Chansons populaires de la Basse-Bretagne/Le chat de Nicolas
Ecoutez tous et écoutez
Une chanson nouvellement levée,
Qui est faite à maître Nicolas,
Qui a un chat fort rusé.
La crème, aussi le lait,
Lesquels il a souvent,
Il les boit merveilleusement ;
Il ne reste rien derrière Moutic.
Quand va la servante à l’étable,
Elle emporte tous ses vases ;
Et son petit chat (s’élance) aussitôt qu’elle,
Pour faire une danse devant elle,
Tant et si bien qu’il fait à la servante
Verser ses pots de lait.
Elle entre en une telle colère,
Qu’elle accourt sur-le-champ à la maison.
— Gare à vous, mon maître Nicolas,
Si vous ne condamnez votre chat !...
Si le chat grimpe sur les bancs,
Sur votre face je vous donnerai (de la main),
Et si je trouve le chat buvant le lait,
Tous les cheveux de votre tête seront arrachés !
— Taisez-vous, ne faites pas tant de bruit,
Car mon Moutic n’est pas sale,
Et, bien qu’on ne lui ait pas appris
A attraper souris ou rats,
Il n’y a de plus grand plaisir sur terre
Que de voir mon chant danser !... »
Pendant qu’ils étaient en train de se faire ces compliments,
Le chat sauta sur le banc,
Et, de mettre sa tête dans le pot,
Et sa queue dans le lait baratté,
Et de commencer à laper du lait,
Puisque la servante n’y prenait garde.
— « Lape-lape ! fait le chat,
A mon cœur cela fait grand bien ! »
Elle (la servante) entre dans une telle colère,
Qu’elle jette le lait sur l’aire de la maison.
Le pauvre chat demeure abasourdi,
De voir quel saut il a eu,
« — Allons, dit-elle, Olivier Frédon,
Cherchez les sonneurs pour sonner,
Et cherchez le bombardaire,
Et les jeunes gens de la ville,
Pour venir faire une chanson au chat,
Qui est resté fort évanoui ! »
Quand les choses commencent à aller bon train,
Le chat commence à bouger ;
Et le voilà d’aller, en grande liesse,
Sauter au milieu de la danse.
Un gentilhomme passa,
En carriole, sur la grand’route ;
En voyant le divertissement,
Il sortit de sa carriole ;
De son carrosse il sortit,
Pour danser, sur la grand’route.
— « Ça, dit-il, maître Nicolas,
Combien me coûtera votre chat ?
Assez d’argent j’ai pour le payer,
Et je veux l’avoir, absolument. »
Cinquante écus, en argent blanc,
A été vendu Moutic, c’est chose sûre.
Voilà Moutic parti pour Paris ;
Il ne reviendra plus sur ses pas ;
Et (voilà) les jeunes gens contristés,
Et les sonneurs navrés !
Il n’y avait poil sur la pauvre bête
Qui ne valût un louis d’or ;
Il n’y avait poil sur elle
Dont on ne pût tirer profit !