Cheikh Nefzaoui - La Prairie Parfumée - 21

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Chapitre XIVe

Description de l’utérus des femmes stériles,
et de leur traitement.

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Sache, ô Vizir, que Dieu te fasse miséricorde ! que les savants en médecine se sont engagés dans cette mer de difficultés et s’y sont embarrassés. Chacun a vu la chose à sa manière : les avis sont donc multiples et il n’en est résulté que du doute sur cette question.

Parmi les causes qui déterminent la stérilité de la femme on doit comprendre l’obstruction de l’utérus par des caillots de sang, l’accumulation des eaux de la femme[1], le défaut du sperme chez l’homme, les vices de conformation des organes de celui-ci, les affections internes de l’utérus chez la femme, la stagnation de ses menstrues et de ses eaux, l’infection malsaine de son utérus, la présence habituelle de gaz dans cet organe, la corruption de ses écoulements menstruels. D’autres, enfin, attribuent la stérilité des femmes aux génies et à l’action du mauvais sort. La stérilité se manifeste aussi chez les femmes dont le ventre est chargé d’embonpoint et dont l’utérus, se trouvant ainsi comprimé, ne peut recevoir la semence, particulièrement lorsque le membre de leur mari est court et que ses deux testicules sont très gras ; l’acte de la copulation ne s’accomplit alors qu’imparfaitement.

Un des remèdes destinés à la combattre consiste dans l’emploi de la moelle de bosse de chameau, que la femme place dans un morceau de linge et dont elle se frotte les parties sexuelles, après avoir été purifiée de ses règles. Pour compléter la médication, elle prend quelques fruits de la plante appelée raisin de chacal[2], en exprime le jus qu’elle reçoit dans un vase et y ajoute ensuite un peu de vinaigre, puis boit à jeun de ce remède pendant sept jours, son mari ayant soin de la coïter pendant cette période.

La femme peut, en outre, piler une petite quantité de graine de sésame jusqu’à ce que le jus en sorte, mêler intimement ce jus à la valeur d’une fève de poudre de sandaraque[nde 1] et boire de ce mélange pendant trois jours, une fois ses menstrues passées. Elle est apte ensuite à recevoir les caresses de son mari.

La première de ces boissons doit être prise séparément et en premier lieu ; puis ensuite la seconde, qui produira un effet salutaire, s’il plaît à Dieu très élevé !

Il est encore un autre remède. On fait un mélange de nitre, de fiel de brebis ou de vache, d’une petite quantité de la plante appelée el Meusk[3] et de la graine de cette plante. La femme imbibe de cette composition un tampon de laine douce et s’en frotte la vulve après la cessation de ses règles, puis elle reçoit les caresses de son mari et devient enceinte, s’il plaît à Dieu très élevé.

  1. (b’’) Note de l’éditeur. Sandaraque, Zernikh el ahmeur زرنيخ الاحمـر, arsenic rouge.(Dictionnaire de Kazimirski.)
  1. (141) Il y a lieu de penser que l’auteur veut parler des flueurs blanches, qui apportent des perturbations dans les organes génitaux de la femme.
  2. (142) Le raisin de chacal عنب الذيب, appelé aussi raisin de renard عنب الثعلب et meuknina مـقنينة, n’est autre que la morelle noire, solanum nigrum. C’est par erreur que ce nom a été rendu par raisin d’ours (uva ursi), qui n’est autre que l’arbousier, arbuste dont les propriétés sont anodines.
  3. (143) Le mot Meusk, qui est employé par l’auteur, désigne une plante et signifie également musc. La plante dont il s’agit est sans doute la tubéreuse, appelée en Arabe meusk er roumi مسك الرومي, le musc du chrétien.