sur la vive affection qu’il témoignait à sa mère, et dont il était payé de retour, comme le prouvent les lettres que je vais citer. Celles-ci forment la correspondance qui s’établit entre Madame Casgrain et son fils, pendant les quatre années de sa cléricature, depuis 1820 jusqu’à 1824. Si elles ne sont pas des chefs-d’œuvre de littérature, elles le sont du moins de sentiments. Celle-ci par exemple :


« 26 décembre 1820.
« Mon cher fils,

« Je ne doute nullement du plaisir que tu as éprouvé au retour de ta sœur. J’ai bien pensé que leur absence te faisait trouver le temps long, car je sais que tu veilles si bien à tout lorsqu’ils n’y sont pas, que ce trouble te fait désirer avec plus de hâte leur retour ; et aussi l’idée de les savoir auprès de la famille, sans pouvoir partager ce plaisir, te faisait faire des réflexions un peu sérieuses. Les nouvelles verbales qu’ils t’ont données sur l’état de ma santé ne sont point exagérées, je suis toujours dans un état de faiblesse qui pourrait bien décourager plus brave que moi, mais je te dirai que je m’habitue à tout, aussi ne le dois-je pas ? puisque c’est la volonté de Dieu. Mon sort serait peut-être plus à plaindre, si, avec l’aisance dans laquelle je pourrais vivre, je jouissais d’une bonne santé. J’aurais tant de plaisir à aller vous voir de temps en temps ; il faut que j’en sois privée, que je me contente seulement d’entendre parler de vous. Aussi, mon fils, je ne puis recevoir d’adoucissement à ce que j’éprouve que lorsque je reçois vos lettres, que je les lis et relis avec tant de plaisir. Je n’ai aucun doute, ô le plus tendre des fils ! vu le pouvoir qu’a sur toi l’amour maternel, que tu n’adresses souvent et avec ardeur des vœux au Ciel pour ma conservation. Oui, mes chers enfants, je puis le dire sans me tromper, que vous êtes tous pénétrés du même sentiment. Que peut désirer de plus une mère qui reçoit de ses enfants, les mêmes tendresses qu’elle est prête de leur faire éprouver jusqu’au dernier moment.

« C’est donc avec raison, cher fils, que je dis que je puis jouir de tout, excepté de la santé ; que je dois compter pour rien à mon âge ; l’espoir que tu as de mon rétablissement est bien trompeur. Dieu seul le sait, et en disposera à sa volonté. Mais c’est Eugène, ce cher Eugène, s’il était privé de moi, à l’âge où il est ; ô mes chers enfants ! lui seul serait le plus à plaindre, mais que dis-je ? il le serait si vous étiez capables d’oublier la plus tendre des mères, ce que je ne crois pas, cher fils. Je crains de t’affliger, passons à un autre sujet moins triste pour toi, qui cependant suivant ce que tu me dis, touchant ta profession, paraît t’inquiéter. Il est bien vrai qu’en considérant le nombre qui embrasse cette profession, cela paraît terrible, et peut donner sujet de réfléchir à celui qui a à cœur de faire quelque chose. Mon fils, c’est dans tous les états que les jeunes gens de ce temps veulent embrasser, ils se trouvent en foule. D’où vient cela ? Il faut considérer aussi que la population est si nombreuse, c’est ce qui occasionne cela. Il faut considérer aussi, que le plus grand nombre ne réussit pas, pourquoi ? Tu le vois tous les jours comme moi, aussitôt qu’ils ont cette profession, ils s’imaginent que tout est à eux ; ils ne s’inquiètent pas du service de Dieu, ils s’abandonnent à tous les excès, ne font aucun calcul de leurs dépenses avec leurs revenus, et en bien peu de temps ils se trouvent hors d’état de paraître parmi les honnêtes gens sans rougir. Oh ! mon fils, que ce malheureux nombre, qui est sans contredit le plus grand, ne t’épouvante pas ; la conduite que tu as tenue jusqu’ici ne doit pas te faire craindre leur sort. Suis, cher enfant, les sentiers que je me suis fait un devoir de te tracer, continue à faire ton devoir envers Dieu ; sers le de tout ton cœur, et ne crains rien. Il n’abandonnera pas jamais ceux qui le servent avec ardeur. Comme tu l’observes avec tant de justesse : S’il n’abandonne pas les petits oiseaux qui ne sèment pas à plus forte raison n’abandonnera-t-il pas des créatures qui l’aiment et le servent avec fidélité. Il a déjà pourvu à ton nécessaire en nous faisant les dépositaires d’une raisonnable somme destinée à ton besoin ; et ta conduite à l’avenir, peut, je le sais, t’en procurer davantage. Toi seul, peux décider cela à ton gré, car il ne faut pas croire, comme quelques-uns le disent, qu’une demoiselle qui peut prétendre à quelque chose du côté de sa famille, ne soit point pour cela propre à faire une femme de ménage. Je ne suis pas du tout de cet avis, je te rapporterai à ce sujet ce que disait souvent le père Têtu : qu’un petit tison seul était d’abord consumé, mais que lorsque l’on pouvait en mettre deux ensemble, cela était immanquable. Tu sais que les vieux français se trompent rarement, on en voit assez souvent la preuve. Ne vois-tu pas aussi que bientôt on va chasser de la ville tous ces vieux avocats ; il en faudra pour faire des juges, des greffiers, lorsque nous aurons des juridictions dans les comtés, cela fera place à tous les jeunes marmots. Je trouve fort à propos cette assemblée qui se fait pour les jeunes gens de votre profession ; il doit sans doute en résulter un grand avantage. Quant à ce que tu me dis pour cette assemblée, tu sais mieux que moi si cela est à propos ; tu sais que ton papa ne t’a jamais refusé ce qui pouvait t’être de quelque avantage : ainsi fais ce que tu voudras. Ton papa arrive de Kamouraska, où il a passé deux jours ; je me suis bien ennuyée, en son absence, mais il était si fatigué de l’assiduité habituelle de la maison, que j’étais bien aise qu’il prit ce temps, pour se délasser. Je ne sais vraiment ce que je ferai lorsqu’il ira en ville… »

Madame Casgrain savait dans l’occasion mêler le badinage à ses conseils, c’est ainsi qu’elle écrivait :

« L’occasion imprévue de Monseigneur de Saldes, survient pour moi très à propos, car j’en cherchais une pour t’écrire… .......... Je suis aise que le froid que tu as enduré, ne t’ait pas mis pire ; prends bien garde à toi, aies soin de l’enfant à maman, quoiqu’il soit un coquin de voleur ; elle en a toujours compassion, dans l’espoir qu’il se corrigera. Sûrement que tu as eu du remords lorsque tu as sorti de ta voiture mon morceau de toile, que je ne t’avais pas donnée, mon coquin. Mais, me diras-tu, c’est toujours le vieux papa qui paye, car il faudra pour cela qu’il achète une couverte de plus… »

Et plus tard, elle racontait un petit accident arrivé à son frère Eugène :

« 1er janvier 1822.
« Cher Charles,

« Je suis seule ce soir avec Marraine[4] et Eugène. Ton papa est allé faire ses visites ; je ne sais où il passe la veillée. Pour me désennuyer, je me suis décidée de t’écrire : j’ai ramassé toutes les vieilles plumes de l’année passée, n’ayant personne pour m’en tailler, ni de canif, de sorte qu’il faut que je me contente de ce que j’ai ; mais pour me dédommager, je me sers de beau papier. Jusqu’ici je trouve que ça va assez bien, gare à la suite.

« Je ne sais si tu as appris ce qui est arrivé à Eugène, chez ton oncle Têtu. Je t’assure qu’à son arrivée, j’ai eu plus de chagrin que de joie. Il prévoyait bien d’avance que ce serait le cas. Il faut te dire qu’étant chez son oncle, il lui a pris fantaisie d’avoir de la poudre pour s’amuser ; il s’est adressé à maître Provost qui, à force des sollicitations, s’est laissé gagner. Il lui en a donné un cornet assez considérable. Il a monté en haut avec, et a été assez rusé de vider cela sur le poële qui était rouge. Imagine-toi que, dans un instant, tout lui a sauté à la figure, et lui a brûlé le nez jusqu’entre les deux yeux, et le tour du bec. Ses yeux n’ont rien attrappé, excepté que le tour a bien grillé. Sa pauvre tante, comme tu peux le croire, y a bien apporté tous ses soins, mais elle ne pouvait le guérir en si peu de temps ; de sorte qu’elle me l’a envoyé par Joseph Lévêque, qui en a bien eu soin. Mais le froid lui avait fait enfler le visage, et pousser une croûte si noire que c’était affreux de le voir. Je ne pouvais imaginer ce qu’il avait, et il ne pouvait me le dire tant il pleurait. J’avais un grand mal de tête lorsqu’il est arrivé, je t’assure qu’il s’est passé bien vite ; et quand il m’a dit que c’était la poudre qui lui avait fait cela, j’ai d’abord cru qu’il resterait marqué, et toujours le visage noir. Cela m’inquiétait ; je me suis mise à le débarbouiller, à le savonner souvent, et cette croûte là a presque toute tombé et il ne lui est pas resté un seul grain de poudre dans la figure..........

« .......... Crois qu’en cette nouvelle année, mon désir est toujours le même pour toi et toute la famille. Que Dieu répande sur vous ses bénédictions, et que vous soyiez toujours fidèles à ses grâces. Il ne vous abandonnera jamais. Voilà les vœux que forme de tout son cœur la plus tendre et la plus affectionnée des mères. »


Comme on peut le voir par la lettre suivante, Madame Casgrain ne manquait jamais l’occasion de donner quelques bons conseils à son fils.

« .......... Je suis loin de douter que c’est un effet de ta négligence, si tu ne m’écris pas souvent. Je sais trop bien que tes occupations y mettent obstacle ; ne t’en détournes jamais pour moi. Rien ne me fait plus de plaisir que de savoir que tu t’acquittes de ton devoir avec fidélité car en remplissant ses obligations, on s’acquitte aussi avec Dieu qui veut qu’il en soit ainsi. Quoique je t’informe que je suis bien mieux, je ne chante pas pour cela victoire. Je suis loin d’être aussi bien que tu parais le croire ; mais je me trouve contente, n’importe dans quelle situation je me trouve..........

« .......... Je n’ai que faire de te dire que je ne t’oublie pas, tu en es persuadé. Tu dois connaître la place que tu occupes dans mon cœur, ta manière d’agir ne peut que la conserver. Je prie Dieu tous les jours que tu continues à t’acquitter envers lui de tous tes devoirs de religion, afin que tu avances en proportion de ton âge dans la vertu. De même, cher fils, un jeune homme peut éviter les dangers auxquels il est souvent exposé, et faire la consolation de ses parents, toi qui a tant cela à cœur.......... »

Voici encore ce qu’elle lui écrivait au sujet d’un voyage aux États-Unis, qu’il était sur le point de faire :

« Cher Charles,

« J’ai perdu tout espoir de te voir avant ton voyage. J’espère que Dieu nous conservera tous deux, et qu’il permettra que nous ayons encore ce plaisir. Si je ne te connaissais pas aussi prudent que tu l’es, je te ferais bien des recommandations, mais je m’en dispense pour cette raison. Je te dirai seulement de bien éviter les endroits où il court quelques maladies, car les étrangers sont toujours sujets plus que les autres à gagner les fièvres malignes qui souvent ravagent ces endroits. Je ne doute pas que ton premier soin, avant ton départ, soit de faire visite à ton directeur, te mettant entièrement entre les mains de la Providence. Cette Providence qui règle jusqu’au moindre instant qu’elle nous laisse vivre, sait aussi nous garantir de tous les écueils auxquels nous sommes sans cesse exposés, surtout à ton âge, cher ami, où la jeunesse a toujours besoin d’être en garde, et doit éviter ceux dont elle ne connaît pas les mœurs, car souvent les apparences peuvent tromper. Mais, mon cher ami, tu as des compagnons pour voyager qui me font plaisir ; car étant seul, tu serais peut-être forcé de faire connaissance avec quelques-uns, et tu le regretterais par la suite… »

Dans la lettre suivante, Mme Casgrain rend hommage à la bonté de cœur de son fils, qui en avait appelé à son père, en faveur d’un serviteur qui avait encouru la disgrâce de celui-ci. Elle commence ainsi :

« Pardonnez-nous nos offenses, comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensé.

« Crois-tu, cher Charles, qu’en réfléchissant sur cet article un chrétien peut s’y refuser ? Ces mots adressés à un père de la part de son fils, peuvent-ils essuyer un refus ? Non, cher ami, il lui faudrait un tout autre cœur, que celui qu’il possède. Tu le sais, il n’a jamais été sourd à la voix du malheureux. Jamais, à ma connaissance, il a refusé de le soulager dans sa misère. Il aurait sans doute, comme tu l’observes, de grandes raisons de plaintes, contre ce pauvre John ; mais il sait mettre tout cela de côté, et considérer que sous le rapport de la religion, il doit faire pour lui plus qu’il ne ferait pour tout autre, vu qu’étant avec nous, il a embrassé la religion catholique. Nous devons avoir soin qu’il ne s’écarte pas, et ce serait bien douteux s’il venait à s’éloigner de nous, quoique jusqu’ici il ait bien été exact. Qui sait s’il ne retomberait pas dans l’erreur, dans le but d’obtenir quelques secours des protestants, s’il se retrouvait parmi eux. Tu ne devais pas, mon cher fils, douter un instant qu’il ne vint à obtenir son pardon, car si tu es attendri à la vue de ce misérable qui implore ton secours, d’où te viennent ces sentiments ? où les as-tu puisés ? Ce sont ceux d’un père que je suis bien aise de voir revivre en toi. Je t’assure que ce n’est pas lui qui a donné les lettres ; il s’est tenu dans la chambre du bâtiment, et les a envoyé porter. Il ne savait comment faire son entrée.

« Mais le maître-d’hôtel, M. Rémy,[5] était bien prêt à l’aller chercher, car il était déjà las de frotter les couteaux, et le désirait avec impatience. Il n’était pas attendu de tout le monde avec tant de plaisir, mais cela ne m’inquiète pas. Je saurai bien arranger cela par la suite. Ce retour me rappelle l’histoire de l’enfant prodigue à la maison de son père, et je prendrai de là occasion de le reprendre plus facilement que je ne l’aurais pu faire avant ; je crois qu’il recevra avec soumission ce que je lui dirai. L’obligation qu’il a de ce que tu as fait pour lui, lui paraît au-dessus de toute expression, ainsi que pour les bontés qu’a eues M. Panet. Je ne puis écrire à Luce cette fois. Je suis contente qu’elle soit si bien. Je l’embrasse à plein ainsi que son cher bon mari. Je suis toujours ta tendre maman.

« 4 novembre. »


Ces lettres, mes chers enfants, suffisent pour vous faire connaître jusqu’à quel point Mme Casgrain aimait et estimait votre père.

Je connaissais donc de vue et de réputation le jeune Casgrain. Je le voyais régulièrement le dimanche aux offices de la cathédrale, et souvent à la basse-messe pendant la semaine. Il était toujours d’une mise très propre, et en quelque sorte recherchée, sans luxe cependant. Comme ses parents pourvoyaient amplement à ses dépenses, lui fournissant cheval et voiture, on était surpris de ne lui voir jamais ni épingles, ni autres bijoux, tels que les jeunes gens en portaient. La première et seule épingle que j’aie vue à sa cravate a été faite avec mes cheveux, quelque temps avant notre mariage. Il l’a gardée pendant de longues années.

Voici une lettre que lui écrivait sa mère, pour le presser de s’établir ; elle fera voir avec quelle confiance elle traitait avec lui.

« Cher Charles,

« Ton papa ne pouvait m’apprendre aucune nouvelle en arrivant ; il disait qu’il n’avait rien de drôle à me dire, mais il m’a prouvé le contraire, en me disant à la suite, que tu avais en ta possession une somme de £150 venant de l’ami McCallum ; que tu avais si bien su t’y prendre, que l’affaire s’était arrangée à merveille : et qu’il admirait quelle précaution tu avais prise pour ne point manquer ton coup. Il dit que tu es un homme très-adroit, lorsqu’il s’agit de tes intérêts ; je m’en aperçois comme lui, mais je ne saurais te blâmer, tout au contraire je ne puis que t’approuver en cela. Cet esprit de commerce et de spéculation fait voir combien ces petits Casgrain ont de ressemblance avec leur père. Ils en tiennent pour la vivacité, et pour le soin qu’ils ont de ce qu’on leur promet ; ils n’aiment pas à laisser languir les choses. Cela prouve une vraie ressemblance de caractère. Cette somme, m’a-t-il dit, va être appliquée sur des meubles de ménage ; cela est très-juste, puisque ton père la destine pour cet objet, et je n’ai point d’inquiétude de quelle manière et avec quelle économie cet emploi sera fait. Il faudrait ne point avoir l’avantage de te connaître pour en juger mal. Tu as par avance loué une maison pour y placer tes meubles, tout cela sont de bonnes précautions, car il n’est plus temps de chercher lorsqu’on a besoin : c’est une raison de payer plus cher. Je vois que tu n’es pas de ces gens là, c’est fort bien ; mais, mon fils, ce n’est pas tout. Parlons sérieusement, laissons le badinage. Une chose m’inquiète, c’est lorsque tu seras chez toi, combien plus tu auras à prendre garde pour les compagnies que tu auras à fréquenter. Tu as un petit nombre d’amis choisis qui sûrement ne t’oublieront pas, et avec qui je te conseille de vivre en bonne intelligence. Mais tu dois prendre garde, cher fils, qu’il ne s’en glisse pas quelques mauvais parmi les bons, qui sous prétexte que ce sera un ménage de garçon, on pourra y aller plus librement. Ô ! cher fils, ce sera à toi de bien veiller à cela, tu sais qu’une brebis galeuse peut gâter un troupeau, et on peut, je crois, à cette occasion appliquer la même comparaison. C’est à quoi, je me flatte, tu auras soin de veiller bien, pour éviter ce qui arrive aux autres en pareil cas. Car, mon fils, nous ne pouvons assez compter sur nos propres forces pour croire que ces choses ne peuvent arriver. Nous sommes tous si faibles que nous devons nous tenir sur nos gardes, et demander à Dieu ses grâces :

« Lui seul est notre force et notre unique appui. »

« Ah ! si, dans ce petit espace de temps qui reste pour achever ta cléricature, il s’offrait un objet digne de fixer ton attention, crois que je n’essayerais point à y mettre obstacle ; tout au contraire, j’en serais bien charmée, car je suppose bien que tu ne prétends pas rester seul. Mais je crois que dans ce moment-ci, c’est à quoi tu penses le moins : tu es trop occupé de l’arrangement de ton ménage. La marquise t’a échappé, il lui fallait un anglais ; elle ne prouve pas par son mariage qu’elle était bien attachée à la religion, puisqu’elle a fait un si mauvais pas. Je n’ai pu m’empêcher de frémir lorsque j’ai vu par la Gazette qu’elle était mariée par la main du ministre.

Je me rappelle que tu me disais dans une de tes lettres à laquelle je n’ai pas encore répondu, que tu avais grand besoin de mes avis. Cher fils, de quoi suis-je capable autrement que de t’aider de mes faibles prières. Je t’assure que si Dieu veut les exaucer, les choses iront pour le mieux. Tu n’as pas oublié les entretiens que nous avons eus tous deux ensemble. Tu m’as toujours témoigné assez de respect pour empêcher que je me permette de croire que tu puisses avoir mis mes raisons en oubli. Je suis sûre que les avis sincères et tendres que je t’ai donnés ont été reçus avec attention et reconnaissance. Tes sentiments envers moi m’en ont toujours rendu un fidèle témoignage. Ainsi tendre et affectionné fils, Dieu veillera à tout. Reposons en lui toute notre confiance : je le prie tous les jours, ce Dieu de bonté, de vouloir guider tes pas. Oh ! mon enfant, dans la dernière communion que j’ai eu le bonheur de faire, mercredi, la veille de Noël, j’ai prié pour vous tous, et en particulier pour toi, me reposant entièrement sur ce que Dieu dit : que plus nous lui demandons ses grâces en cet heureux moment, plus on lui devient agréable. Ah ! quel pressant besoin en ai-je moi-même, et c’est avec une entière confiance que je m’adresse à ce Dieu de bonté, malgré mon indignité et mes misères, considérant que ce père tendre est toujours favorable à ceux qui ont recours à lui. Ah ! cher enfant, que les sentiments chrétiens soient toujours la règle de notre conduite, c’est le seul sentier que nous ayons à suivre. Si ma plume était capable de te peindre ici ce que mon cœur ressent, tu verrais avec quel attachement je suis ta tendre mère,

« Marie Bonenfant Casgrain. »

« Tu n’as pas plus oublié que moi, je pense, qu’aujourd’hui le 28 décembre est le jour de ta naissance. »

M. Casgrain entrait alors dans sa vingt-quatrième année. Ce fut dans le mois de mai suivant que nous fîmes connaissance. Voici dans quelle occasion : les citoyens de la ville de Québec donnaient un bal d’adieu au gouverneur-général, lord Dalhousie, avant son départ pour l’Angleterre. Je reçus une invitation, je m’y rendis. Il y avait foule. Les dames les plus âgées descendirent les premières pour le souper. Quand le tour des jeunes personnes arriva, je descendis avec mon partner. Nous trouvâmes beaucoup de confusion aux tables. Votre père étant assis vis-à-vis de moi, s’aperçut que je manquais d’assiette ; il s’empressa de m’en donner une, et en me l’offrant, de m’adresser quelques mots. La conversation s’engagea, et il me fit la politesse de boire à ma santé, comme c’était l’usage d’alors, puis nous nous séparâmes dans les meilleurs termes ; et le dimanche suivant il me fit sa première visite. Nous continuâmes à nous voir sur le même pied d’intimité, jusqu’au mois de septembre suivant, quand mon père vint à Québec, ayant été nommé arbitre par la province du Haut-Canada, pour établir la part qu’elle devait avoir dans les revenus de la douane. M. Casgrain profita de cette occasion pour lui faire connaître ses vues. La réponse de mon père lui fut favorable, et notre mariage fut fixé au 26 du mois d’octobre suivant. À cette occasion sa mère lui écrivit la lettre suivante qui fut sa dernière :

« Cher et tendre enfant,

« Je ne saurais me dispenser de t’écrire quelques mots en réponse aux tiennes. La faiblesse où je suis me prive de le faire plus souvent. Mais, cher ami, n’attribue pas mon silence à aucune autre chose. Tes lettres sont pour moi de nouvelles preuves de la sincérité avec laquelle tu t’es toujours comporté à notre égard ; et tu vois que Dieu te favorise puisqu’il a permis que tu aies fait un choix si à ton goût, d’une demoiselle si aimable et si vertueuse. Ah ! n’en doute pas cher fils, c’est cette Providence qui veille sur tout, qui en nous procurant les besoins de la vie, veut encore nous y faire un sort heureux lorsque nous nous confions entièrement à elle. Rassure-toi de la crainte où tu parais être, que je me sois privée de mon sett,[6] pour te rendre maître d’en disposer en faveur de Mlle Baby. C’est avec plaisir que je te l’ai envoyé..........

« Cher Charles, je ne désire pas moins que toi un temps et des chemins favorables après votre union pour avoir le plaisir de te voir avec celle que Dieu t’a destinée, oh ! oui, qu’elle se joigne à la famille, et qu’elle vienne partager la tendresse avec laquelle je vous ai toujours tous chéris. Je termine ici ma lettre en te souhaitant tout ce que la tendresse maternelle peut et doit faire en cette circonstance, pour un enfant de qui la soumission et la tendresse ont toujours été la règle de conduite. Le jour de votre mariage, nous ne manquerons pas de prier pour vous : tous ceux de la famille qui pourront assister à la messe n’y manqueront pas. Crois-moi, cher fils, ta tendre et affectionnée maman.

« 20 octobre. »

Monseigneur Plessis bénit notre mariage qui fut célébré à la cathédrale de Québec, à six heures du matin, le 26 octobre 1824. Nos plus proches parents furent les seuls invités : du côté de votre père : M. Casgrain votre grand-père, M. et Mme Panet. De mon côté : mon père, mon frère aîné Jacques et ma tante Allison. Mgr Plessis, accompagné de son secrétaire, M. l’abbé Portier, nous fit l’honneur d’assister au déjeuner que nous prîmes à la résidence de mon mari, rue des Carrières.

À son retour à l’évêché, Monseigneur dit à une dame de la ville :[7] « Je viens de faire un mariage comme je voudrais qu’il s’en fit souvent. » Je crois que c’est le dernier qu’il ait fait, il est mort l’année suivante.

Je dois m’arrêter ici pour remercier Dieu de m’avoir choisi un mari entre mille, tel qui m’en fallait un pour traverser heureusement le chemin de la vie. Élevée en enfant gâtée par une excellente parente, ma tante Ross Lewin, je n’avais aucune notion d’économie domestique. Le ciel l’avait abondamment pourvu de cette qualité indispensable dans un ménage, et je me suis toujours appliquée à mettre ses leçons en pratique dans le but de lui être agréable. Persuadée depuis longtemps que sans piété on ne saurait être heureux dans le ménage, j’avais fermement résolu de n’épouser qu’un chrétien fervent. J’avais horreur d’un homme adonné à l’ivrognerie, et je disais en riant, que je n’épouserais qu’un jeune homme qui ne boirait que du lait ; et en cela comme en beaucoup d’autres sujets, le ciel m’a exaucée.

Comme votre père avait hâte de me présenter à sa mère, nous partîmes le lendemain de notre mariage pour nous rendre à la Rivière-Ouelle. Ce fut un festin continuel tout le long de la route ; car M. Casgrain votre grand-père, parti la veille, nous avait annoncés partout. Nous arrêtâmes à St. Michel, chez le docteur Maguire, marié à Mlle Justine Casgrain ; à St. Thomas, chez M. et Mme François Têtu ; à St. Jean, chez M. De Gaspé, mon cousin par son mariage avec Mlle Allison ; à St. Roch, chez le docteur Donnelly. Nous arrivâmes à la Rivière-Ouelle quatre jours après notre départ de Québec. Mme Casgrain me reçut dans ses bras, elle était malade depuis longtemps, et sentait que sa fin n’était pas éloignée. Son émotion fut telle qu’elle me dit, en me serrant sur son cœur : « Il y a des larmes de joie, comme il y en a de causées par la douleur. » Je compris avec satisfaction ce qu’elle voulait dire. Nous restâmes six jours auprès d’elle, et je connus alors pour la première et dernière fois cette femme aimante, distinguée entre toute par sa piété, son jugement droit et élevé. Elle aimait son fils Charles avec passion. Je l’ai vue, appuyer sa tête sur les genoux de celui-ci et lui adresser mille expressions de tendresse.

Votre père a hérité de toutes les belles qualités de sa mère, et c’est lui qui de tous ses frères lui ressemblait le plus par son caractère.

La mort de Mme Casgrain, arrivée le 13 mars suivant, plongea ses enfants dans la plus profonde tristesse ; elle était âgée de 48 ans et mourut en prédestinée, emportant avec elle l’estime et les regrets de tous ceux qui la connurent et surtout des pauvres dont elle était la bienfaitrice. Rien ne rappelle maintenant Mme Casgrain au souvenir de la génération qui s’élève. La demeure même qu’elle a habitée a été démolie. Mais en recopiant ces lettres, qui sont tout ce qui reste d’elle, afin de les transmettre à mes enfants, pour leur édification et leur profit, je sens un véritable bonheur à faire voir combien elles vérifient ces paroles du Saint roi David, que j’ai mises en épigraphe au commencement de ces mémoires : « In memoriâ æternâ erit justus », La mémoire du juste sera éternelle.



  1. Nous nous permettons dans la citation de ces lettres de corriger quelques fautes d’orthographe, mais les phrases sont toujours intégralement les mêmes.
  2. Mgr Panet résidait à la Rivière-Ouelle. M. Philippe Panet était son neveu.
  3. Madame Pierre Casgrain.
  4. Marraine était une servante attachée à la maison depuis longtemps, qui avait élevé Madame Casgrain, et qui était la marraine de sa fille Justine, Madame Beaubien.
  5. Autre serviteur de M. Casgrain.
  6. Parure en brillants donnée par Mme Casgrain.
  7. Madame de Vaux.