L’AGONIE DE L’ARTISTE
À la mémoire de Paul Verlaine.
Un artiste chante :
Voici l’heure d’agoniser :
Rien ne m’est plus, fors ma souffrance.
Je vois vert : C’était l’espérance.
Du vert ! Mon cœur va se briser !
J’eus des amis. Fraterniser !
Dig, ding, don : Ce fut un mensonge.
J’avais l’amour. C’était un songe.
Du bleu ! Mon cœur va se briser.
Ils m’ont dit, voulant me griser :
« Nous buvons à ta gloire, frère ! »
J’ai bu. La coupe était amère.
Du gris ! Mon cœur va se briser.
Elle dit : « Je veux apaiser
Ta douleur avec mes tendresses. »
Elle sentait d’autres caresses.
De l’or ! Mon cœur va se briser.
Je n’aurai plus un seul baiser.
Nous n’irons plus au bois, mesdames.
Et les hommes sont nés des femmes.
Du noir ! Mon cœur va se briser.
Le mal est près de m’épuiser.
Sur mes cheveux la neige tombe ;
La neige tombe sur ma tombe.
Du blanc ! Mon cœur va se briser.
Voici mon cœur paralysé.
Jésus s’en allait à l’école
Portant sa croix sur son épaule !
Du jour ! Mon cœur est tôt brisé !…
Voici mon amour épuisé…
Adieu la vie ! Adieu chimère !
Berce-moi dans tes bras, ma mère.
La nuit ! La nuit ! Mon cœur… Brisé !
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