Contes populaires d’Afrique (Basset)/15

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E. Guilmoto, Éditeur (Les Littératures populaires, tome XLVIIp. 46-47).

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AVENTURES DANGEREUSES[1]


Des individus étaient en voyage. En chemin ils s’arrêtèrent chez des anthropophages. Quand ceux-ci les virent la nuit, ils se mirent à se réjouir, les saisirent tous et les emprisonnèrent dans des cages de fer, deux par deux dans chaque cage. La nuit et le jour, à chaque moment, ils leur donnaient à manger. Quand ils furent gras, ils en mangèrent trois.

Une nuit que les anthropophages dormaient, un des prisonniers, qui était avisé, chercha un moyen de sortir, lui et ses compagnons. Quand il eut fait un trou par où pouvaient sortir deux hommes, tous s’évadèrent par là. Le bruit du fer réveilla les gens qui se mirent à leur poursuite avec leurs lions et leurs serpents. Ils les reprirent tous, excepte deux, desquels était l’avisé ; ceux-ci se sauvèrent parce que, en entendant les anthropophages sur leurs traces, il avait fait une hutte d’herbes où ils s’étaient cachés, de sorte qu’ils ne furent pas aperçus.

Quand leurs ennemis furent partis, ils enlevèrent l’herbe et s’endormirent. À son réveil, l’avisé sentit son pied allégé ; il s’aperçut qu’un lion avait dévoré son compagnon, sauf le pied. Il demeura stupéfait et effaré jusqu’à ce qu’il fut sorti de l’antre du lion et s’enfuit. Il aperçut une tente au loin, vers laquelle il se dirigea ; il y vit une femme qui lui dit :

— Sois le bienvenu et le bien accueilli.

Puis elle lui dit de s’asseoir sur sa natte, mais sous elle était un trou. On voulait l’emprisonner, mais il n’y avait pas que cela. Quand il se fut assis, elle tira la natte par dessous, l’avisé tomba dans un puits et la natte fut replacée sur lui. Il resta là jusqu’à ce qu’arriva le maître de la tente, portant deux hommes qu’il avait égorgés. Sa femme lui raconta ce qu’elle avait dit à l’avisé, puis ajouta :

— Va le tuer aussi, il est plus gras qu’eux.

Le prisonnier saisit le maître de la maison par ses longues tresses, le tua et dit à la femme qu’il était son mari. Elle le fit remonter. Alors il l’effraya et l’obligea de lui livrer tout ce qu’ils possédaient en fait d’ornements, d’argent, de parures, d’esclaves, de chameaux, de moutons et de brebis. Elle lui donna tout cela et il revint vers les siens.



  1. René Basset, Nouveaux Contes berbères, p. 172.