Cent Ballades (Christine de Pisan)/Ballade X

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Cent Ballades, Texte établi par Maurice RoyFirmin Didot (p. 11).


X



Se Fortune a ma mort jurée,
Et du tout tasche a moy destruire,[1]
Ou soye si maleürée,
4Qu’il faille qu’en dueil vive et muire,
Que me vault donc pestrir ne cuire,
Tirer, bracier, ne peine traire,
7Puis que Fortune m’est contraire ?

Pieça de joye m’a tirée,
Ne puis ne fina de moy nuire,
Encore est vers moy si yrée,
11Qu’adès me fait de mal en pire,
Quanque bastis elle descire,
Et quel proffit pourroye attraire,
14Puis que Fortune m’est contraire ?

Son influance desraée[2]
Cuidoye tous jours desconfire,
Par bien faire a longue endurée.
18Cuidant veoir aucun temps luire
Pour moy qui meseür fait fuire.
Mais riens n’y vault, je n’y puis traire,
21Puis que Fortune m’est contraire.[3]

  1. A2 Ou du tout
  2. A1 S. i. desirée
  3. Note Wikisource : voir un erratum en p. 319.