Correspondance de Voltaire/1752/Lettre 2443
Si vous continuez du train dont vous allez, le Dictionnaire sera fait en peu de temps. L’article de l’Âme que je reçois est bien fait ; celui de Baptême y est supérieur. Il semble que le hasard vous fait dire ce qui pourtant est la suite d’une méditation. Votre Dictionnaire imprimé, je ne vous conseille pas d’aller à Rome ; mais qu’importe Rome, Sa Sainteté, l’Inquisition, et tous les chefs tondus des ordres irreligieux qui crieront contre vous ? L’ouvrage que vous faites sera utile par les choses, et agréable par le style ; il n’en faut pas davantage. Si l’âme de vos nerfs demeure dans un état de quiétude, je serai charmé de vous voir ce soir ; sinon je croirai qu’elle se venge sur votre corps du tort que votre esprit lui fait. Ce qu’il y a de sûr, c’est que je ne crois pas que moi ni personne soit double. Les grands, en parlant d’eux, disent nous : ils n’en sont pas multipliés pour cela. Mettons la main sur la conscience, et parlons franchement : l’on avouera de bonne foi que la pensée et le mouvement, dont notre corps a la faculté, sont des attributs de la machine animée, formée et organisée comme l’homme. Adieu.