Correspondance de Voltaire/1757/Lettre 3327

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Correspondance de Voltaire/1757
Correspondance : année 1757GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 39 (p. 183-184).

3327. — À M.  THIERIOT.
À Monrion, 3 mars.

Je n’entends point parler de vous, mon ancien ami, depuis que vous lisez l’histoire des sottises humaines depuis Charlemagme. Je voudrais bien savoir aussi ce que c’est qu’un Portefeuille trouvé[1]. On me met en pièces, on se divise mes vêtements, et on jette le sort sur ma robe.

Je voudrais que vous eussiez passé l’hiver avec moi à Lausanne. Si vous n’aviez été enchaîné, selon votre louable coutume, au char des jeunes et belles dames, vous auriez vu jouer Zaïre en Suisse mieux qu’on ne la joue à Paris ; vous auriez entendu la Serva padrona sur un joli théâtre ; vous y verriez des pièces nouvelles exécutées par des acteurs excellents ; les étrangers accourir de trente lieues à la ronde, et mon pays romance, mes beaux rivages du lac Léman, devenus l’asile des arts, des plaisirs, et du goût ; tandis qu’à Paris la secte des margouillistes occupe les esprits, que le parlement et l’archevêque bataillent pour une place à l’hôpital et pour des billets de confession, qu’on ne rend point la justice, et qu’enfin on assassine un roi. Jouissez de tant de charmes et de tant de gloire, messieurs les Parisiens, et applaudissez encore au Catllina de Crébillon.

  1. Voyez tome VI, page 337.