Correspondance 1812-1876, 4/1861/CDLXXXVI

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CDLXXXVI

À M. ARMAND BARBÈS, À LA HAYE


Nohant, 14 juillet 1861.


Mon ami,

J’apprends de Londres, par Pichon, que vous avez été récemment très gravement indisposé. On pense que le climat de la Haye ne vous convient pas. Pouvez-vous hésiter à chercher un ciel plus clément pour vous ? ne savez-vous pas ce que vos amis perdraient en vous perdant, et croyez-vous ne rien devoir à nous tous qui vous aimons tant ? Les circonstances ont ralenti ou intercepté nos relations ; mais vous n’êtes pas de ceux qui doutent, et vous savez bien que mon cœur est toujours tout à vous.

J’envoie à Paris chez Pichon, qui y sera dans peu de jours, le premier volume de l’Histoire de ma vie, qu’il m’avait retourné pour que je pusse y écrire votre nom. Il y a bien longtemps que cet ouvrage, où je vous ai consacré plusieurs pages, est chez lui, attendant l’occasion de vous parvenir.

Maurice voyage. Il doit être en route pour les États-Unis. Mais je ne vous en dis pas moins que lui aussi vous aime, car je le sais. Combien souvent nous avons parlé de vous !

Je n’ose plus vous supplier de revenir en France, craignant de vous blesser dans un parti pris, auquel pourtant votre état de santé vous permettrait bien de vous soustraire, à présent qu’on doit vous recommander l’air natal. Faites que j’aie au moins de vos nouvelles et croyez à mon inaltérable affection.

GEORGE SAND.