Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 8-9/1861

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Louis Conard (Volume 8p. 277-278).

1861. À MADAME JULES SANDEAU[1].
[Paris], lundi soir [juin 1879 ?]

Comme j’ai pensé à vous aujourd’hui ! Je ne vous ai pas quittée ! et je ne veux pas m’endormir sans vous dire combien votre peine m’afflige et comme je participe à votre douleur. Je sais ce que sont ces moments. J’ai passé par là. J’ai enseveli mes mieux aimés et je les ai baisés au front, dans leur dernier costume. Les chagrins du passé me reviennent à propos du vôtre. Si je pouvais supporter la voiture, j’irais vous voir et vous serrer les mains bien tendrement. C’était pour vous une compagnie si douce ! Ah ! je vous plains, pauvre chère amie ! Moi qui fais métier d’écrire, voilà que je ne trouve pas un mot ! C’est qu’il n’y en a pas. Eh bien, pleurez ! soyez triste ! dégorgez votre cœur et dites-moi, de temps à autre, comment vous allez.

Mille bonnes tendresses et tout à vous.


  1. À la suite du décès de son fils.