Correspondance de Voltaire/1759/Lettre 3791

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Correspondance de Voltaire/1759
Correspondance : année 1759GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 40 (p. 46-47).

3791. — À M. DE BRENLES.

J’étais étonné de votre silence, mon cher ami ; je tombe des nues ; on me dit que vous êtes fâché du petit mot que je vous écrivis sur la cabale de Grasset. Il me semble, autant que je puis m’en souvenir, que j’étais aussi touché de votre amitié que mécontent du parti de Grasset. Je crois vous avoir dit que ce parti me paraissait insensé de protéger un fripon décrété de prise de corps pour avoir volé ses maîtres, contre votre ami qui s’était attaché à Lausanne, qui n’y était venu que pour vous, qui dépensait à Lausanne autant qu’un Anglais, et qui laissait un legs à l’école de charité[1] de Lausanne. Tout cela est vrai ; je vous ouvre toujours mon cœur, parce que la franchise de l’amitié permet tout. Si j’ai ajouté quelque sottise, avertissez-moi ; un ami doit avertir son ami.

J’ai mandé à M. le bailli de Lausanne que « je me mettais sous la protection d’un brave officier comme lui, et que le parti de Grasset avait beau faire demi-tour à gauche, je ne craignais rien de ses manœuvres, avec un commandant comme lui ». Il me semble encore que cette lettre est agréable et doit plaire ; il m’a répondu avec sa bonté ordinaire. Je suis très-content ; je n’imagine pas pourquoi on me mande qu’on ne l’est point. Je n’en crois rien ; je n’en veux rien croire. Périssent les tracasseries ! Conservez-moi, vous et votre chère philosophe, une amitié dont j’ai toujours senti le prix et chéri les douceurs. V.

L’exécution des jésuites ne se confirme pas ; on ne fait que mentir d’un bout de l’univers à l’autre.

  1. Voyez plus haut la lettre 3778.