Contes populaires d’Afrique (Basset)/137

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E. Guilmoto, Éditeur (Les Littératures populaires, tome XLVIIp. 364-366).
LXXVII. — OVAMBO[1]

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LA LIONNE ET LE CHACAL[2]


Le chacal vint trouver la lionne et fut chargé de soigner ses enfants. Tandis qu’il les soignait dans la caverne où on les laissait, il en mangea un. La lionne vint vers le chacal et lui dit :

— Chacal, apporte les lionceaux ; le lait coule de lui-même ; les mamelles sont gonflées.

Le chacal apporta deux petits et dit :

— Il y en a deux qui dorment.

Il en avait mangé un. La lionne lui dit d’aller voir. Il attendit après ceux qui étaient là, puis il les emporta et en apporta deux dont celui qui avait été déjà près de la mère : il têta ; puis il le remporta. La lionne alla chasser. Quand elle fut partie, le chacal en dévora encore un ; il en restait deux. La lionne revint pour allaiter ses lionceaux. Le chacal en apporta deux.

— Va voir s’ils dorment, dit-elle.

— J’attendrai que ceux-ci aient bu.

Quand il eut fini avec eux, il apporta de nouveau ceux qui avaient été avec la mère.

— Je vais aux environs, dit la lionne.

Quand elle fut partie, le chacal en mangea encore un. À son retour, elle lui dit :

— Chacal apporte les petits.

Il n’en apporta qu’un en disant :

— Les autres dorment.

— Qu’ils viennent donc, dit-elle.

— Donne celui-ci, qu’il aille dormir.

— Non, il restera ; apporte-les tous.

Le chacal entra dans la grotte et dit :

— Ils sont là : ils dorment.

La lionne repartit. Le chacal mangea le dernier et s’esquiva. À son retour, la lionne l’appela ; il ne répondit pas. Elle entra dans la grotte pour chercher après lui ; il n’y avait pas de lionceaux. Alors elle suivit la trace des pattes qui la conduisirent à une excavation où elle creusa. Le chacal s’arracha des poils et la lionne ne saisit que ceux-ci. Il sortit et lui expliqua :

— Je suis celui qui s’épile lui-même. Le chacal est là.

Quand elle y fut entrée, elle ne trouva que les poils ; le chacal s’était enfui. Elle suivit de nouveau sa trace qui la conduisit à un arbre sur lequel le chacal était arrivé. La lionne vint et lui dit :

— Ô celui qui s’épile lui-même, viens.

— Je ne connais pas cet être-là, dit-il ; je suis le chacal ; j’ai mangé tes petits.

La lionne pleura et s’en alla. Mais quand elle fut partie, il ne descendit pas aussitôt ; il resta encore sur l’arbre. Il but de l’eau, car il avait plu dessus.



  1. L’Ovambo est parlé dans l’Afrique sud-ouest allemande.
  2. Brincker, Sprachproben aus Deutsch-Südwestafrika, Mittheilungen der Seminars für orientalische Sprachen zu Berlin, Berlin, Reimer, t.V, fasc. III, 1902, in-8o, p. 152-155.