Correspondance 1812-1876, 4/1861/CDLXXXVII

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CDLXXXVII

À MAURICE SAND, À BORD DU JÉRÔME-NAPOLÉON


Nohant, 27 juillet 1861.


Cher enfant,

Je crois bien que je t’écris toujours pour rien. Tandis que tes lettres sont en route pour Nohant, tu as tout le temps de dépasser la station que tu m’indiques pour y répondre. J’envoie donc à tout hasard. Je t’ai écrit bien des lettres que tu ne recevras peut-être jamais. Mais j’ai reçu, ce matin, celle que tu m’écrivais des Açores. Que te voilà donc loin, cher garçon ! Et, à cette heure, combien de centaines de lieues de plus ! Enfin tu te portes bien, tu as beau temps, tu vois les choses les plus curieuses et les plus intéressantes, je reçois tes lettres, je me dis que tu es heureux et je m’arme de tout le courage possible pour ne m’inquiéter de rien. Ma santé est très bonne, malgré un été affreux, tout pareil à celui de l’année passée. Ta sœur vient de partir, elle a passé un mois ici. Nous avons Alexandre Dumas fils et Bérengère. Nous parlons bien de toi, comme tu peux croire. Je travaille toujours comme un nègre. Tu sais que c’est preuve de santé. Je te bige mille fois.

L’Exposition est finie, les récompenses sont données ; rien pour toi, ni pour Lambert, ni pour Manceau.

Je vas écrire à madame Villot pour tes aquarelles ; mais je doute que son mari y puisse quelque chose. Je te bige encore ; quand donc sera-ce pour de vrai ? Mais sois tranquille et ne t’inquiète pas. Je suis raisonnable et si heureuse de ce qui te rend heureux ! Dis au prince que je lui ai écrit plusieurs fois pour toi. J’ai écrit aussi à Ferri.