Charité (Gilkin)
CHARITÉ
En se signant très bas, ils disent : « Va, bamboche,
Moque-toi du Père et du Fils,
Au fond des mauvais lieux porte à Dieu cent défis
Dans le blasphème et la débauche,
Au nez de nos vertus chante et ris tout le jour,
Tapage, raille, fais des dupes,
Vide les larges brocs et chiffonne les jupes :
Nous rirons bien à notre tour
Lorsque nous te verrons, tout nu, parmi les flammes,
Rôtir, une broche à travers
Ce ventre, où grouillera, comme un paquet de vers,
Un peuple de démons infâmes !
De noirs Satans broieront tes membres dans leur groin ;
Ils tremperont dans tes prunelles
Leurs ongles phosphoreux ; et leurs dents éternelles
Mâcheront ta langue avec soin.
Crie, alors ! Pleure ! Hurle ! Éventés par les anges,
Nous chanterons avec les saints :
« Bénis sois-tu. Seigneur, dans tes justes desseins !
« Les cieux sont pleins de tes louanges.
« Ton équité punit l’immonde criminel
« Avec une force admirable
« Et ta gloire apparaît quand on voit le coupable
« Brûler dans l’abîme éternel. »
— Ainsi fleurit au cœur de ton peuple féroce,
Ô Christ, ta sainte charité !
Saigne, saigne ! Ton sang remplit l’éternité
Sans étancher leur soif atroce.