Correspondance de Voltaire/1763/Lettre 5305

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Correspondance : année 1763GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 42 (p. 489-490).

5305. — À M. DAMILAVILLE.
Mai.

Pour le coup, c’est au premier commis des Vingtièmes que j’écris. Je vous prie, mon cher frère, de me dire si on paye les trois vingtièmes pour l’année 1763. On me les demande pour la partie de mes terres qui n’est pas franche : car ce que j’ai acquis pour m’arrondir est sujet aux charges de l’État. C’est peu de chose, et il est très-juste de payer des taxes nécessaires ; mais on devait donc avertir, dans l’édit, que le troisième vingtième supprimé se payerait cette année.

À présent, mon cher frère, je parle aux philosophes ; le cœur me saigne toujours de les voir dispersés et peu unis : ils ne font pas tout le bien qu’ils pourraient faire ; ils pourraient, s’ils s’entendaient, faire triompher la raison. Le premier service est, ce me semble, d’ôter l’ivraie et les chardons de la terre qu’on cultive, et c’est à quoi le Jean Meslier me paraît bien propre.

Ce bonhomme, qui ne prétend à rien, et qui avertit les hommes en mourant, est un merveilleux apôtre. Ne puis-je vous envoyer quelques Meslier par M. de Courteilles, dont les paquets ne sont jamais ouverts ?

On dit que la Mort de Socrate est froide[1] : je m’y attendais, mais j’en suis bien fâché. La philosophie n’est pas faite pour le théâtre, à moins qu’un intérêt très-grand et des passions très-vives ne soutiennent la pièce.

Que fait Thieriot ? que font les frères ?

Faites-moi l’amitié, je vous prie, défaire parvenir l’incluse à M. Marmontel.

  1. Voyez la note, pagge 483.