Contes arabes (Basset)/Histoire des dix vizirs/Cinquième journée

La bibliothèque libre.
Ernest Leroux, éditeur (Collection de chansons et de contes populaires, VIIp. 65-66).

CINQUIÈME JOURNÉE

Des avantages et de l’utilité d’une certitude absolue.


Le cinquième jour, le cinquième vizir, qui avait nom Djehrbour27, se présenta chez le roi et lui dit, après s’être prosterné : « Prince, lorsque tu viens à remarquer ou à apprendre que quelqu’un jette chez toi des regards indiscrets, tu dois lui arracher les yeux. À plus forte raison, celui que tu vois au milieu de ton palais, étendu sur ton lit royal et songeant à te déshonorer, celui-là doit périr nécessairement : nous ne te poussons à agir de la sorte que par affection pour ta dynastie et par zèle de te servir et de t’aimer. Comment est-il possible de laisser vivre un seul instant ce jeune homme ? »

Ce discours remplit Azâd-bakht de colère et il ordonna d’amener sur-le-champ le prisonnier ; ce qui fut fait, et, en le voyant, il lui cria : « Malheur à toi ! tu as commis un grand crime ; ta vie ne s’est que trop prolongée, il faut absolument que tu périsses : rien n’est pour nous préférable à ta mort. »

« Ô roi, répondit le prisonnier, sache que devant Dieu je suis innocent ; c’est pourquoi j’espère vivre. Celui qui n’a rien à se reprocher n’est pas inquiet de l’avenir ; le chagrin et les soucis ne peuvent triompher de lui, tandis que le coupable sent toujours sa faute peser sur lui. Quand bien même sa vie se prolonge, il lui arrive comme au roi Dâdbin28 et à son vizir. »

« Quelle est cette histoire ? » demanda Azâd-bakht.

Le jeune homme commença :