Chansons populaires de la Basse-Bretagne/Petit-Jean le Morveux
Petit-Jean le Morveux criait à la force,
(Etendu) sur le dos, au milieu de la cour.
Et la dame demandait
A Petit-Jean le morveux, en l’entendant :
— Petit-Jean, Petit-Jean, dis-moi,
Pourquoi, mon garçon, pleures-tu ?
— C’est que, Madame, si j’osais
Entrer dans votre maison, je le ferais.
— Petit-Jean, cher Petit-Jean, viens y donc.
— Madame, je vous remercie.
Et quand Petit-Jean fut entré,
Le cher Petit-Jean pleurait toujours.
Et la dame demandait
A Petit Jean, quand elle l’entendait (en l’entendant :)
— Petit-Jean, Petit-Jean, dis-moi,
Pourquoi, mon garçon, pleures-tu ?
— C’est que, Madame, si j’osais
Entrer dans votre salle j’y entrerais.
— Petit-Jean, cher Petit-Jean, viens-y donc.
— Madame je vous remercie.
Et quand il fut entre dans la salle,
Le cher Petit-Jean pleurait toujours.
Et la dame demandait.
A Petit-Jean, quand elle l’entendait :
— Petit-Jean, Petit-Jean, dis-moi,
Pourquoi, mon garçon, pleures-tu ?
— C’est que, Madame, si j’osais
Manger et boire, je le ferais,
— Petit-Jean, cher Petit-Jean, fais-le donc.
Madame, je vous remercie.
Et quand il eut mangé et bu,
Le cher Petit-Jean pleurait toujours.
Et la dame demandait
A Petit-Jean, en le voyant :
— Petit-Jean, cher Petit-Jean, dis-moi,
Pourquoi, mon garçon, pleures-tu ?
— C’est que, Madame, si j’osais
Aller dans votre chambre, j’y irais.
— Petit-Jean, cher Petit-Jean, viens-y donc.
— Madame, je vous remercie,
Et quand Petit-Jean fut entré dans la chambre,
Le cher Petit-Jean pleurait toujours.
Et la dame demandait
A Petit-Jean, en le voyant :
— Petit-Jean, Petit-Jean, dis-moi,
Pourquoi, mon garçon, pleures-tu ?
— C’est que, Madame si j’osais
Aller dans votre lit, j’y irais.
— Petit-Jean, cher Petit-Jean, viens-y donc.
— Madame, je vous remercie.
Et quand Petit-Jean fut entré dans le lit,
Le cher Petit-Jean pleurait toujours.
Et la dame demandait
A Petit-Jean, en le voyant.
— Petit-Jean, Petit-Jean, dis-moi,
Pourquoi, mon garçon, pleures-tu ?
— C’est que, Madame, si j’osais
Vous embrasser, je le ferais.
— Petit-Jean, cher Petit-Jean, fais-le donc.
— Madame, je vous remercie.
Et quand il eut embrassé la dame,
Le cher Petit-Jean pleurait toujours.
Et la dame demandait
A Petit-Jean, en le voyant :
— Petit-Jean, cher Petit-Jean, dis-moi,
Pourquoi, mon garçon, pleures-tu ?
Faire Monsieur cocu, je le ferais.
— Petit-Jean, cher Petit-Jean, fais-le donc.
Et quand il eut fait cocu Monsieur,
Le cher Petit-Jean pleurait toujours.
Et la dame demandait
A Petit-Jean, en le voyant :
— Petit-Jean, Petit-Jean, dis-moi,
Pourquoi, mon garçon, pleures-tu ?
— C’est que, Madame, si j’osais
Le dire à Monsieur, je le ferais.
— Petit-Jean, cher Petit-Jean, ne le dis pas,
Et je te donnerai trois cents écus.
— Madame, donnez-les-moi donc ....
Madame je vous remercie.
Petit-Jean-le-Morveux ne pleurait plus,
Et il s’en alla comme un homme.
Plougonven. — 1861. —