Chants révolutionnaires - Préface

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Chants révolutionnairesAu bureau du Comité Pottier (p. v-viii).


PRÉFACE




Pottier fut et demeurera un des plus vaillants glorificateurs de la Commune de Paris, le chantre incomparable des souffrances et des révoltes du prolétariat.

Mais ce qui surtout le caractérise, c’est sa confiance inébranlable en l’avenir.

C’est en vain que les Cavaignac et autres Lamoricière ont, en Juin 1848, couché sur les rouges pavés de Paris les quatorze mille ouvriers que la brutale fermeture des ateliers nationaux leur avait offerts comme autant de cibles humaines ; c’est en vain que les héroïques efforts des derniers combattants de Mai 1871 sont venus se briser contre la « plus belle armée du monde », ainsi qu’osait s’exprimer Thiers-le-Sinistre, après le massacre épouvantable de trente mille prisonniers, durant la semaine sanglante : reprenant sa plume vengeresse, Pottier, que la mort a épargné, offre à la classe ouvrière, qui pleure ses fils les plus nobles, un chant de combat et de revanche que l’univers prolétarien a adopté : nous entendons parler de l’Internationale !

Son ardent amour pour l’humanité a fait de Pottier l’inlassable adversaire des préjugés et des haines qui divisent les nations. En son poème contre la guerre il s’écrie, s’adressant aux peuples :

On chauffe à blanc votre colère,
Peuples sans solidarité,
Mis au régime cellulaire
De la nationalité.

Et puis plus loin, dans sa Grève des Femmes :

Puisque la guerre inassouvie
Entasse morts et mutilés,
Nous, sur les portes de la vie,
Dès ce soir posons les scellés !

Puis il s’indigne contre l’exploitation de l’homme par l’homme, contre toutes les infamies qui déshonorent la société capitaliste et, levant l’étendard de la révolte, il exulte :

Devant toi, misère sauvage,
Devant toi, pesant esclavage,
L’insurgé
Se dresse, le fusil chargé !

Et dans ce livre, que l’amicale initiative de son collègue de la Commune de Paris, le citoyen Goupil, est parvenue à répandre et à populariser, le barde vigoureux, le militant sans peur ni reproche que fut Pottier, dresse ses protestations hardies contre la Trinité criminelle qui constitue la plus formidable oppression dont les êtres humains aient eu à souffrir : la Religion, le Militarisme et la Propriété individuelle !

En le lisant et en le faisant lire, les travailleurs ne paieront au poète qui les aima jusqu’à son dernier souffle, qu’un très faible tribut de la reconnaissance qu’ils lui doivent.


J. Allemane, Député de la Seine, ex-forçat de la Commune.

Ed. Vaillant, Député de Paris.

Jean Jaurès, Député du Tarn.