Contes populaires d’Afrique (Basset)/87

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E. Guilmoto, Éditeur (Les Littératures populaires, tome XLVIIp. 210-213).
XLII. — EWHÉ[1]

87

LA HYÈNE ET LE CHAT SAUVAGE[2]


La hyène avait un petit qui mourut. Le chat sauvage eut aussi un petit qui mourut.

Le chat sauvage prit son pays en dégoût ; ainsi fit la hyène et tous deux partirent pour chercher un meilleur endroit.

Quand la hyène fut arrivée à une certaine place, elle dit :

— Cela ira. Demain, au lever du jour, j’irai arracher l’herbe.

Le chat sauvage arriva par hasard au même endroit qui lui plut ; il arracha l’herbe et s’en alla dormir.

Le lendemain matin, la hyène revint :

— Oh ! dit-elle, quelle bonne place ! J’étais venue arracher l’herbe et l’herbe s’est arrachée toute seule.

Elle en prit possession, balaya le sol et s’en alla.

Le chat sauvage revint à son tour et dit :

— Oh ! quel bon pays ! J’étais venu pour balayer et le sol s’est balayé tout seul.

Il abattit quelques arbres, les laissa sur le sol et s’en alla.

La hyène revint, planta les troncs dans le sol et partit dormir.

Quand le chat sauvage fut de retour :

— Les arbres, dit-il, se sont plantés d’eux-mêmes.

Il coupa quelques bambous et les plaça sur le sol.

La hyène revint et les attacha aux troncs des arbres.

À son retour, le chat sauvage dit :

— Ah ! les bambous se sont attachés d’eux-mêmes aux arbres.

Alors il prit de l’herbe et en couvrit la maison.

— Comment cela se fait-il ? dit la hyène quand elle arriva. La chambre est finie.

Elle partagea la maison en deux parties, prenant l’une pour elle et l’autre pour sa femme.

Quand le chat sauvage revint, il dit :

— Bien, la maison est partagée en deux ; je garderai cette partie pour moi et je laisserai l’autre pour ma femme. Dans cinq jours, j’apporterai ici tout ce que je possède et je défricherai.

La hyène, de son côté, fit le même arrangement.

Quand le cinquième jour fut arrivé, le chat sauvage prit ce qui lui appartenait et vint avec sa femme.

La hyène fit de même.

Elle alla dans une chambre et le chat sauvage dans l’autre. Chacun croyait qu’il n’y avait personne d’autre dans la maison.

Au même moment, chacun cassa quelque chose et dit :

— Qu’est-ce qui casse quelque chose dans la chambre à côté ?

Et chacun d’eux s’enfuit.

Ils coururent aussi loin que de Ketu à Amoutino, et alors ils se rencontrèrent.

— Qu’est-ce que vous faites, hyène ? demanda le chat sauvage.

— J’ai bâti une maison, dit-elle, et quelque chose m’en a chassée ; je ne sais pas quoi.

— C’est ce qui m’est arrivé, dit le chat sauvage, j’ai coupé les arbres et les troncs se sont plantés d’eux-mêmes.

La hyène reprit :

— J’ai trouvé une place qui me convenait et j’étais venue pour arracher l’herbe, mais quand je suis arrivée, l’herbe était arrachée d’elle-même.

Alors le chat sauvage et la hyène se remirent à courir de nouveau.

Depuis, ils ne peuvent se regarder l’un l’autre.



  1. L’ewhé est parlé en Guinée, dans la colonie allemande du Togo.
  2. Ellis, The Ewhe speaking peoples, Londres, Chapman, 1890, in-8, p. 269-271.