Contes populaires d’Afrique (Basset)/104

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E. Guilmoto, Éditeur (Les Littératures populaires, tome XLVIIp. 266-268).
LV. — SOUKOUMA[1]

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LES ÉCHANGES[2]


Un jeune homme avait du miel : il le donna à sa grand’mère. Celle-ci le mangea. À son retour, il le redemanda ; elle l’avait mangé. Elle dut lui donner du grain : il l’emporta. Des poulets vinrent, le trouvèrent et le mirent en tas. Il leur dit :

— Vous dites : nous sommes de grands mangeurs.

Il leur donna le grain ; ils le mangèrent complètement.

Il le leur redemanda et ils lui payèrent un œuf. Il s’en alla et rencontra des bergers qui jouaient à la balle. Il leur dit :

— Donnez-la-moi, je voudrais la regarder.

Ils la lui donnèrent. Il leur dit :

— Vous jouez mal.

Il leur remit l’œuf en disant :

— Frappez bien une balle ; lancez loin les vôtres.

Ils frappèrent l’œuf et le brisèrent. Il leur dit :

— Donnez-moi mon œuf ; je veux m’en aller.

— Il est brisé.

— Alors, payez-le-moi.

Ils lui donnèrent des bâtons. Il s’en alla, rencontra des éléphants et leur dit :

— Vous dites : nous sommes forts ?

— Oui, répondirent-ils.

— Alors, brisez mes bâtons que voici.

Ils furent brisés.

— Payez-moi mes bâtons, leur dit-il.

— C’est toi qui as raillé nos forces.

Ils lui donnèrent un couteau. Il s’en alla et rencontra des gens qui écorchaient un bœuf ; ils se servaient d’éclats de roseaux. Il leur dit :

— C’est mauvais, jetez cela.

Il leur donna son couteau ; ils écorchèrent le bœuf et mirent le couteau à côté de la peau. Il le cacha et leur dit :

— Rendez-moi mon couteau.

Ils regardèrent après la viande. Il leur dit :

— Payez-le-moi.

Ils lui donnèrent la queue du bœuf et il s’en alla. Il arriva à un marécage, il y planta la queue et cria au secours. Les gens arrivèrent et le trouvèrent là. Il leur dit :

— Retirez mon bétail ; il est enfoncé dans la boue.

Ils tirèrent et il n’en sortit que la queue. Il leur dit : — Vous avez mis en pièces mon bétail : payez-le-moi.

Ils lui donnèrent des bestiaux. Les gens étaient au nombre de cent ; tous le payèrent : il eut cent bœufs et devint un petit chef.



  1. Le kisoukouma est parlé par les Wasoukouma sur les bords du golfe de Speke, lac de Victoria Nyanza, dans l’Afrique orientale allemande.
  2. Hermann, Kissukuma, Die Sprache der Wassukuma Mittheilungen des Seminars für orientalische Sprachen zu Berlin, t. I, fasc. III. Berlin, W. Speemann, 1898, in-8, p 193-195.