Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 5/0924

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Louis Conard (Volume 5p. 313-314).

924. À SA NIÈCE CAROLINE.
Mercredi, 4 heures [juillet 1867].
Mon pauvre Loulou,

Tes deux pauvres vieux n’ont pas été d’une gaieté folle après ton départ. Enfin ! il faut bien se résigner. Ta grand’maman a eu une petite attaque de nerfs qui n’a pas eu de suites ; cela lui est venu à propos de ses comptes de cuisine ; mais, depuis lors, elle est beaucoup mieux. En fait de nouvelles, Monseigneur est venu dîner avec nous samedi et est reparti lundi matin. Croirais-tu que les Achille s’en vont aujourd’hui à Paris, voir l’Exposition ?

M. et Mme Fortin nous ont donné sur ton ami le père Calame les détails les plus déplorables : il paraît que c’est un vieux pochard, et pas trop honnête.

Nous attendons toujours Juliette avec ses mioches samedi prochain, et notre intention est de partir jeudi (de demain en huit). Je crois que les dames Vasse viendront ici vers le milieu d’août.

Nous avons maintenant des couvreurs sur le toit ; le tapotement a succédé à l’infection. Combien je te plains d’être au milieu de la peinture ! Tes maux de cœur ne m’étonnent nullement : je regarde comme insensé d’habiter dans une maison pareille ! Je n’ai pas dit à ta grand’mère ce que tu m’avais recommandé de lui cacher ; mais à l’avenir, quand tu voudras m’écrire quelque chose de particulier, mets-le sur un petit bout de papier spécial, car il faut, bien entendu, que je lui lise tout haut tes lettres ; autrement la bonne femme se blesserait.

N’oublie pas de m’envoyer très prochainement des bouffettes pour mes pantoufles.

N’as-tu pas le premier volume du Chateaubriand de Sainte-Beuve ?

Adieu, ma chère Caro, et tout à toi.