Correspondance de Voltaire/1740/Lettre 1252

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Correspondance de Voltaire/1740
Correspondance : année 1740GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 35 (p. 397-398).

1252. — À FRÉDÉRIC, PRINCE ROYAL DE PRUSSE[1].
Mars.

Monseigneur, il nous arrive dans le moment une écritoire[2] que Mme  du Châtelet, et moi, indigne, comptions avoir l’honneur de présenter à Votre Altesse royale pour ses étrennes. Le ministre[3] qui, selon votre très-bonne plaisanterie, est prêt à vous prendre souvent pour un bastion ou pour une contrescarpe, vous offrirait une coulevrine ou un mortier ; mais nous autres êtres pensants, nous présentons en toute humilité à notre chef l’instrument avec lequel on communique ses pensées. Je l’ai adressée à Anvers ; elle part aujourd’hui, et d’Anvers elle doit aller à Wesel à l’adresse de M. le baron de Borcke, ou, à son défaut, au commandant de la place, pour être remise à Votre Altesse royale. Ce qui m’encourage à prendre cette liberté, c’est que ce petit hommage de votre sujet, ayant été fait à Paris, imite et surpasse le laque de la Chine. C’est un art tout nouveau en Europe, et tous les arts vous doivent des tributs. Pardonnez-moi donc, monseigneur, cet excès de témérité.

Je suis avec la plus tendre reconnaissance, l’estime et l’attachement le plus inviolable, et le plus profond respect, monseigneur, de Votre Altesse royale, etc.

  1. Cette lettre de Voltaire, dans l’édition de Beuchot et dans celle de Preuss, est datée du mois de décembre 1738 ; mais d’une part, dans sa lettre du 12 mars 1740, Voltaire supplie d’Argental de passer chez Hébert pour presser l’écritoire destinée à Frédéric ; d’autre part, les remerciements de Frédéric pour l’écritoire sont datés du 21 mars 1740 : la place approximative qui doit lui être assignée est donc celle que nous lui donnons ici.
  2. Dont il est question dans la lettre précédente.
  3. M. de Valori ; voyez le quatrième alinéa de la lettre 1217.