Correspondance de Voltaire/1763/Lettre 5250

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Correspondance : année 1763GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 42 (p. 439).

5250. — À M. PIERRE ROUSSEAU[1].
26 mars 1763.

J’ai écrit, monsieur, dès que j’ai reçu votre lettre, mais je n’ai pu écrire qu’en général, et vous jugez bien que la requête d’un solitaire des Alpes a très-peu d’effet à Paris et à Versailles, surtout quand elle n’est pas assez motivée. J’aurais désiré que vous m’eussiez instruit des prétextes qu’on a pris pour saisir vos effets : il faut apparemment qu’on vous suppose quelques dettes ou que vous ayez eu le malheur de transiger avec des personnes qui abusent de votre facilité. Il n’est que trop ordinaire aux gens de lettres de faire de mauvais marchés ; en ce cas, ne pourrait-on pas demander des arbitres et les faire agréer par M. le duc de Bouillon ? Cette voie me paraît la plus raisonnable, la plus courte, et la moins dispendieuse. Je ne vois pas d’ailleurs qu’on puisse vous empêcher de faire un journal : c’est un travail que tout le monde peut entreprendre, et s’il y a quelque avantage c’est pour celui qui réussit le mieux.

Je conçois encore moins comment on a pu saisir les effets de madame votre femme, sans quelque sentence juridique obtenue en vertu de quelque dette contractée ou de quelque acte de société. Vous me laissez dans une ignorance totale de ce qu’il était nécessaire de savoir pour vous rendre service. Il ne tient qu’à vous de m’envoyer un détail exact qui puisse autoriser mon zèle : il est très-vif et très-sincère, mais il a besoin d’être éclairé.

J’ai l’honneur, etc.

  1. Le mst est à la Bibliothèque royale de Belgique, sous le n° 11583. — Communiquée par M. F. Brunetière.