Correspondance de Voltaire/1760/Lettre 4216

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Correspondance de Voltaire/1760
Correspondance : année 1760GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 40 (p. 495-496).

4216. — À M.  LE MARQUIS D’ARGENGE DE DIRAC[1].
Aux Délices, 6 auguste[2].

Je crois, monsieur, avoir plus besoin de M.  Tronchin que le jeune homme dont vous me parlez. Ma santé s’affaiblit tous les jours, et c’est ce qui m’a privé de l’honneur de vous répondre plus tôt. Si vous venez dans nos quartiers, le triste état où je suis ne m’empêchera pas de sentir le bonheur de vous posséder. J’ai peur que vous ne soyez bien mal logé dans la petite maison que j’occupe à un demi-quart de lieue de Genève ; mais on tâchera, par toutes les attentions possibles, de suppléer à ce qui nous manque.

Il paraît, par les lettres dont vous m’honorez, que vous n’avez besoin du secours de personne pour mépriser les idées absurdes dont le monde est infatué. Les sottises qui règnent dans la plupart des têtes viennent encore plus de la faiblesse du cœur que de celle de l’esprit. Je serai enchanté de voir en vous une âme courageuse et éclairée.

Pardonnez à un pauvre malade s’il donne si peu d’étendue aux sentiments que vous inspirez : il espère se dédommager d’une si courte lettre par le bonheur de vous recevoir chez lui.

J’ai l’honneur d’être, avec tous les sentiments que je vous dois, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. On remarquera l’emploi du mot auguste pour août.