Correspondance de Voltaire/1759/Lettre 3942

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Correspondance de Voltaire/1759
Correspondance : année 1759GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 40 (p. 188-189).

3942. — À M.  DUPONT,
avocat.
6 octobre.

M.  le prince de Beaufremont, mon cher ami, a été un peu plus occupé de cette campagne des Hanovriens et des Hessois que des Goll ; cependant il n’a point négligé leurs affaires ; il a écrit à M.  le maréchal de Belle-Isle, lequel a recommandé tous les Goll à M.  l’intendant d’Alsace. J’ai eu l’insolence, moi qui vous parle, d’écrire aussi pour m’informer du résultat ; mais ce résultat n’est pas jusqu’à présent trop favorable à MM.  Goll. On dit qu’un Goll ne peut succéder à un catholique, et qu’un damné ne peut avoir la place d’un élu. Pour peu que cette affaire devienne matière de foi, ni vous ni moi n’y aurons grand crédit. Mon avis est qu’on attende un peu, et qu’on s’en remette à la Providence ; je tiens que voici un très-mauvais temps pour se ruiner en procès ; un troisième vingtième doit rendre les hommes sages. J’en parle en homme désintéressé, car toutes mes terres sont libres et ne payent rien. Je ne veux pourtant pas dire avec Lucrèce :


Suave mari magno, etc.

(Lib. II, v. i.)

Quoique je sois au port, je plains fort ceux qui sont dans le bateau. Je cultive de plus beaux jardins que ceux de Candide ; mais j’ai bien peur que vous ne soyez de mauvaise humeur comme Martin. Mille compliments à madame votre femme ; ne m’oubliez pas, je vous prie, auprès de M.  et de Mme de Klinglin. V.