Correspondance de Voltaire/1731/Lettre 222

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Correspondance de Voltaire/1731
Correspondance : année 1731GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 33 (p. 227-228).
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222. — Á M. DE CIDEVILLE.
À Paris, ce 3 septembre 1731.

J’ai été bien malade, mon cher ami ; je n’ai pu ni vous écrire,

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.................. je remets son entrée à la Saint-Martin. Je vais passer le mois de septembre tout seul à Arcueil, dans la maison de M. le prince de Guise[1], qu’il a la bonté de me prêter. Il est juste que les descendants du Balafré et du jeune d’Aumale fassent quelque chose pour moi. Je passerai mon temps à corriger sérieusement Ériphyle, que les comédiens demandent avec empressement. Androgide[2] me déplaît plus que jamais. Ériphyle n’était pas plus effrayée de ce coquin-là que je le suis. Je vous dirai, avec une très-méchante plaisanterie, qu’il a trop l’air d’avoir f… la reine, et que, pour moi, il me f…. Je voudrais bien savoir si pareille chose vous arrive avec votre troisième acte ; autrement, que mon exemple vous encourage ; achevez votre besogne, pendant que je corrige la mienne. Laissez les avocats faire les fainéants[3] pour le bien de l’État, et achevez, pour les plaisirs du public et pour votre gloire, ce que vous avez commencé si heureusement. Je suis bien faible, et j’ai la tête bien étonnée encore ; c’est ce qui fait que je n’écris point à M. de Formont ; mais je ne crois pas qu’il ait besoin de mes lettres pour savoir ce qu’il doit penser de mon estime et de ma tendre amitié pour lui. Vous contribuez furieusement l’un et l’autre à me faire regretter Rouen. J’espère vous revoir dès qu’Ériphyle aura été jouée. En attendant, je vais travailler comme un beau diable pour mériter un peu votre suffrage et justifier les sentiments que vous avez pour moi.

Le parlement s’assemble demain, pour mortifier, s’il peut, l’évêque de Laon[4]. Toutes ces tracasseries ne m’intéressent guère ; je ne me mêle plus que de ce qui se fait à Argos[5].

Adieu, mon cher ami ; mille tendres compliments, je vous en supplie, à M. de Formont.

  1. Celui qui devint le beau-père du duc de Richelieu, en avril 1734 ; mari de la princesse de Guise à laquelle est adressée la lettre 242.
  2. Ce personnage a depuis été appelé Hermogide. (B.)
  3. Voyez tome XVI, page 73.
  4. Étienne-Joseph de La Fare, né en 1691 ; fils du poëte et frère puîné du maréchal.
  5. Lieu de la scène, dans Ériphyle.