Correspondance de Voltaire/1752/Lettre 2418

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Correspondance de Voltaire/1752
Correspondance : année 1752, Texte établi par Condorcet, GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 37 (p. 473-474).

2418. — À M. DE CHENEVIÈRES[1].
Potsdam, 25 août.

Vous m’avez bien rendu justice, monsieur, sur mon zèle pour la famille royale et sur mon attachement à la patrie. Je vous remercie sensiblement des nouvelles que vous avez bien voulu me donner de la maladie de monseigneur le dauphin.

Je me flatte que la santé de M. le comte d’Argenson est parfaitement rétablie, puisque vous ne m’en parlez pas. Je conserverai pour lui toute ma vie le dévouement le plus tendre. Il ne se souvient peut-être pas que j’ai mis sens dessus dessous, pendant six mois, toutes les archives de la guerre. J’ai mis tout cela en ordre dans mon agréable retraite de Potsdam, et j’y ai fini entièrement toute la guerre de 1741.

Mon séjour en Allemagne ne m’a pas été infructueux pour cet ouvrage. Il appartient naturellement à M. le comte d’Argenson, et pour peu qu’il en eût la moindre curiosité, j’aurais l’honneur de le lui envoyer. Il ne laisserait pas d’y trouver des particularités intéressantes qui lui sont peut-être inconnues. Au reste, ce n’est pas un morceau d’histoire dans le goût du Siècle de Louis XIV. S’il a fallu ici entrer dans de grands détails, croyez que ce n’est pas chose aisée de sauver l’ennui que doit causer une si grande multiplicité d’intérêts et de faits militaires. Cette histoire et le Siècle de Louis XIV sont deux morceaux consacrés à la gloire de la nation dans différents genres. M. le comte d’Argenson pourrait s’en faire lire quelques pages pour s’amuser, s’il en avait le temps ; au pis aller, le manuscrit sera un monument dans sa bibliothèque.

Je me flatte que ma nièce a passé quelques jours avec vous. Elle doit vous avoir dit combien je vous suis dévoué. Je ne vous écris point de ma main ; une nouvelle secousse de ma maladie m’a laissé une faiblesse extrême.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.