Correspondance de Voltaire/1764/Lettre 5560

La bibliothèque libre.
Correspondance : année 1764GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 43 (p. 125-126).

5560. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
12 février.

Si Pygmalion la forma,
Si le ciel anima son être,
L’amour fit plus, il l’enflamma.
Sans lui que servirait de naitre ?


Si mes anges trouvent ces versiculets supportables, à la bonne heure, sinon au rebut. J’aurai du moins eu le mérite de leur avoir obéi sur-le-champ, et c’est un mérite que j’aurai toujours.

Mes anges me donnent de très-bonnes raisons d’avoir mis Lekain de la conspiration ; ils ont très-bien fait, je les applaudis ; je leur ai toujours dit : « Votre volonté soit faite ; » mais je joins l’approbation à la résignation.

Je répète à mes anges que la nation a enfin trouvé son vrai génie, sa vraie gloire, qui est l’opéra-comique. On me mande pourtant qu’il y a de très-belles choses dans Idoménée. car je suis encore assez bon Français pour aimer le tripot de Melpomène.

Je joins ici la liste des tripotiers, que mes anges me demandent ; j’y joins aussi un petit extrait pour la Gazette litérraire, dont j’envoie le double à M. Arnaud ; je l’ai cru digne de votre curiosité. Tout Ferney (au curé près) remercie mes anges et M. le duc de Praslin. Bien est-il vrai que M. le duc de Praslin m’a fait tenir hier un petit paquet de je ne sais où, et qui contient les Sermons dont j’envoie l’extrait ; mais pour le gros paquet délivré à M. le comte de Guercliy par Paul Vaillant, shérif de Londres, je n’en ai point de nouvelle ; et tout ce que je peux faire, c’est de joindre ici un petit mémoire de ce que contenait ce tardif paquet, qui était préparé depuis six mois, et qui viendra probablement en qualité d’almanach de l’année passée. Mes yeux sont encore en très-mauvais état ; mais dès que j’aurai des yeux et des livres nouveaux, je fournirai à M. l’abbé Arnaud[1] tous les mémoires dont je pourrai m’aviser.

N. B. Pour peu qu’il y ait encore de bonne foi chez les hommes, mes anges doivent avoir reçu un double des Trois Manières. M. Janel lui-même doit leur avoir envoyé deux Olympie ; plus, des remontrances sur Olympie, accompagnées d’une lettre. Il y avait aussi une lettre avec les Trois Manières, dans un paquet adressé à M. de Courteilles. Si rien de tout cela n’est arrivé, à quel saint désormais avoir recours ? Je présente à mes anges la plus respectueuse tendresse.

  1. Pour la Gazette littéraire ; voyez tome XXV. page 151.