Correspondance d’Eulalie/II/02

La bibliothèque libre.
A Londres, chez Jean Nourse. M.DCC.LXXXV (p. 76-120).
Second trimestre 1783

Lettre de Mademoiſelle Victorine.
Paris, ce 1 Avril 1783.


J’ai été, ma bonne amie, à la clôture des italiens. On a donné pour compliment une petite comédie en proſe et vaudeville qui a pour titre : Le déménagement d’arlequin, marchand de tableaux, elle eſt de Favart le fils. C’eſt une jolie petite piece qui fait alluſion au changement de leur ſalle et à la réforme de leurs pièces italiennes ; je te l’enverrai inceſſamment.

Voici un tems bien triſte à paſſer, où il faut ſe réſoudre à aller au concert ſpirituel. Car il n’y aura plus de foire St. Germain que juſqu’à ſamedi. Je n’irai pas à Long-Champs. Mon Ruſſe ne veut pas me donner de voiture à moi, car j’ai le remiſe au mois. J’ai cependant tâché d’aiguillonner ſon amour-propre ; mais cela a été inutilement. Olimpie y brillera dans un charmant équipage que lui fait faire ſon financier. Qu’elle eſt heureuſe. Elle le mérite bien, elle eſt très-fidelle à M***, elle n’a pas encor l’eſprit du corps. Je ſais pluſieurs paſſades fort avantageuſes qu’elle a refuſées. Il paroît que la Comteſſe lui a donné peu d’inſtructions, ou qu’elle ne veut pas les ſuivre. Je te ſouhaite plus de plaiſir que je ne vais en avoir juſqu’à la rentrée des ſpectacles.

Lettre de Mademoiſelle Julie.
Ce Jeudi 3 Avril 1783.


J’irai, ma chere amie, étaler mes charmes à Long-Champs[1] ; je veux y paroître brillante ; j’eſpere beaucoup de ces trois jours-là. J’y ferai ſurement quelques connoiſſances, qui me vaudront ou un entreteneur, ou au moins quelques bonnes paſſades.

Je ne ſais pas encore qui m’a remplacée auprès du Comte ; je l’ai trouvé l’autre jour à la ſortie du ſpectacle : nous nous ſommes ſalués, mais il ne m’a pas parlé.

Il paroît que les Anglois ne ſont plus ſi généreux qu’anciennement, S*** m’a écrit pour m’en propoſer un qui voudroit vivre avec moi, mais ſes offres ne me conviennent point ; je l’ai refuſé. Mon farfadet entre, je quitte la plume. Ce ſoir ou demain j’acheverai ma lettre……

C’étoit mon jour de loge aux italiens, j’y ſuis allée avec farfadet. Il m’a pris une envie de jouir au milieu du ſpectacle ; j’étois fort échauffée par la muſique ; j’ai tiré le rideau de gaze et j’ai abſolument voulu que farfadet ſe mît en devoir de me contenter. Nous avons été très-gênés, mais enfin, tant bien que mal, cela a réuſſi. On jouoit juſtement pendant ce tems-là un morceau de muſique amoroſo et le preſto a été le moment intéreſſant. Cela m’a beaucoup amuſée ; ſi j’étois riche, je voudrois avoir tous les jours de la muſique à mon coucher, et je ne m’endormirois jamais ſans cela. S’il y a des loges grillées à Bordeaux, comme je n’en doute nullement, eſſaye, ma chere Eulalie, et tu m’en diras des nouvelles. En vérité, c’eſt charmant, et je n’y penſe pas ſans avoir envie de recommencer. Adieu, tu vois que ton amie fait ce qu’elle peut pour paſſer le tems agréablement.

Lettre de Mademoiſelle Felmé.
Paris, ce 7 Avril 1783.


Je profite, mon cœur, d’un moment que j’ai de libre pour m’entretenir avec toi. Je ſuis ſans ceſſe avec mon Anglois qui me fait connoître Paris et ſes environs comme mes poches. Il n’y a pas un monument, un atelier que nous ne viſitions. Nous allons auſſi tous les jours au ſpectacle. L’opéra eſt celui qu’il préfere, et nous n’en manquons aucun. Maintenant que je t’ai parlé de mes occupations, il faut que je te faſſe part de ce qui concerne mon bien-être. L’anglois ne me donne rien de fixe par mois ; mais il me fait journellement des préſens, et me met ſouvent des rouleaux ſur ma toilette. Pour le mal que je te ſouhaite ; je t’en voudrois le ſecond tome. Adieu, mon cœur, je t’écris bien brièvement ; mais c’eſt qu’il faut que j’aille prendre l’Anglois pour aller au concert ſpirituel.

Lettre de Mademoiſelle Julie.
Ce Mardi 8 Avril 1783.


C’est demain et les jours ſuivans que je vais tenter fortune ; ma voiture ſera ſimple. J’ai fait habiller mes gens à neuf, mon cocher aura des mouſtaches et un gros bouquet. Je ſerai miſe avec une robe de la derniere élégance, et coëffée en cheveux, c’eſt ce qui me va le mieux. Je n’aurai perſonne avec moi, je ne veux pas partager les regards du public. Il faut que, ce ſoir, il ſoit parlé de Julie dans tout Paris. Plus d’une femme crevera de dépit de me voir briller, et le Comte enragera de ce qu’il ne pourra pas dire : c’eſt ma maîtreſſe. On fait notre rupture.

J’ai appris enfin le choix du Comte ; il donne à préſent dans les femmes honnêtes, ou du moins qui veulent paſſer pour telles ; il vit avec la Marquiſe de ***, elle le menera grand train, c’eſt une élégante, elle ne peut porter un bonnet trois jours de ſuite. Les mémoires qu’il faudra qu’il paye à Mademoiſelle Bertin ſeront forts. J’ai été hier ſouper ſur le Boulevard avec mon farfadet ; j’avois de l’ennui et je voulois me diſſiper. Une de ces Vielleuſes à l’uſage des vieux paillards nous a chanté diverſes chanſons gaillardes qui m’ont aſſez amuſée ; je t’en envoyé deux que je me ſuis fait écrire.

Je ſuis bien fâchée de te voir auſſi obſtinée que tu l’es de vouloir reſter à Bordeaux. Je n’aurai donc plus le plaiſir de voir ma chere Eulalie et de lui jurer que je lui ai voué mon amitié pour la vie. Adieu, méchante.

CHANSON.
Le sot Amant.
Air : du Sabot.

Que j’enrage d’aimer Nicaiſe,
Diſoit Dorine l’autre jour ;
Tout autre que lui ſeroit aiſe
De m’inſpirer un tendre amour ;

Loin de contenter mon envie,
C’eſt le plus ſot et froid garçon ;
Il mérite bien qu’on s’écrie :
Ah ! le cruchon, ah ! le cruchon.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Un jour, par une chanſonnette,

Je lui témoignai mes déſirs ;
Mille fois je la lui répete.
Avec les plus tendres ſoupirs.
C’étoient toutes peines frivoles,
L’air, dit-il, me ſemble aſſez bon,
Je ne comprends rien aux paroles :
Ah ! le etc.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Sur une naiſſante verdure,

Avant le lever du ſoleil,
Goûtant la fraîcheur la plus pure,
J’affectois un tendre ſommeil ;
Ma gorge étoit à demi-nue,
Tout lui diſoit : il y fait bon ;
Il ne contenta que ſa vue.
Ah ! le etc.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Sur un chemin couvert de glaces,
Le haſard nous fit rencontrer.
Que ce jour-là j’avois de graces !
J’étois faite pour tout tenter ;
Je gliſſai, ma jupe voltige,
Il me couvrit de ſon manchon ;
Vous êtes complaiſant, lui dis-je ;
Ah ! le etc.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Au ſon de ſa tendre muſette,

Aux accens de ſon chalumeau,
Je formois des pas ſur l’herbette,
Que ſon ſort devoit être beau !
Pour le favoriſer je gliſſe,
Et je tombai ſur le gazon ;
Il me releva ſans malice ;
Ah ! le etc.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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L’autre jour que c’étoit ma fête,

Je lui demandois un bouquet.
Quel bouquet veux-tu que j’apprête,

Dit-il, je n’en ai jamais fait.
Pauvre garçon, que tu es bête,
Ta fleur eſt de toute ſaiſon ;
Tu n’as jamais ſu la connoître ;
Ah ! le etc.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Enfin, pour la lui donner belle,

Oh ! devinez ce que je fis :
Feignant de moucher la chandelle,
Adroitement je l’éteignis.
Le ſot, pour ſignaler ſon zele,
Fut vîte chercher un tiſon ;
Il lui falloit de la chandelle !
Ah ! le cruchon ! ah ! le cruchon !

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Autre.
Le Bonnet.

Un jour la petite Liſette
Faiſoit un bonnet élégant ;

Quand il fut fait, ſon cher amant,
Voulut le mettre ſur ſa tête :
Le mit-il ? ne le mit-il pas ?
C’eſt ce que nous ne ſavons pas.  bis

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Un Cordelier dit à Nicette

Liſette dit : qu’allez-vous faire ?
Vous allez me le chiffoner ;
Finiſſez, je vais me fâcher,
Vous me feriez mettre en colere ;
Ce bonnet exige du ſoin,
Monſieur, vous ne le mettrez point.  bis

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Un Cordelier dit à Nicette

L’amant faiſoit la ſourde oreille
Au diſcours que Liſe tenoit,
Il ſoutenoit que ce bonnet
Devoit le coëffer à merveille,
Le mit-il ? ne le mit-il pas ?
C’eſt ce que nous ne dirons pas.  bis

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Vous avez la tête trop forte,

Il ne pourra la contenir ;

Ciel ! vous allez me l’aggrandir,
Eſt-ce qu’on agit de la ſorte ?
Ce bonnet exige du ſoin,
Monſieur, vous ne le mettrez point.  bis

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Ni plus ni moins que ſans cervelle,

L’amant alloit toujours ſon train,
Il tenoit le bonnet en main,
Malgré les cris de cette belle ;
Le mit-il ? ne le mit-il pas ?
C’eſt ce que nous ne ſavons pas.  bis

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Liſe, pour avoir gain de cauſe,

Propoſa cet arrangement :
Maniez-le bien, oui, j’y conſens,
Prenez la barbe et le fonds roſe ;
Tenez le bien dans votre main,
Mais, Monſieur, ne le mettez point.  bis

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Enfin l’amant, plus raiſonnable,
Ne le mit que pour faire ſemblant ;
Liſe dit : vous faites l’enfant,
Ah ! que vous êtes inſupportable !
Voilà Maman, c’eſt un témoin,
Monſieur, vous ne le mettrez point.  bis

Lettre de Mademoiſelle Julie.
Ce Jeudi 10 Avril 1783.

Hier, ma chere amie, j’ai été beaucoup remarquée à Long-Champs. J’étois très-brillante. J’ai eu la ſatisfaction d’entendre dire pluſieurs fois : qu’elle eſt jolie ! qu’elle eſt élégante ! Heureux qui peut l’avoir pour ſa maîtreſſe ! Les gens du commun témoignoient leurs déſirs en termes plus énergiques. Après avoir joui quelque tems de ce petit triomphe, je ſuis partie pour aller au concert ſpirituel [2] En arrivant, tous les regards ſe ſont fixés ſur moi ; il s’eſt élevé un murmure qui a interrompu le concert. J’étois au comble de la joie de faire tant de ſenſations. Cela m’encourage ; je veux tâcher d’être aujourd’hui encore mieux qu’hier. Adieu, je vais m’occuper ſérieuſement de l’affaire importante de ma toilette.

P. S. Pendant que j’étois à Long-Champs, j’ai prié mon farfadet qui étoit reſté chez moi de te copier quelques jolies poéſies que voici :

VERS
A M. de *** et à Mademoiſelle de ***,
la veille de leur mariage.

Jeunes amans, heureux époux,
Qui touchez au moment le plus beau de la vie ;

L’un de vous dans mon cœur a fait naître l’envie,
Et l’autre un ſentiment plus doux.

Madrigal.
A Madame de **, qui venoit d’accoucher
d’un garçon, et dont le mari avoit
quatre-vingt ans.

Jeune Eglé, votre époux, dit-on.
Malgré le froid des ans, tendrement vous adore ;
Ses ſoins et ſon ardeur viennent de faire éclore,
En dépit des hivers, un nouveau rejeton.
Bien plus fortuné que Titon,
Il a ſu rajeuner dans le bras de l’Aurore.

Conte.
Lucas et ſon Seigneur.

Or ça, Lucas, mon cher voiſin.
Quand te fais-tu porter en terre ?

Je ne puis plus, ſans un mortel chagrin,
Voir mon parc échancré par ta vieille chaumiere.
Ainſi parle à Lucas ſon Seigneur libertin,
En promenant une main téméraire
Sur le ſein rembruni de ſa moitié ſévere,
Qui la repouſſe avec dédain.
Morgué, lui dit Lucas que ſa colere enflamme,
Mieux vaut perdre ſon bien que de perdre l’honneur ;
Arrondiſſez votre parc, Monſeigneur,
Mais n’arrondiſſez pas ma femme.

Epitaphe de Fréron.

Lorſque le Jubilé commence,
Dans le tombeau Fréron deſcend ;
Quand on vit ſans être indulgent,
On doit mourir ſans indulgence.

Lettre de Mademoiſelle Roſimont.
Paris, ce 11 Avril 1783.


Voici, ma chere amie, une charmante charade en chanſon. Hier on l’a chantée à un ſoupé que j’ai fait avec pluſieurs officiers de dragons. Nous avons beaucoup bu, ris et foutu ; ainſi juges ſi j’ai été contente de ma ſoirée, je voudrois qu’elles ſoient toutes de même.

Charmante Catherine,
Son premier eſt le mois
Où le printems domine,
Et nous dicte des loix :
Oui, ce mois qu’on adore,
Formé d’inſtans trop courts,
Eſt le regne de flore
Ou celui des amours.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Comme à toute parure
Un peu d’art correſpond,
C’eſt de ta chevelure
Que ſe fait ſon ſecond ;
Le Zéphir le careſſe
En ſes joyeux loiſirs.
Que n’ai-je ſon adreſſe,
Las ! j’aurois ſes plaiſirs.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Son tout, ô Catherine,

Eſt le titre charmant,
Qui doit ſon origine
Au bonheur d’un amant.
Ah ! loin qu’il t’effarouche !
Que n’eſt-il de ton goût
D’entendre de ma bouche
Cet adorable tout !


Si j’étois ſûre de t’écrire d’ici à quelques jours, je ne te manderois pas le mot de la charade ; mais craignant que cela ne ſoit pas de long-tems, je ne veux pas de faire languir. C’eſt Maîtreſſe. Adieu, ma chere amie, ſois ſure de l’amitié de ton petit eſpiegle.

Lettre de Mademoiſelle Julie.
Ce Samedi 12 Avril 1783.


Mes apparitions à Long-Champs, ma chere amie, n’ont pas été infructueuſes. Le vendredi un laquais ſuperbement habillé, vint me remettre la lettre dont voici copie.


Ce Vendredi.

Votre figure, Mademoiſelle, a fait ſur moi une vive impreſſion. Je m’étois toujours mis en garde contre l’amour, mais je vous vis et l’amour triompha. Flegmatique, comme c’eſt le caractere de ma nation, je ne croyois pas que je puiſſe être une nuit ſans dormir pour avoir vu deux beaux yeux, et que ſans ceſſe l’image de celle qui en eſt porteuſe reviendroit à mon imagination. Vous ſeriez bien aimable ſi vous me permettiez d’aller vous faire ma cour. Si j’étois aſſez heureux pour vous trouver libre, je vous propoſerois de partager la fortune de celui qui ne s’occuperoit qu’à faire votre bonheur. Je ſuis, Mademoiselle, avec le plus violent amour, votre très-humble et très-obéiſſant ſerviteur,


Milord ***.


Je répondis :

Je ſuis très-ſenſible, Milord, aux choſes honnêtes que vous me dites et ſerai très-flattée d’avoir l’honneur de vous voir chez moi Samedi. Je ne ſortirai point et ſerai viſible toute l’après-dîner. Aujourd’hui je retourne à Long-Champs. J’ai l’honneur d’être, Milord, votre très-humble et très-obéiſſante ſervante.

Un de mes chevaux s’étant déferé aux Champ Elyſées, je n’arrivai que très-tard à Long-Champs. Je n’y apperçus pas Milord, quoique ſurement il y aura été ; mais, ne m’y voyant pas, peut-être ſe ſera-t-il en allé. J’attends avec impatience l’entrevue de cette après-dîner. Demain, ou Lundi au plus tard, je t’en donnerai des nouvelles. Adieu, ma chere amie.

Lettre de Mademoiſelle Julie.
Ce Samedi 13 Avril 1783.


Tout va le mieux du monde, chere amie, l’Anglois eſt venu me voir ; il m’a fait les complimens les plus honnêtes et les plus belles propoſitions, je n’ai rien accepté ; je veux un peu le faire ſoupirer. Il a l’air d’un fort honnête homme. Il peut avoir quarante ans ; il eſt grand, d’une figure qui paroît avoir été très-agréable. Il a un grand nez, et tu ſais que c’eſt un heureux pronoſtic, qui cependant n’eſt pas une regle générale. Je lui donne à ſouper demain. Adieu, je ne t’écrirai pas d’ici à quelques jours, voulant avoir quelque choſe de poſitif à te mander. Je vas ce ſoir étaler mes graces aux Boulevards. Ta chere amie pour la vie.

Lettre de Mademoiſelle Julie.
Ce Lundi 17 Avril 1783.


Je ſuis, ma chere amie, plus heureuſe que jamais. L’Anglois vit maintenant avec moi. Il me fait une offre que je goûte aſſez, c’eſt de voyager avec lui ; il me fera avant notre départ trois mille livres de rente viagere, et payera d’avance deux années de mon loyer, à peu près le tems que nous ſerons à parcourir l’Europe. Je lui ai demandé quelque tems pour me décider, afin de tâcher de connoître ſon caractere, ſi je le puis : car les hommes ſont auſſi diſſimulés que les femmes. Il m’a accordé juſqu’aux premiers jours de Mai. Mande-moi ce que tu me conſeilles. Je ne t’écrirai pas d’ici à ce tems-là, ne voulant m’occuper que de mon Anglois. Adieu, ma chere Eulalie, je t’aimerai toute ma vie.

Lettre de Mademoiſelle Victorine.
Paris, ce 4 Mai 1783.


Suin et Madame le Roy, ma bonne amie, ont reçu leur ordre de retraite. Les Italiens n’y perdent pas beaucoup. L’actrice valoit encore plus que l’acteur qui étoit accoutumé à être hué. Cela lui étoit égal, et il diſoit : huez tant que vous voudrez, je m’en moque, j’ai quinze mille livres de rente pour ma demi part. Tu ſeras peut-être bien aiſe de ſavoir ce qui a été cauſe de ſa réception ; lors de ſes débuts, il fut un Dimanche voir le grand couvert. La Reine d’aujourd’hui alors Dauphine l’ayant remarqué, dit à un Seigneur qui étoit derriere elle, n’eſt-ce pas ce mauvais acteur qui débute aux Italiens. Suin, qui l’entendit, changea de couleur et ſe trouva mal. La Dauphine dit : mon Dieu, je ſuis bien fâchée d’avoir fait de la peine à cet homme, comment pourrai-je réparer cela ? Madame, il ne tient qu’à vous, repartit le Seigneur, demandez aux gentils-hommes de la chambre qu’il ſoit reçu à demi part. La Dauphine le demanda et il fut

Saint-Preux et Chevalier ont auſſi été remerciés. Le premier étoit vraiment acteur.

Après t’avoir parlé des Italiens, il eſt juſte, ma bonne amie, que je te parle du théâtre national. Mademoiſelle d’Oligny s’eſt retirée ; c’eſt une perte irréparable ; qui jouera comme elle les ingénuités ? Il étoit étonnant que paroiſſant auſſi jolie ſur le théâtre, elle fut ſi laide de près. C’étoit deux figures totalement oppoſées : Madame Molé qui eſt morte laiſſe un vuide pour les rôles qu’elle rempliſſoit. On lui reconnoit actuellement un talent qu’on ne lui accordoit pas de ſon vivant.

Tu ſerois étonnée de me voir ſi au fait des ſpectacles ſi tu ne ſavois pas que j’ai un auteur dramatique à mes ordres ; mon Ruſſe n’en prend nul ombrage, il aime même beaucoup qu’il ſoupe avec nous : car il eſt fort divertiſſant.

Olympie eſt groſſe. Elle en eſt fort contente et M*** encore davantage. Elle m’a dit qu’il alloit la marier afin que l’enfant ne ſoit pas bâtard. Il a une direction des fermes à nommer qui juſtement eſt vacante dans ce moment. Ce ſera pour celui qui l’épouſera. Il s’eſt déjà préſenté beaucoup de partis ; mais M*** eſt difficile et ne veut pas prendre le premier venu pour le faire pere de ſon enfant. Que le monde, ma bonne amie, eſt une étrange choſe. Adieu, porte-toi bien, et écris moi donc plus ſouvent que tu ne fais.

Lettre de Mademoiſelle Julie.
Ce Dimanche 4 Mai 1783.


Enfin le ſort en eſt jetté, ma chere amie ; je pars, l’argent eſt chez le Notaire, et le contrat eſt paſſé. Mon loyer eſt payé ; mon propriétaire ſe charge de mon mobilier, dont il a été fait un inventaire double entre nous. Milord me paroît un galant homme, à qui je crois pouvoir me fier en toute aſſurance. Adieu, ma chere amie, les embarras, inſéparables d’un départ prochain, m’empêchent de t’en dire davantage : crois que je ne t’oublierai jamais et que j’eſpere que nous ſerons réunies un jour. En faiſant mes malles, j’ai mis de côté une petite pacotille de chiffons à ton uſage que je te prie d’accepter. Tu les recevras par la premiere diligence. Ta meilleure amie pour la vie.

Lettre de Mademoiſelle Felmé.
Paris, ce 5 Mai 1783.


Je ſuis déſolée, mon cœur, voici le billet que mon Anglois m’a écrit ce matin ; je l’ai reçu que j’étois encore au lit.

“ Je vous aime, ma chere Felmé, au-delà de tout ce qu’il eſt poſſible d’exprimer, je ſens que je ne puis être heureux qu’en vous poſſédant ſeul et pour toujours. Il n’y auroit qu’un ſeul et unique moyen pour y parvenir, ce ſeroit de vous épouſer ; mais l’honneur me le défend, et l’honneur chez moi eſt plus puiſſant que l’amour. Comme je veux éviter de ſavourer ſans ceſſe le poiſon de votre vue ; je pars, votre image gravée dans le cœur. Je vais tâcher en changeant d’hémiſphère de changer de cœur et d’oublier ma chere Felmé : mais comme je déſire que vous ſoyez heureuſe, mais très-heureuſe, je joins ici pour quinze cents louis de billets de caiſſe d’eſcompte. Adieu, ma chere Felmé, ne comptez plus me revoir. Quand ce billet vous parviendra j’aurai quitté Paris. „

A peine j’eus lû ce billet voulant queſtionner le commiſſaire, je ſonne et ordonne qu’on me faſſe parler à celui qui m’a apporté ce billet ; mais on me répand qui s’eſt en allé, auſſitôt après l’avoir remis, diſant qu’il n’y a pas de réponſe. Je me leve et vole à l’hôtel de mon Anglois, il étoit parti. Je veux m’informer où il eſt allé, je queſtionne maître et valets, perſonne ne peut me rien dire autre choſe ; ſinon qu’il a envoyé chercher des chevaux de poſte à quatre heure du matin, et eſt parti vers les ſix heures. Ah ! quels gens que ces Anglois, ils ſont inconcevables. Il m’aime, il m’adore et il me quitte. Il auroit pu vivre avec moi ſans m’épouſer. Je ſuis furieuſe de ſa perte. Il faudra m’en conſoler avec les trente-ſix mille livres qu’il m’a envoyés. Si chaque amant en me quittant m’en avoit donné autant, je ſerois bien riche. Adieu, mon cœur.

Lettre de Mademoiſelle Victorine.
Paris, ce 15 Mai 1783.


Je te félicite, ma bonne amie, d’avoir un Américain, c’eſt un bon oiſeau à plumer ; mais t’auroit-il pas été poſſible de conſerver auſſi le conſeiller ; plus on en a mieux cela vaut. Pour moi, au Ruſſe j’aſſocie mon auteur, et lorſqu’une paſſade avantageuſe ſe préſente, je ne la refuſe pas. Il y a quelques jours que j’en ai fait une avec l’Evêque de ***. Monſeigneur arrivoit de ſon évêché où il avoit été obligé à l’abſtinence, auſſi a-t-il bien officié. Nous avons été fort contens l’un de l’autre, et il m’a demandé permiſſion de revenir. J’y ai conſenti avec d’autant plus de plaiſir, que je n’ai rien à craindre de ſon indiſcretion, il eſt obligé à garder le tacet.

Il y a à Bordeaux l’Abbé de *** Grand-Vicaire, qui eſt un amateur. Il avoit à Paris la femme d’un Conſeiller au parlement. Tâche de faire connoiſſance avec lui, cela ſeroit peut-être un peu difficile à cauſe du decorum qu’il eſt obligé de garder : à vaincre ſans péril on triomphe ſans gloire. Ne pourrois-tu pas aller chez lui ſous quelque prétexte, penſe-y bien et fais ton profit de ce que je te mande. Ta bonne amie.

Lettre de Mademoiſelle Felmé.
Paris, ce 20 Mai 1783.


Enfin, mon cœur, j’ai pris mon parti, j’ai vendu mes diamans et bijoux, j’en place une partie en rente viagère, et je vais me retirer en province. Je ſuis laſſe de la vie que je mene. Je veux maintenant être ma maîtreſſe, et veux auſſi que ſi je me livre à quelqu’un, ce ne ſoit plus l’intérêt qui me guide dorénavant je conſulterai mon cœur. Je ne me marierai jamais, j’aurois trop à craindre que mon mari ne me reproche mon inconduite paſſée : ſi quelque provincial m’intéreſſe, nous pourrons nous unir ; mais ſans ſacrement, ce ſont les meilleurs mariages et ceux qui durent le plus long-tems. Je ne ſais encore où je me fixerai. Mais je pars ſous peu de jours pour Roye ma patrie. Je laiſſe ici mes meubles dans des caiſſes chez un commiſſionnaire qui me les fera paſſer où je lui marquerai, je ſuis fâchée de ne pouvoir pas embraſſer ma chere Eulalie, avant de quitter la capitale, j’eſpere que ſi elle y revient elle viendra paſſer quelque tems chez ſon amie. Je ne t’écrirai plus, mon cœur, que je ne me ſois fixée.

Lettre de Mademoiſelle Victorine.
Paris, ce 3 Juin 1783.


Comment, ma bonne amie, les acteurs de la comédie Françoiſe ſont auſſi auteurs. La Rive à fait Pyrame et Thisbe, ſcene Lyrique. On l’a donnée hier pour la premiere fois. Il a joué lui-même le rôle de Pyrame, et Thisbe étoit joué par la ſenſible Sanival cadette ; cet ouvrage a aſſez réuſſi. La muſique eſt de M. Baudron. Les connaiſſeurs diſent qu’elle lui fait honneur ; moi qui n’y entends rien, je dis qu’elle m’a fait plaiſir.

Olympie eſt mariée. C’eſt maintenant Madame de F***, directrice des fermes de la ville de A***. Son mari eſt parti au ſortir de l’égliſe pour aller à ſa direction. On lui a donné douze mille livres pour ſe meubler. Je gage que ſi le mari et la femme ſe rencontroient dans quelques années ſans ſe nommer l’un et l’autre, ils ne ſe reconnoîtroient point. C’eſt un mariage à la Langeac. Ils ne ſe ſont vus qu’à l’égliſe.

Pour tâcher d’accrocher de mon Ruſſe une paire de bracelets en diamants, je lui ai demandé ſon portrait. Je le veux bien ; m’a-t-il répondu, mais donnez moi le vôtre. Soit, lui ai-je dit ; auſſi maintenant je me fais peindre par Madame Favart. Je ferai mettre mon portrait ſur un ſouvenir. Le tout me coûtera dix louis, mais c’eſt de l’argent bien placé. Tu devrois ſuivre mon exemple avec ton américain ; je ſuis enchantée, ma bonne amie, de l’eſpérance que tu me donnes dans ta derniere lettre que l’on te verras l’hiver prochain. J’aurai bien du plaiſir à t’embraſſer et à te dire de vive voix, combien je t’aime.

Lettre de Mademoiſelle Roſimont.
Paris, ce 20 Juin 1783.


Je ſuis à plaindre, ma chere amie, j’ai attrappé une galanterie qui eſt aſſez cruelle. Je ſuis obligée à la continence. Je ne puis rendre de ſervices qu’avec mes mains à moins qu’on ne veuille riſquer l’aventure ; cela ne m’a pas empêché de faire, lundi dernier, un ſoupé chez la Comteſſe. Je m’y ſuis fort amuſée. On a beaucoup chanté. Je t’envoye ci-joint une chanſon que je me ſuis fait donner. Mais c’eſt à une condition, c’eſt que tu m’enverras la recette que tu as, pour guérir ma maladie. Je ſais qu’elle t’a ſouvent réuſſi. Rends moi vîte ce ſervice : car j’enrage de mon état, ton eſpiégle qui eſt bien punie.

Si l’on en croit certain docteur,
Spécifique eſt un mot trompeur ;
Mais, moi, ne lui déplaiſe,
Eh ! bien,
Je me ris de ſa thèſe,
Vous m’entendez bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
Correspondance d’Eulalie, séparateur
Envain ce docteur mécréant,

Proſcrit l’opium et l’aimant :

En moral et en phyſique,
Eh ! bien,
Il eſt maint ſpécifique,
Entendez-moi bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Si j’éprouve un accès d’ennui,

Je prends vîte un julep d’ay ;
Et ſoudain l’allégreſſe,
Eh ! bien.
Exile ma triſteſſe ;
Vous m’entendez bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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D’amour ai-je un tranſport fievreux ?

Mon fébrifuge eſt merveilleux,
Les charmes de ma belle,
Eh ! bien,
Calment cette étincelle,
Vous m’entendez bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Des vers, quelquefois le Démon,

Vient-il me ſouffler ſon poiſon ?

Le ſpectre d’un N***,
Eh ! bien,
M’en verſe l’antidote,
Vous m’entendez bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Si des pavots aſſoupiſſans,

Mouillent en vain mes yeux peſans,
Vîte, j’ouvre tel livre……
Eh ! bien,
De ſommeil il m’enivre,
Vous m’entendez bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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De la ſatyre le ſerpent

M’atteint-il de ſon dard perçant ?
Je ris de ſa piqûre ;
Eh ! bien,
Radicale eſt la cure,
Vous m’entendez bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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N’ai-je pû me ſouſtraire aux yeux,

D’un hydrophobe furieux ?

Le venin qu’il diſtile,
Eh ! bien,
Fuit en vapeur ſubtile,
Vous m’entendez bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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De tel barbouilleur de papier.

Qui mandie un brin de l’aurier ;
Je ris de la ſottiſe.
Eh ! bien.
Et cela l’émêtiſe,
Vous m’entendez bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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De la Marotte de Momus,

Je frotte l’orgueil d’un Craſſus :
La friction cauſtique,
Eh ! bien,
Guérit ce mal chronique,
Vous m’entendez bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Sous le maſque de l’amitié,

Si l’on m’a ſéduit à moitié,

Mon cœur rompt la ſymphiſe,
Eh ! bien,
Des nœuds que je mépriſe,
Vous m’entendez bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Enfin, deux beaux yeux ſont l’aimant,

Qui m’attire invinciblement ;
Ce puiſſant magnétiſme,
Eh ! bien,
Vaut bien le meſmériſme[3],
Vous m’entendez bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Pour vous, qui ne m’entendez pas,

Conſultez de jolis appas :
Venez auprès d’Adelle,
Eh ! bien,
Mais craignez l’étincelle…
Vous m’entendez bien.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Si tel dans mes vers croit ſe voir.
Son ame eſt ſon premier miroir ;
Chantons ſans médiſance,
Eh ! bien,
Honni qui mal y penſe,
Vous m’entendez bien.

Lettre de Mademoiſelle Victorine.
Paris, ce 23 Juin 1783.


De hier, ma bonne amie, le Ruſſe a mon portrait. Il a été enchanté de ma galanterie, et m’a bien promis qu’il me payeroit de retour. Il m’a trouvé ſi reſſemblante qu’il veut auſſi que ce ſoit Madame Favart qui le peigne. Il ira demain chez elle pour l’en prier et ſi elle a le tems il prendra tout de ſuite une ſéance.

Nous avons ici des brouillards qui inquiétent beaucoup, on dit que cela vient du déſaſtre de Meſſine. Le petit peuple croit que c’eſt la fin du monde. Pour moi je ſuis très-tranquille.

J’ai été le 6 de ce mois voir la premiere repréſentation du pere de province, cette comédie n’a point eu de ſuccès. L’intrigue eſt très-embrouillée.

On parle beaucoup de réformer les ordres religieux, comme a fait l’empereur ; cela ſeroit rendre heureux quantité de malheureux ; ſur-tout ſi on donnoit la liberté aux pauvres religieuſes victimes de la volonté de leurs parents ou d’une vocation momentanée. Que de filles, ma bonne amie, troqueroient leur godmiché pour un gros vit ! Puiſſe ce bonheur leur arriver, la population y gagneroit. Adieu, je t’embraſſe.

Lettre de Mademoiſelle Roſimont,
Paris, ce 29 Juin 1783.


Je n’ai plus beſoin de ton remede, ma chere amie, j’ai trouvé un éleve de Saint-Côme qui m’en a donné un qui en trois jours m’a guérie. D’hier il ne paroît plus rien ; en vérité, c’eſt un remede unique et nullement difficile à prendre. Je dois ce ſoir m’en donner ; j’ai une partie à la petite maiſon du Duc D***. S’il y arrive quelque choſe qui en vaille la peine, je te le manderai. En attendant voici encore une charade en chanſon et ſur l’air à la mode.

Cet air qui partout traîne,
Miron ton, ton, ton, mirontaine ;
En G, Ré, Sol ramene
Dix-huit fois mon premier.

Correspondance d’Eulalie, séparateur
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Un inſtrument guerrier
Vous donne mon dernier ;
Et mon tout à la gêne,
Miron ton, ton, ton, mirontaine ;
En claſſe, plus qu’en plaine
Tient le pauvre écolier.


Pour cette fois je te ne dirai pas le mot de la charade, ainſi tâche de le deviner, ou ſi tu ne le peux, prie que j’aye bientôt à t’écrire pour le ſavoir. Adieu, ma bonne amie, crois que malgré cette méchanceté que j’ai de vouloir te mettre l’eſprit à la torture, je ne t’en aime pas moins pour la vie. Ton eſpiégle.

  1. A Paris, dans le carême, le mercredi, le jeudi et le vendredi ſaint, au lieu d’aller à ténèbres, qui eſt l’office de l’après-dîné, tout le monde ſe rend en voiture au Bois de Boulogne, dans l’allée de Long-Champs. Les demoiſelles entretenues y vont faire briller la généroſité de leurs amans par leur luxe et la magnificence de leurs équipages. Les autres y vont étaler leurs charmes pour trouver des entreteneurs.
  2.   A Paris, les jours où il n’y a pas de ſpectacle, il y a concert ſpirituel au château royal des Thuileries.
  3. Mot compoſé par alluſion au ſyſtême de Meſmer, médecin.