Cham - Albums du Charivari/Un peu de tout

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Journal le charivari (4p. 227--).

Page de couverture de l’album "Un peu de tout"

UN PEU DE TOUT

Album
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par Cham
par Cham


Fin de l’âge de fer, retour de l’âge d’or.


À LA LIBRAIRIE NOUVELLE, BOULEVARD DES ITALIENS, 15 ;
ET AU BUREAU DU JOURNAL LE CHARIVARI,
16, RUE DU CROISSANT.
Paris. Typographie Henri Plon, rue Garantière, 8.

— Bonjour, cher ami ! la santé est bonne, j’espère ? Ah dame ! s’il vous arrivait quelque chose maintenant, je serais aussi vexé que le jour où je vous ai manqué avec ma carabine.

— Cher Écossais, si les Russes vous payent moins souvent à boire qu’à nous autres, c’est à cause de votre costume, ils s’imaginent que vous n’aimez pas vous donner des culottes.

— Qui vive ?

— Russe.

— Passez au buffet.

Soldat français rentrant dans son cantonnement après une permission de trois jours passés dans le camp russe.
Ce qui s’appelle avoir confiance dans l’armistice.

— Nom d’un petit bonhomme ! faut porter de la flanelle dans ce climat-ci. Quelle transition ! Quand je pense que l’autre jour je tapais sur monsieur qui aujourd’hui est mon meilleur ami !

— Il n’y a pas de mal à prouver sa supériorité dans un autre genre.

Aspect du terrain après une rencontre entre les Français et les Russes.
LE DÉPART DE CRIMÉE.

— Mon cher ami Peters, je t’assure que j’aurai trop chaud avec la pelisse que tu viens de me donner.

— Du tout, les nuits sont fraîches ; je veux que tu mettes encore ce cache-nez et ces gants fourrés, et que tu m’écrives dès ton arrivée à Constantinople, sans quoi je serai dans une inquiétude mortelle.

— Soldat, que faites-vous ainsi toujours au bord de la mer ?

— Capitaine, j’attends que bono Français reviennent.

Les seigneurs russes pouvant maintenant reprendre le cours de leurs idées.

— Nous allons avoir la guerre avec le Madagascar, faut modifier son tir.

— Suffit, caporal, au lieu de viser dans le blanc je vais tirer sur le noir.

— Nous sommes tous les deux braves ; vous étiez aux premiers coups de canon de cette campagne, et moi aux derniers que l’on a tirés aux Invalides pour la clore.

— Si j’avais pu tant seulement aller en Crimée pour avoir la médaille, au lieur de rester au dépôt !

— Monsieur, je suis au désespoir, mais la paix doit rompre nos relations.

— Ah mon Dieu ! Qu’est-il arrivé ?

— Plusieurs princes russes, monsieur.

— Cher ami, tu m’écriras en France ?

— Moi, pas savoir écrire.

— Ça ne fait rien, quand on ne sait pas écrire on fait une croix. T’en mettras plein la lettre.

— Caporal, pourquoi êtes-vous dans cet état d’ivresse ?

— Mon capitaine, c’est pas ma faute, je suis tombé dans une embuscade russe.

— Mon pauvre ami, voici la guerre terminée ; enfoncée notre collaboration, à moins que nous ne nous mettions à collaborer pour une pièce à l’Odéon ! je ne vois plus que celle-là !

— Oui, madame Prudhomme, je dois cette marque d’estime à mes nouveaux amis les Moscovites.

LE BOURGEOIS. — Brave militaire, êtes-vous content de recommencer la vie de garnison ?

LE SOLDAT. — Ça me fait un drôle d’effet depuis que j’ai été au siége de Sébastopol ; chaque fois que je vois une ville j’ai envie de la démolir avec tout ce qu’il y a dedans.

— La meilleure spéculation de ce temps-ci, voulez-vous la savoir ?

— Mais oui, voyons ?

— C’est de vendre des parapluies.

— Dix sous de pourboire pour m’avoir menée à la bourse ?

— Dame ! ma bourgeoise ! vous concevez, c’est fatigant pour le cheval ! La Bourse, ça va maintenant toujours en montant ! Il y a du tirage !

— Vous n’en faites pas de spéculations, vous autres ?

— Si fait ; je suis entré dans une compagnie de zouaves pour l’exploitation des mines de Malakoff. 30 000 actionnaires. La reine Victoria se chargeant de donner les jetons de présence, seulement l’affaire aurait pu sauter.

— Tas de polissons ! Voulez-vous bien ne pas venir belligérer si prés de la Bourse ! Vous êtes dans le cas de faire dégringoler mes fonds !

— Monsieur, je ne veux pas payer pour mon chien, il m’a mordue.

— Cependant, madame, si vous devenez enragée vous serez considérée comme ayant hérité de lui, et les héritiers étant responsables des dettes, vous devrez dix francs.

— Que le diable soit de l’animal ! et dire que j’ai payé pour cette bête comme chien d’agrément !

— Monsieur, nous ne prêtons rien là-dessus.

— Tiens ! mais ça vaut dix francs !

Les chats se tenant aux portes des mairies pour jouir du dépit des chiens soumis à la taxe.
Le nouveau collier réglementaire pour les chiens offrant de grands avantages aux jeunes gens qui désirent connaître le nom et l’adresse des jolies dames.

— Tenez, madame, en me promenant de l’autre côté des fortifications j’ai reconnu votre chien, que vous aviez sans doute perdu ; j’ai pensé que cela vous ferait plaisir de le retrouver.

— Allez au diable ! Vous êtes une canaille ! Je ne vous pardonnerai jamais ce que vous venez de faire là.

— La preuve que mon chien est un chien de garde, c’est que le voilà en faction à la porte de votre bureau !

Le chien qui a payé sa taxe et le chien qui n’est pas en règle.
MODES DE 1856.
Chapeau recouvert d’un mouchoir, redingote collant sur la peau et le pantalon également. Ce dernier article relevé vers la base et tacheté.
Courses de printemps au Champ de Mars.

— Il est joli l’almanach que vous m’avez donné pour 1856. Nous sommes en hiver, et il marque le mois de mai. Vous n’aurez pas d’étrennes l’année prochaine.

Courses de printemps à Chantilly.
COURSES DE CHANTILLY.

— Pourquoi diable ne teniez-vous pas la corde ?

— Ma foi ! d’un temps pareil, on ne pense qu’à tenir son parapluie.

— Sont-ils bêtes de faire galoper leurs chevaux ! ils ne gagneront pas.

— Et pourquoi ?

— Parce que ce sont des courses à la Marche.

Les courses de la Marche attirent cette année de nouveaux connaisseurs en chevaux.
Le cuisinier vous servait du cheval quand on mangeait du bœuf. Mais maintenant que l’on mange du cheval, il faudra bien qu’il donne autre chose.

— Je ne lui rendrai pas son salut, voilà six semaines qu’il a dîné chez moi, et il ne m’a pas encore fait sa visite de digestion.

— Tu lui as fait manger du cheval, il ne l’a pas encore entièrement digéré ; faut être raisonnable, donne-lui le temps.

— Avez-vous dit au médecin de venir ?

— Au médecin ? mais monsieur se trompe ! je suis allée chercher le vétérinaire, puisque monsieur s’est donné une indigestion avec du cheval.

À quoi l’on s’expose aujourd’hui en montant à cheval dans des lieux écartés.

— Voyez donc, cocher, qu’est-ce qui lui prend à votre cheval ?

— C’est rien, c’est une peur ; nous venons probablement de passer devant un savant.

Le Constitutionnel se présentant avec son fameux bœuf à compartiments au concours de Poissy. Projet d’une statue exécutée d’après la gravure du Constitutionnel pour le square de Saint-Jacques de la Boucherie.
LES NOUVELLES VOITURES.

— Cocher, je prends votre voiture.

— Très-bien, monsieur, Je vais vous dire où vous allez.

— En voilà une bonne, par exemple !

— Certainement, monsieur ; avec les nouvelles voitures, c’est le bourgeois qui reconduit le cocher dans son quartier : voyez le règlement.

Les chevaux des nouvelles voitures se montrant bien supérieurs aux rosses qu’on était habitué à voir jusqu’ici attelées aux voitures publiques.
Animal destiné à l’exposition cherchant à reconnaître ses bagages à son arrivée à la gare de Paris.

— Madame, il n’y a plus de places, tous nos trains sont envahis par les animaux qui vont à l’exposition de Paris. Je puis cependant vous placer encore entre deux jeunes porcs.

— La cuisinière est impardonnable ! avoir manqué ce plat-là ! ! ! Un bœuf rempli de moyens, dont elle aurait pu faire ce qu’elle aurait voulu, un sujet qui a remporté tous les prix à l’Exposition !

— Excusez ! rien que ça de cornes pour les bœufs hongrois ! Il parait que les vaches dans ce pays-là leur en font voir.

Inconvénient de s’enorgueillir de son triomphe et de vouloir se promener la tête haute quand on est bœuf de Hongrie. La vache qui n’a pas obtenu de prix rentrant dans son étable.

— Mon fils manque, je le crains, de moyens ; il ne me donne pas de satisfaction dans ses études. J’ai tourné maintenant toute mon ambition vers mon bœuf, qui, lui, me fait honneur. Il vient de me remporter un prix à l’Exposition.

— Madame Prudhomme, cette exposition agronomique m’a fait beaucoup réfléchir. Je suis convaincu que si j’étais né porc ou bœuf, on aurait parlé de moi, et je serais arrivé à quelque chose.

Madame Sand arrangeant Shakspeare comme il lui plaît. Statue de William Shakspeare ou de George Sand, comme il vous plaira, pour le foyer de la Comédie-Française.
UNE REPRÉSENTATION DE Medea.

— Au lieu de regarder madame Ristori, tu regardes la figure de ce monsieur qui est au balcon ?

— C’est un Italien, alors je cherche à lire sur sa figure si c’est beau ce que l’on dit sur la scène, ne comprenant pas moi-même la langue.

— Tu n’as obtenu qu’un accessit aux prix Véron ?

— Oui, ma chère, et on m’a donné une boite de pastilles d’ipécacuanha !