Correspondance de Voltaire/1732/Lettre 244

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Correspondance de Voltaire/1732
Correspondance : année 1732GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 33 (p. 248-249).
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244. — À M. DE CIDEVILLE.
Ce 17 mars 1732.

Voici M. de Linant, monsieur, qui fait des vers pleins d’images et d’harmonie, et qui mérite par là votre bienveillance. Je crois qu’il ira loin, parce qu’il a à présent trop d’idées et de fougue. La fureur de la jeunesse se change par le temps en chaleur. Je désespérerais de lui si, à son âge, ses vers étaient raisonnables. Il m’a paru beaucoup plus sage que sa poésie, et Je ne sais rien de si bien qu’une conversation douce et une poésie vive. Vous, mon cher Cideville, qui possédez si bien ces deux talents, encouragez-les dans ce jeune élève. Il sera digne de vivre à Paris en bonne compagnie quand il vous aura vu quelque temps. J’envie le plaisir qu’il va avoir : je ne puis m’empêcher de lui donner cette lettre, afin que je sois sûr qu’on vous parle de moi. Vous m’avez envoyé versiculos dicaces, et une épître charmante. Adieu, le cœur le mieux fait et l’esprit le plus aimable que je connaisse.